ET DU REMPART SAINT-GEORGES
DU XIXe s.
Alain GRAUX
La ville de Binche, à l’étendue
limitée par son enceinte médiévale est ceinte de ses faubourgs qui n’excédaient les murs de la ville que de
quelques centaines de mètres. Au XVIIIe siècle, le plan de cabinet du comte de
Ferraris illustre très bien le paysage quasiment vierge au delà des murs de la ville, offrant
des aspects bucoliques. Cette
ceinture verte, est composée de vergers, houblonnières et prairies.
C’est principalement au delà de
la porte Saint-Paul que plusieurs branches d’industries s’implantèrent.
Nous examinerons les lieux en commençant
par l’extrémité méridionale des remparts, à proximité de la tour sur Roc
formant le coin du parc communal, de hauts murs cachaient les jardins en
contrebas du rempart, ils seront détruits lors du dégagement de l’enceinte. Un
chemin étroit et pierreux serpentait entre ces murs et la rivière la Samme qui
longeait les fortifications. A cet
endroit s’étendait « el Blanchirie », blanchisserie de toiles
appartenant à la famille Huart[1]. En
1848, la veuve Huart[2]
s’opposa à l’installation d’une machine à vapeur dans la brasserie Pourbaix [3] (voir
infra) craignant le manque d’eau pour ses équipements en temps de sécheresse.
L'ingénieur du service des mines du district de Charleroi, Jochamps, ayant
ouvert une enquête et effectué un rapport au gouverneur du Hainaut le
7-10-1848, prouva qu'il n'en était rien car la pompe d'alimentation de la
chaudière prenait ses eaux dans un puit creusé dans la cour de la brasserie[4]. La
blanchisseuse s’inquiétait aussi des retombées de la cheminée de l’usine qui
pourraient ternir les linges étendus sur le curoir[5].
La topographie de l’endroit ne changea guère si ce n’est
en 1888, la suppression de la ruelle de la Blanchisserie[6]
appelée aussi ruelle de Bonne-Espérance.
Découvrons succinctement l’histoire de la brasserie :
Le 26-10-1836, André Joseph Pourbaix[7], demande l'autorisation d'établir une
brasserie sur une partie de terrain qu'il a acquis de la ville de Binche,
Faubourg Saint-Paul, tenant à la rivière "la Samme", au chemin du
boulevard assez près de la blanchisserie de la dame Vve. Huart. Il y eut une
enquête commodo-incommodo le 22-11-1836. La demande fut accueillie
favorablement pourvu que la cheminée de la machine à vapeur ne s'élève à plus
de 11 m .
du sol [8].
Suite à l'arrêté royal du 1-4-1842 qui énonce que les
propriétaires d'usines doivent empierrer les abords de leur établissement,
André Pourbaix proposa le 2-9-1842 de faire paver à ses frais les cent mètres
de rue longeant la brasserie qu'il vient de faire construire, la ville lui
fournirait les pavés, il fournirait le sable et la main d'œuvre [9].
En 1845, André Pourbaix fit paver le sol de la rivière qui
passait dans sa propriété, aussitôt des oppositions affluèrent: Mr de Haussy,
propriétaire du moulin situé an aval (voir infra) estimait que ce pavement
aurait pour effet de faire refluer l'eau sur la rue. Le commissaire voyer R.
Pâris écrit au bourgmestre de Binche le 26-9-1845:
" ..J'ai été appelé par Mr Fayt et Mr Gaillard à
constater le mauvais état de la rivière qui coule le long de la blanchisserie
Mme Huart. J'ai reconnu nécessaire la suppression d'un pavement qu'exécute en
ce moment Mr Pourbaix-Seghin sur le sol de la rivière qui passe dans sa
brasserie, lequel pavement se trouve immédiatement en aval de la butte servant
à la prise d'eau qui alimente la blanchisserie de la veuve Huart .." [10].
