A PROPOS DES MONUMENTS BOUSSART
Alain
GRAUX
A
différentes époques, des Binchois conçurent le projet d’élever un monument au
général d’Empire, André Boussart. En 1830, le notaire Hubert Wanderpepen en
fait la proposition. En 1848, un capitaine en retraite, Jean-Baptiste Dineur[1] et
Caroline Popp, née Boussart[2],
reparlent de cette idée, mais celle-ci reste sans suite[3].
Ce
ne fut que vers 1930 que le projet prit forme. Le chanoine Edmond Puissant
suggéra qu’on élève u mémorial à la gloire des Boussart au centre d’une
pelouse du parc communal de Binche[4].
C’est
à l’initiative de l’écrivain dialectal René Légaux[5] que
se forme le 3 novembre 1936 un comité pour l’érection d’un mémorial Boussart[6]. Il
en prend la présidence, le bourgmestre Charles Derbaix étant président
d’honneur, Paul-Clovis Meurisse et Eugène Lemonnier Vice-présidents à
l’éffigie, soit le secrétariat étant tenu par Louis Gérard.
Plusieurs
projets sont écartés tels que plaque commémorative, gravure de médailles, buste
du général :
« …M. le bourgmestre n’aime pas un buste sur colonnette qui lui semble
faire trop cimetière… »[7].
« …nous avons donc songé à un bloc de pierre brute genre rocher dans
lequel serait un buste taillé en ¾ saillie dans une niche… »[8].
« …et ici nous revenons à notre idée première, un bloc de pierre brute
supportant soit une plaque de marbre, soit un buste du général. Cette pierre serait
utilement ornée de quelques insignes, décorations, voire l’ombre des pyramides… »[9].
Finalement,
on retint l’idée d’un monument très simple qui serait confié à un sculpteur en
renom. Victor Demanet fut recommandé par M. Yvan Paul.
Le
monument fut imaginé par l’architecte
Victor Rémy[10].
Le
30 mars 1838, Réné Légaux soumet au comité l’avant-projet de sculpture d’un médaillon[11].
Celui-ci est favorablement accueilli.
Le
18 mai 1938, le sculpteur signale qu’il
est grand temps de commander les
pierres, car il craint une hausse des prix. A cette date, un plan d’aménagement
des pelouses du parc est établi. Le 30 juin, le comité se rend au parc où un
gabarit est monté aux dimensions exactes et au niveau voulu. On décide de
placer la face du monument entre les
deux chemins et le kiosque. Lors de cette réunion, le sculpteur a décidé des
changements de détail sur l’ordonnance du monument. Il va remplacer les palmes
encadrant l’effigie de Boussart par une moulure avec un filet doré, un N
surmonté d’un aigle selon l’officiel du temps est prévu au sommet du médaillon.
Le texte est fixé lors de cette séance.
Le
20 juillet 1938, le comité se rend chez l’artiste qui en est déjà à la finition
de la stèle. René Légaux trouve le médaillon très impressionnant et dit qu’il a
un relief fort imposant[12]. Il
signale qu’on supprimera la reproduction du sceau communal qui était prévu au
dos du monument car le texte suivant est prévu : Au lieutenant colonel
Félix Boussart, membre de la légion d’honneur 1771-1813 et aux 60 Binchois
médaillés de sainte-+Hélène 1858, et que la gravure de la médaille de
Ste-Hélène est donc préférable au sceau[13].
Le
comité s’activa à recueillir les derniers fonds. Il faut signaler qu’un comité
français avait été formé et que de part et d’autre de la frontière de
nombreuses manifestations, expositions, concerts, etc.[14]
avaient été organisés afin d’ériger le monument qui fut inauguré le 18
septembre 1938 en présence et sous le patronage de la princesse Napoléon.
Le
monument fut vandalisé en juin 1940, pendant l’occupation allemande, comme nous
l’apprend Paul-Clovis Meurisse :
« …au lendemain de l’évacuation devant les
hordes allemandes, quelque esprit fort, mis à l’abri par l’anonymat, estima
qu’il faisait œuvre patriotique en
jetant bas le monument Boussart. Un pavé de granit servit à marteler l’effigie
du vaillant soldat et brisa l’aigle, symbole de cette époque… Quelques
années plus tard, les pierres étaient redressées, mais le gracieux monument est
une ruine qu’il serait vain de chercher à restaurer. S’il fallait retailler les
pierres, elles seraient en lames de couteau…»[15].
Le
monument sculpté par Victor Demanet fut déposé dans la cour de la maison Bette.
En
1948, un comité pour l’érection d’un monument à la mémoire de René Légaux se
créa. Il était présidé par le Dr Henry et était composé de MM. Louis Leroy,
Fernand Delval, Raoul Danheux, Albert Alardin, Charles Blairon, Maurice Dufour,
Paul Vanderborght, Paul-Clovis Meurice, François Navez et Norbert Delporte. Ils
décidèrent d’un ensemble comprenant le
monument René Légaux et la remise sur pied
d’un nouveau monument à la gloire d’André Boussart dans les lignes de
l’ancien (à la verticale) et le monument Légaux au fond du parc (à
l’horizontale). Ils proposèrent l’abaissement du mur donnant sur la chapelle du
Vieux cimetière et de le remplacer par une grille.
La
partie sculpturale fut confiée à Edmond Dubie, de Mons[16].
En
séance du 27 mars 1948, le secrétaire du comité signale que les usines Godin,
de Guise (France) ont mis en œuvre l’effigie en bronze du général entourée
d’une couronne de lauriers ainsi qu’un aigle pour orner le monument. Elles
promirent aussi un livre en bronze pour le mémorial Légaux.
Les
techniciens de Guise, vinrent mettre au point
les détails le 5 avril 1948 accompagnés de l’architecte Delval et du
sculpteur Dubie.
Les
monuments furent élevés par souscription locale et grâce à la générosité des
usines Godin. Ils furent inaugurés le 13 juin 1948
Le second monument à
la gloire d’André Boussart
[1] Dineur Jean-Baptiste (fils Adrien et
Boussart Marie-Joseph), ° Binche 14-10-1748, x Binche 8-1-1781, Fagnart
Anne-Florence.
[2] Boussart Caroline, ° Binche 12-12-1808, † Bruges 2-12-1891 x Mons 1827, Popp
van Schaalkwijk Philippe-Christian, ° Utrecht 1805, † Bruges 3-3-1879,
ingénieur cartographe
[3] ELLER,
A propos d’un mémorial A. Boussart,
dans le Journal « L’Opinion
publique » n° 46, du 16-9-1938.
[4]
Lettre de P.C. Meurisse à la Commission des Monuments et Sites, en date du
25-11-1936
[5] Légaux
René-Charles-Antoine-Ghislain, ° Binche 28-9-1897, † au camp de Neuengamme ...-1-1945
[6] A.V.B. 6920. Compte-rendu
des séances du comité pour la commémoration du général André Boussart
[7] Compte-rendu de séance du comité non daté
[8] A.V.B. 6920,
lettre du comité à M. H. Cassier-Popp, de Bruxelles, en date du 2-1-1936.
[9] A.V.B. 6920, lettre de P.C. Meurisse à R.
Légaux, en date du 27-12-1936.
[10] Séance du 2 juin 1937, tenue au café Monico.
[11] Après la guerre 1914-1918, Julien de
la Palud, descendant des Boussart offrit à la Bibliothèque Royale de Bruxelles
un médaillon en plâtre reproduisant les traits du général (Médaillon
actuellement déposé au musée de l’armée). C’est d’après cette pièce que Victor
Demanet réalisa l’effigie du général)
[12] A.V.B. 6921. Lettre de R. Légaux au bourgmestre
Derbaix en date du 20-7-1938.
[13] Idem.
[14] A.V.B. 6920 et 6921. Correspondances
[15] P.-C. MEURICE, Plaidoyer en faveur des monuments A. Boussart et R. Légaux, Binche,
1948.
[16] Edmond Dubie, né à Mesvin en 1907,
est un sculpteur, spécialiste en portrait-buste et excellent dessinateur (Dictionnaire biographique des artistes
belges de 1830 à 1970, Ed. Arto, Bruxelles, 1978).
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