En 1848, André Pourbaix,
demande l'autorisation d'établir un moulin à vapeur de 12 cv. alimenté par la
houille et destiné à l'usage d'un moulin à blé, sur la parcelle section C 65
d'une propriété lui appartenant tenant à la Samme, au chemin du boulevard, à
celui de la ruelle à Mourdreux et à Mr François Paradis. Le conseil communal
s'opposa à la demande le 14-8-1848, arguant que cette parcelle n'est distante
que de 20 m .
du parc qui souffrirait considérablement par la fumée des machines à vapeur [11]. Le
21-10-1848 la Députation de la province de Hainaut appuyant l'Administration
communale, refusa l'installation fondant son refus sur ce que la machine du
Sieur Pourbaix nuirait notablement à une blanchisserie.
Le faubourg Saint-Paul et ses cheminées
d’usines : à gauche la cheminée de la brasserie Pourbaix,suivie de la
malterie, plus loin la cheminée de la tannerie Brichot, à sa droite celle du
moulin de Haussy.
André Pourbaix construisit quand même le bâtiment pour
la chaudière. Le Collège des bourgmestre et échevins du 17-8-1848 signale le
fait à la Députation permanente du Hainaut:
"..que les bâtiments pour placer la machine à
vapeur sont en partie construits au mépris des lois et des autorités".
Le brasseur se démena contre les autorités communales et provinciales, il
possédait un droit de recours auprès du ministre des Travaux publics. Une
contre expertise eut lieu, l'ingénieur des mines qui en fut chargé raille les
voisins opposants "..entre autre le Sieur Monnier qui avait déclaré que
la poussière faisait mourir son cerisier. Le jardin de Mr Monnier est recouvert
dans toutes ses parties d'une végétation vraiment remarquable et, quant au
cerisier qui se meurt, je crois qu'il serait plus exact de dire que c'est sa greffe qui a éprouvé ce malheur
soit parce qu'elle a mal été faite soit parce qu'elle est étouffée par de
vigoureux saules, et non par son pied qui était plein de vie" [12]. Il
obtint par arrêté royal, une autorisation provisoire pour un an à partir du
21-10-1848, à condition que la cheminée de la machine à vapeur doive être
construite en briques et avoir une hauteur de 30 m . pourvue à sa base d'un
pavillon[13]. La chaudière fut
construite par les Ets. Ignace Duez à Jemappes [14].
Le 15 août 1850 suite aux pluies torrentielles qui
tombèrent sur tout le pays, la rivière la Samme déborda et inonda la brasserie
dont certains bâtiments s'écroulèrent. Les caves renfermant plus de mille
tonneaux furent envahies par les eaux. Le brasseur Victorien Pourbaix-Dulière
(il n'est pas parent avec André Pourbaix) mit sa brasserie à la disposition de
son confrère dans le besoin[15].
En octobre 1850, le brasseur demande l'autorisation au
gouverneur du Hainaut d'effectuer une dérivation des eaux de la Samme afin de
pouvoir exploiter plus facilement sa brasserie, il s'explique:
"Le soussigné,
industriel à Binche, a l'honneur de venir vous exposer qu'il serait infiniment
utile tant pour lui que pour les propriétés en amont, de pouvoir conserver en
même temps que la rivière actuelle, la
dérivation des eaux face à son habitation. Il serait évident, Monsieur le
gouverneur qu'ainsi dans le cas où le pont sous ses bâtiments ne pourrait
prendre les eaux de la rivière, cette dérivation pourrait empêcher l'inondation
des terres situées depuis les arches du moulin Mr de Haussy jusqu'à son usine.
Par ce moyen on préviendrait aussi le retour de la catastrophe récente qui a
entrainé la ruine de la brasserie du soussigné.
Le soussigné pense ce travail d'autant plus nécessaire
que depuis la mise en culture d'une certaine étendue du bois Lecomte et depuis
l'établissement de la route de Merbes, il descend continuellement plus d'eau
dans la rivière de Binche. Il s'engagerait à faire à ses frais ce
travail.."
De même il écrit à la Ville pour obtenir l'autorisation de
faire cette dérivation " près de sa propriété cadastrée 63bis, 64,
64bis, 65. au moyen d'un acqueduc en maçonnerie établi sur la voie publique du
chemin dit du Boulevard Saint-Paul à la ruelle à Mourdreux"
L'autorisation fut refusée parce qu'elle était jugée
préjudiciable à la prise d'eau du Sieur Huart, car la prise d'eau est en aval
et de plus elle mettrait à découvert le tuyau de plomb servant à l'alimentation
des fontaines publiques de la ville sur tout le long de cette dérivation, mais
aussi qu'elle devrait avoir lieu sur la propriété communale en dessous du
chemin des Boulevards de la porte Saint-Paul à la ruelle à Mourdreux
Comme on le voit ce brasseur entreprenant fut souvent en
conflit avec ses voisins et en butte aux tracasseries de la Ville, qui ne lui
était pas trop favorable. A son décès, en 1865, Désiré Joseph[16], son
fils lui succéda. Il continuera l'exploitation de la brasserie jusqu'en 1870.
Le 1-2-1867, il veut agrandir son usine en achetant à la
Ville de Binche une parcelle d'1
a . 27 ca. [17], Le
13-5-1868 il sollicite l'autorisation d'établir une chaudière à vapeur de 6 cv.
pour le service de sa brasserie. Il y
fut autorisé le 16-5-1868 [18]. La
chaudière fut construite par les Ets. Coffin, Chaussée de Mons à Cureghem.
Mais les projets d’agrandissements de Désiré Pourbaix
furent contrariés par son divorce survenu en 1869 ; nous reviendrons sur
ce personnage un peu plus loin.
Le 10-4-1871, Jules Paternotte[19]
négociant à Buvrinnes, acheta la brasserie de Désiré Pourbaix, pour la somme de
50.000 fr. pour les immeubles et 6.900 fr. les meubles. L'acte est rédigé comme
suit:
Une maison, brasserie, appendances et dépendances,
compris le vide intérieur d'une ancienne tour, une cantine, une écurie, le tout
contigu, cadastrés C 64 bis, 63 bis b, 63 bis c. tenant au chemin de Binche à
Bonne-Espérance, audit Pourbaix par le couloir du jardin tenant à sa malterie,
à la Ville de Binche et au chemin de ronde appelé "la Succursale".
Tous les biens sont vendus avec les mécanismes, y compris
les accessoires, meubles attachés à la brasserie et servant à son exploitation
sans excepter ni réserver autres que les camions, chariots, charrettes, roue
enfer et excentrique, tombereau, bascules, 2 petits robinets en cuivre, lit
domestique, ventilateur ou diable, porte à deux ouvrants. Sur le grenier:
harnais, 2 cruches en grès.
Ces biens avaient été attribués au vendeur par acte de
partage passé devant le notaire Fontaine le 29-7-1866. L 'acheteur jouit de
suite de la brasserie, dépendances et d’une partie de la maison, l'autre partie
fut disponible 15 mai suivant [20].
Face à la brasserie de André Seghin, son beau-fils, Eugène
Lengrand [21], employé au chemin de fer
du Centre, fit ériger un moulin à farine à vapeur. On retrouve cette usine sur
le plan Popp vers 1867, cadastré 61f .
et faisant 3 a
70 ca. La maison contiguë est cadastrée 61k, fait 5 a . 49 ca. La matrice du plan
le cite propriétaire.
Jules Paternotte qui acheta la brasserie de Désiré
Pourbaix, acheta aussi le moulin à farine de sa sœur, il créa ainsi une
brasserie-malterie importante nommée "Brasserie, malterie
Saint-Paul".
L'entreprise reçut en 1897, la médaille d'or de
l'exposition universelle. L'en-tête de la brasserie malterie renseignait que
l'on produisait du malt indigène, de la levure pressée ou liquide, et que l'on
vendait en plus de la production, des bières du pays, des bières étrangères:
Stout et Pale-ale. Il fit bâtir une magnifique maison de maître[22]
entourée d’un parc d’agrément.
Désiré-Jh. Pourbaix
continua ses activités dans la malterie juxtaposée à son ancienne
brasserie
Il vendit la malterie le 27-7-1876, sur l’acte de vente il
est nommé "ci-devant fabricant de malt à Binch actuellement brasseur à
Mignault"
La
rue Saint-Paul telle qu’elle apparaissait encore au début du XXe s. Au fond pignon de la malterie Roulez, suivent les
maisons ouvrières de Philippe Jamez. A gauche, l’ancienne corroierie Brichot.
La malterie comprend, outre ses dépendances, 1100 m . de germoirs et
caves, 2 bacs, 2 tourailles à double plateau avec de grands aspirateurs, une
écurie pour 5 chevaux, des remises pour voitures, etc.
Deux maisons d'habitation...le tout bâti sur 1ha. 16a.
15 ca. et jardins, section C 68a, 68b, 69, 70, tenant au parc de Binche, à la
rue et à Jamez.
La malterie fut adjugée pour la somme de 30.000 fr. à la
"S.A. Banque de Gilly" ayant son siège dans cette commune[23]. Cette
banque ne l’acheta que pour en faire une
transaction commerciale profitable
Ce fut Rodolphe Roulez [24]qui
racheta l’usine, celle-ci continua son activité jusqu’en 1930, date où elle fut
incendiée.
L’importante propriété qui se trouvait entre la fausse
rivière et la rue du
faubourg Saint-Paul appartenait à Jean-Baptiste[25]
Brichot, c’était une tannerie qui lui
revenait par succession de son père. En 1847, il fit reconstruire la tannerie
familiale[26] et transforma la tannerie en corroierie, il la
géra jusqu’en 1879, mais il avait déjà quitté Binche en avril 1871. Elle passe
ensuite aux mains de Eugène Roulez-Roucloux, marchand de grains qui continua
l’activité de corroierie jusqu’en 1884[27]. Le
14-8-1878, ce dernier demanda l’autorisation de bâtir sur le terrain situé
entre le moulin de Haussy et la propriété qu’il venait d’acheter à la veuve
Brichot. Le Conseil communal décida « Attendu que la propriété de ce
coin de terrain est contestée par les
héritiers de Haussy et que ce terrain non bâti, en face d’une rue fréquentée,
offre un très vilain coup d’œil et ne sert qu’à laisser croupir l’ eau qui
exhale une odeur très malsaine…autorise le Sieur Roulez à construire sur ce
terrain, conformément à nos indications, et ne lui cédons que les droits que
nous pouvons avoir sur cette propriété.. »[28]. Le
15-5-1884, une demande d’alignement est effectuée par le malteur pour dix
maisons qu’il se propose de faire construire. La demande fut approuvée le
20-5-1884 [29].
Le bief de dérivation de la rivière la Samme appelé
« fausse rivière » (voir supra) commençait au bout d’un étang de
retenue d’eau qui se situait à proximité de la porte Saint-Paul, il rejoignait
la rivière plus loin au lieu-dit Pont d’Arcole situé entre le moulin à
vapeur Lengrand et la brasserie Pourbaix. Ce bras de rivière alimentait le
moulin Saint-Paul et la tannerie
Brichot.
Le moulin Saint-Paul dont
l’origine remonte à la naissance de la ville[30]
fait partie intégrante du décor. Le
20-7-1844, l’avocat de Haussy [31]
demanda l’autorisation d’établir, dans le moulin à farine qui lui appartient[32], une machine à vapeur faisant tourner trois
tournants qu’il a fait construire à neuf en 1843. Cette machine devait suppléer
dans les temps de sécheresse à l’insuffisance de la force motrice du cours
d’eau. Le 20-3-1845 il y annexa une paire de meules destinées au meulage des
écorces à tan qui seraient mises en mouvement par l’excédent du four de la
machine à vapeur.
Le Conseil communal du 22-3-1869,
prit des décision visant à supprimer le barrage qui entravait l’écoulement des
eaux de la Samme, suite à l’arrêt de l’usine, les eaux ne passaient plus par le
bief de décharge, ce qui rendait les lieux insalubres [33].
Le 8-3-1879, les héritiers de
Haussy vendirent pour 7.500 fr. à François Sebille-Pollet [34]
« un moulin à eau et dépendances, sis à Binche près de la porte
Saint-Paul, avec une maison, résultant de l’action de l’huissier Gaillard, de
Binche, du 30-7-1843 » [35].
François Sebille possédait aussi
une tannerie [36] qu’il avait héritée de son père[37] et
qui était alimentée par les eaux de la Samme arrivant du pont barrage de
Saint-Paul au bas duquel un second étang de retenue régulait les eaux de
l’usine et qui continuait son cours vers le moulin Lengrand et ensuite vers la
brasserie Pourbaix.
Contre l’étang, en dessous du
pont Saint-Paul, se situait la tannerie[38]
Victor Ghislain-Dubois[39] à qui succédera Isidore Dubois qui
travaillait déjà de son métier à proximité[40].
Cette exploitation était juxtaposée à celle de la famille Hupin, ce fut d’abord
Antoine Hupin qui y travailla et ensuite vers 1880, son fils Charles aidé de
ses sœurs.
La vue des remparts était
complètement occultée par une série de maisons ouvrières qui furent bâties
entre 1830 et 1860 l’initiative du tanneur Jamez [41].
La
porte Saint-Paul fut démolie en 1837, le Conseil communal avait décidé:
« Attendu que la porte Saint-Paul est trop étroite et
peu élevée pour servir à une grande route et que le portique se compose d’une
certaine quantité de grès qui étant façonnés seront propres au pavage de la
dite traverse.
Attendu
que la dite porte est dans un état voisin de la vétusté, arrête ce qui
suit :
La porte
Saint-Paul sera démolie afin de donner plus de développement à la route de
Binche à Merbes-le Château… »[42]
Cette décision fut adoptée contre
l’avis du conseiller Derbaix, n’étant pas assez éclairé sur la nécessité de
démolir la porte Saint-Paul. Au vu de la gravure représentant la porte
Saint-Paul vers 1825[43], on
reconnaît que c’était une
mesure propre à tirer de l’isolement ce quartier industriel.
La courbe
de la rue Saint-Paul qui s’amorçait à partir de la ruelle du Pont de Bois
disparut en fonction du plan d’aménagement des rues aboutissant à la Station du
chemin de fer présenté par l'architecte provincial le 9-4-1864, un nouvel
alignement remplace l’ancien chemin venant de la porte Saint-Paul et menant à
Buvrinnes et Sart-la Buissière. Cette rue est tirée en ligne droite jusqu’à rue
Neuve de la Station créée alors. De nombreuses maisons sont construites suivant
ce nouvel alignement. Le 6-5-1877, Alfred Pourbaix, banquier, demande de lui
concéder l’entreprise de l’élargissement du pont du Faubourg Saint-Paul afin
qu’il puisse arranger la propriété riveraine qu’il a acheté à Mme Soete et à M.
Romain Rodebach [44]. Aucune décision ne fut
prise.
En août 1884, le conseil
communal décida l’élargissement le pont Saint-Paul :
« Vu les plans
estimatifs et cahiers de charges des travaux d’élargissement du pont du
Faubourg Saint-Paul, attendu que le devis estimatif des travaux pour une
construction en fer s’élève à 7.181 fr. et celle en brique à 4.661 fr., décide
d’approuver la construction en maçonnerie »[45]
Les travaux sont adjugés à
Emmanuel Houssière, Alexis Delsame et Julien Courte pour la somme de 3.850 fr.[46]
Le 16-10-1884, Adrien
Pollet écrit au Collège échevinal :
« En présence des
travaux que la Ville fait exécuter rue Saint-Paul, je vous rappelle la
convention verbale passée entre moi et le feu le bourgmestre Wanderpepen, aux
termes de laquelle la Ville s’engage à ne prendre sur l’ancien bief que le
terrain nécessaire à l’élargissement du pont, l’alignement de la rue Saint-Paul
et le prolongement de la rue Saint-Georges jusqu’à la dite rue
Saint-Paul ; à me céder gratuitement l’excédent du bief et une petite
partie de terrain inutile à la voie publique se trouvant derrière l’ancien
moulin et à me faire un aqueduc jusqu’au dit moulin.
Il est entendu qu’en
ratifiant cette convention, l’administration communale ne me reconnaît aucun
droit à réclamer soit à la Ville, soit à n’importe quel particulier, des
indemnités relativement au moulin appartenant ci-devant à M. de Haussy…Veuillez
me faire savoir si nous sommes bien d’accord sur tous ces points.. »[47]
En 1889, M . Pollet fit
recouvrir par un aqueduc le bief de la Samme près de son usine, bien qu’il n’en
ait pas reçu l’autorisation. En novembre 1887 Jules Paternotte avait fait la
même demande afin de voûter une partie de la rivière Princesse [48]
En juillet 1885, Lion
Desale fait approprier trois maisons partant de l’aile du pont jusqu’à la
maison Fourmanois[49].
Le 25-8-1885, il demandait
l’autorisation de clôturer sa propriété par un mur longeant la rivière, Il y
fut autorisé le 11-9-1885.
La veuve Sebille-Pollet,
demanda, elle aussi, l’autorisation de reconstruire la chapelle Notre-Dame de
Tongres, rue Saint-Paul, sur le terrain qui lui appartient près de la rivière,
contre le mur du parapet du pont. Elle y est autorisée le 27-5-1886. Le
tailleur Auguste Dessart-Richard fait démolir une maison pour la reconstruire
dans l’alignement en février 1887, il en fait bâtir une autre en mars 1888,
bref petit à petit la rue prend son aspect actuel.
Suite à la décision de
supprimer la fausse rivière en 1869, le bras de l’étang supérieur qui
s’étendait le long de la rue Saint-Paul était devenu inutile, aussi l’étang
n’avait-il plus la même importance qu’auparavant, la rivière fut canalisée en
supprimant l’étang, à son emplacement de nouveaux bâtiments servant d’école
communale pour filles furent aménagés en 1894. L’école était installée
auparavant dans les locaux de l’ancien couvent des Récollets, et ce, depuis 1879.
Le 1-6-1874, messieurs Daneau et Labrique demandent l’autorisation
de bâtir dans l’impasse Blaivie[52]
située à proximité du quartier de l’Inquiétude. Ils n’y sont autorisés qu’à
condition de donner à cette impasse une largeur de 6 mètres et de bâtir en
adoptant le nivellement de la nouvelle rue[53].
Le
Conseil communal du 5-10-1874, vu le plan, dressé par l’architecte
Mahieu, de la ruelle Blaivie reliant le
quartier de l’Inquiétude au faubourg Saint-Paul, approuve ce plan et décide de
traiter avec M. Pennart pour l’acquisition ou la cession gratuite du terrain
nécessaire à l’ouverture de cette rue [54]. En date du 20-10-1874 M . Pennart consent à vendre le terrain à prendre dans sa propriété (2a 90
ca.) dont 50 ca seront rachetés par M. Daneau, pour l’établissement de la rue
reliant le quartier de l’Inquiétude au faubourg Saint-Paul, à raison de 125 fr.
l’hectare.
Dans ces conditions l’établissement de cette partie de la
rue qui aurait 75 m .
de long coûterait 8.025 fr. env., soit :
-Terrain (20,46 ca, à 125 fr./ha) : 3075 Fr.
- 75 m .
de pavage 1800
Fr.
- Trottoirs, 150
m de pavage 900 Fr.
- Trottoirs, 150
m . de bordures
750 Fr.
- Distribution d’eau, 75 m de tuyaux 750 Fr.
- égouts, 75
m . 750 Fr.
Total 8025
Fr. [55]
La continuation de la rue
Saint-Georges ne se fit pas immédiatement.
An 1877, Auguste Daneau-Navez,
négociant, demande l’autorisation de faire démolir de suite la partie du rempart qui fait
saillie sur la voie publique afin de lui permettre la construction de deux
maisons, offrant de permettre d’étendre les terres et décombres dans les cours
de ces maisons afin d’éviter les voiturages. La ville lui permet d’abattre le
rempart et lui accorde même la somme de 200 fr. pour ces travaux[56]. Le
1-9-1887, Il demande encore l’autorisation d’y construire huit maisons [57]
Le 13-10-1896 Conseil communal considère
que pour achever le prolongement de la rue St.-Georges, il est nécessaire
d’acquérir un jardin bordé par la rivière La Samme, cadastre C. 92b. et 111b.
faisant 14 a .
60 ca à Mme Julie Williams, épouse Edouard Carlier et Mme Marie Williams,
épouse Joseph Squilbin.[58]. Le
passage ne fut réalisé qu’en …1928, il devint un square et berceau de la
société de tir à l’arc « la Gaieté ».
Conclusion
Comme on a pu le constater, la rivière la Samme fut le
fil conducteur de l’évolution des diverses exploitations qui s’implantèrent
dans le faubourg Saint-Paul, qui était un quartier essentiellement industriel,
telles que la blanchisserie, la brasserie, la tannerie, la corroierie, la
meunerie, etc.
Actuellement, la rivière détournée, ne ceinture plus
la ville, toutes ces industries sont généralement disparues ne laissant que
l’habitat ouvrier qu’elles générèrent.
[1] Blanchisserie de toiles
créée par Jean-Antoine Huart, ° Binche 17-7-1732, y † 17 pluviôse an XIII
(6-2-1805), x Petre Marie-Françoise, ° Ecaussines 1738, † Binche 29-6-1808.
[2] Huart
Marie-Catherine-Joseph, ° Binche 11-4-1774, y † 11-8-1855, veuve de
Ferdinand-Joseph Huart, ° Mons 1775, † Binche 17-9-1832.
[3] A.V.B. 01-01-09-968.
[4] A.V.B. 01-04-09-968.
[7] Pourbaix André Joseph, ° Solre-sur-Sambre 18-4-1807, †
Binche 14-8-1865, x Binche 8-11-1826, Seghin Cécile, ° Binche 8-2-1806, y †
24-5-1865.
[8] A.V.B. 01-00-01-10
cote 472.
[9] A.V.B.
01-04-09-1038.
[11] A.V.B. 01-00-01-10
/933.
[12] A.G.R. Mines, 1ère IGM 106, décembre 1849.
[13] A.V.B.
01-04-09-698.
[14] A.V.B.
01-04-09-1038.
[15] Journal "l'Education populaire" du
9-2-1899.
[16] Pourbaix Désiré-Jh., ° Binche 4-10-1833, y †
9-10-1878, x 1°- Anderlues 8-8-1853, Ponselet Florence-Octavie, ° Anderlues
17-2-1833, † Binche 1875, Divorce 28-12-1869. x 2°- Binche 28-12-1870, Navir
Désirée, ° Binche 22-2-1850, y † 21-8-1879, servante, cabaretière.
[17] A.V.B. 5442.
[18] A.V.B.
01-04-09-976.
[19] Paternotte Jules, ° Buvrinnes le 22-6-1845, † Binche
8-7-1911, x Laitem Marie Céline, ° Stambruge 1-6-1851, † Binche 1889. Il
possédait tout un réseau de débits de boissons pour écouler sa production.
Jules Paternotte mena
beaucoup d'activités au cours de sa vie. Il fut membre fondateur de
l'Association des brasseurs du Hainaut, membre de la Fédération des brasseurs
belges et du Cercle brassicole du Centre, il en était le vice-président.
Administrateur des verreries de Binche (voir notre article sur les
verreries, bull. S.A.A.M.B.-avril
1991). Commissaire des forges et laminoirs de Baume à Haine-Saint-Pierre. Il
était un membre actif du parti Libéral et soutenait la Société royale des
Chasseurs.
[20] A.E.M. Enr. A.C.P. 159.
[21] Lengrand Eugène Pierre Auguste, ° Hornu 10-3-1830, †
Binche 6-1-1872, x Binche l6-3-1860, Pourbaix Louise Cécile-Thérèse, ° Binche
25-3-1829. Cette dernière quitta Binche pour Saint-Josse-ten-Noode en 1887.
[22] Actuellement académie de musique.
[23] A.E.M. Enr. A.C.P. 178.
[24] Roulez Rodolphe-Oscar, ° Binche 4-3-1859.
[25] Brichot Antoine-Jean-baptiste-Guillaume, ° Binche
29-1-1840
[26] La tannerie proprement dite était cadastrée C. 72. Elle
longeait la fausse rivière qui servait à l’usine. La vaste maison avec
magasins, cadastrée C. 74a, était à front de rue, une série de 14
maisons ouvrières la remplace actuellement.
[27] GRAUX A. Binche et l’industrie du cuir, dans Les
Cahiers Binchois, n°11, 1993, p.25
[28] A.V.B.
01-00-01-18./ 3771.
[29] A.V.B. 01-00-02-17/
8660.
[30] GRAUX A., Binche, des métiers et des hommes, [la
meunerie]dans Les Cahiers Binchois, n°16-1998,
pp.12-38.
[31] de Haussy François-Philippe-Louis-Hyacinthe, °
Fontaine-l’Evêque 1789, y † 1869, avocat, premier gouverneur de la banque
nationale de Belgique, industriel, membre du Congrès national, puis du sénat.
Il fut ministre de la justice en 1847.
[32] Bâtiment établi sur la parcelle cadastrée C. 56a
se trouvant à front de la rue et
longeant la fausse rivière qui commençait au bout de l’étang de retenue qui se
situait de l’autre côté de la rue et qui rejoignait la rivière la Samme plus
loin au lieu-dit Pont d’Arcole.
[33] A.V.B.
01-00-01-15.
[34] Sebille François-Jean-Baptiste, ° Binche 6-5-1834, y
† 3-2-1886, x Pollet Célinie, ° Estinnes-au-Mont 28-11-1834
[35] GRAUX A., Binche des métiers…o.cit, pp.19-20.
[36] Bâtiment cadastré C.54, longeant la rivière,
actuellement chemin de la Gargotte établi sur le lit de la rivière.
[37] Sebille Jean-Baptiste, ° Binche 24-3-1802, y †
5-11-1867, x Binche 17-4-1833, Bourgeois Adèle-Joséphine.
[38] Tannerie cadastrée C 44c
[39] Ghislain
Victor-Gustave, ° Thieusies 22-8-1822, † Binche 14-2-1857, x Binche 15-8-1844,
Dubois Augustine-Victoire, ° Binche 22-10-1828, marchande, partie habiter
Valencienne en 1853.
[40] Bâtiments cadastrés 44, 45 et44q.
[41] Jamez Philippe-Jh., † Binche 4-7-1884, x Binche
22-11-1848, Leclercq Valentine-Eugénie.
[43] Dessin du général de Howen , lithographie de Madou,
extrait de Voyage pittoresque dans le royaume des Pays-Bas, dédié à S.A.I.
et R. Madame la princesse d’Orange,
rédigé par de Cloet, Bruxelles, de l’imprimerie lithographique et typographique
de J.B.A. Jobard, 1ère éd. De 1825, t. II, pl. 142. Voir supra.
Bruxelles,
Bibliothèque royale Albert Ier, Cabinet des estampes, S.III 21065.
[47] A.V.B.
01-00-01-19./4626 Conseil communal du 23-12-1884.
[49] Coin formant
l’hôtel des Remparts, actuellement abandonné.
[50] Mahieu Emile, °
Peruwelz 14-12-1845,† Bruxelles 4-6-1895, x 1°- Flore Elise-Marie-Pélagie, °
Estinnes-au-Val 16-8-1845, † Binche 27-5-1873 ; x 2°- Lebrun
Ermance-Françoise-Philippine, ° Binche 3-2-1852.
[51] Architecte provincial, il n’habitait pas Binche.
[52] Actuelle rue
Saint-Georges
[53] A.V.B.
01-00-01-17/3096.
[54] A.V.B.
01-00-01-17/3179
[55] A.V.B.
01-00-01-17.
[57] A.V.B.
01-00-02-17.
[58] A.V.B. 01-00-01-21
Cher Alain, pouvez-vous regarder mes publications et mes déductions sur mon compte FB au départ du plan Popp sur 1 - le tracé de la rue de Robiano et 2 - l'endroit de la brasserie côté rempart au Pont d'Arcole qui doit être ce qu'une photo de cet article prend pour un jardin à la suite de la démolition de la brasserie pour être reconstruite avec une malterie à l'endroit actuel, vierge sur le plan. Mes explications aussi sur le fait que la "blanchirie" ait été rasée, le lit de la rivière déplacé, après l'édition du plan pour permettre de faire une liaison carrossable entre les fbg St Paul et du Posty. Déductions faites en inspectant la situation sur le plan Popp qui je crois, au vu de votre présent article, aurait été publié plus précisément en 1867, année où le terrain encore vierge pour agrandir la brasserie est acquis, la fausse rivière supprimée par la suite.
RépondreSupprimerMerci pour vos publications toujours très intéressantes qui, notamment celle-ci, m'ont permis ces déductions en inspectant le plan Popp. Bien à vous, continuez à nous intéresser, merci.