vendredi 27 avril 2018

Le folklore des cordonniers de Binche


LE FOLKLORE DES CORDONNIERS DE BINCHE 

Les cordonniers fêtent saint Crépin et saint Crépinien, martyrs soissonnais du troisième siècle. On raconte que Romains, ils étaient venus en Gaule pour y répandre la foi tout en exerçant le métier de cordonnier. Ils subirent le supplice du chevalet; suspendus à un instrument de torture, on détacha de leurs flancs de larges bandes de peau. Des poinçons ou des alênes leur furent enfoncés dans le corps[1].
La Révolution française supprima corporations et confréries religieuses, néanmoins l'antique usage de se réunir lors des fêtes des saints patrons continua.



                                          Saint Crépin                                  Saint Crépinien
                        Statues de bois polychrome de la collégiale Saint-Ursmer, XVIIe s.

Sous le régime hollandais, des bals étaient donnés comme nous l'apprend ce texte:
"Sur la demande de plusieurs sociétés de cordonniers établies chez les sieurs Goffaux Maximilien, Lettelier Emmanuel, Leroy Philippe, Cussac Mathieu et Degrève Ursmer, cabaretiers tendant à obtenir la permission pour quelques bals les 25-26 et 28 octobre 1827.
Attendu qu'il est coutume chaque année à l'occasion de Saint CréPin, accordons la permission.
- de Biseau d'Hautteville, Bourgmestre » [2].
Avec le temps, d'habitude ne se perd pas comme en témoigne "Le Journal de Binche" du 28 octobre 1860 [3]:
"Le 25 courant au matin, de nombreux cortèges, musique en tête, circulaient dans la rue et se dirigeaient vers la paroisse où ils allaient assister à une messe solennelle. C'étaient les cordonniers qui célèbrent chaque année à Pareil jour, la fête de leur patron Saint Crépin. Cette fête a ici tout le caractère d'une fête publique et dure trois jours consécutifs. Chaque société, et elles sont nombreuses, donne deux banquets et deux bals ".
De ces fêtes vient l'expression: "il a chuchî tout m'Saint Crépin" (il m'a ruiné).

De nombreuses chansons se chantaient lors des banquets des sociétés :
Saint CréPin mon cousin
Les cordonniers sont prêts
Pour aller voir Kerpin
En pure et sans chemise
Ah les dragons, les dragons, les dragons,
Les dragons d'Espagne

Variante:
Saint Crepin mon cousin
Les cordonniers se frisent
Pour aller voir Saint Crepin
En pure et en chemise

Variante:
El d'jou d'Saint Crepin
Les cordonniers font fiete
Pou d'aller vir Saint Crepin m'cousin
In pure et in qu'miche
Ah les dragons, les dragons d'Espagne (3x)

Variante:
Saint Crepin mon cousin
Les cordonniers se frisent
Saint Crepin mon cousin Les cordonniers ont faim
Saint Hommebon rigodons
Les tailleurs ont du bon
A rigodons! [4] 
El cordonnie c'est stin bon mestie
Quant î plû, il est s"ta iiute
El cordonnie c'est s'in bon mestie
Quant î gèle, i n'a ni frou 
Amis les cordonniers
Aujourd'hui Plus d'alènes
Le cœur joyeux discret
Chantons sans perdre haleine
D'une commune voix
Chantons ce gai refrain
Vive notre patron
Notre bon Saint Crepin

Comptine:
Mon Père est cordonnier Ma mère est demoiselle
On tire la ficelle 
Variante :
Mon père est cordonnier
Ma mère est demoiselle
Tire la ficelle

Bonjour Madame, ou allez vous comme ça!
Bon cordonnier, je m'en vais promener
Hélas, Madame, vous usez vos souliers
Bon cordonnier vous les raccommoderez [5]

Cette autre chanson fut publiée dans "Le Binchois" vers 1929.
Ma mère, ma bonne mère
Si je viens à tomber
Un terme militaire
sera vite écoulé
Ma mère, ma bonne mère
Ne vends pas ta chaumière
Je serai militaire

Je n’suis qu’un ouvrier
Vive notre patron
Notre bon Saint Crépin
Ma mère ma bonne mère
Je t’ai déjà dit
Les jambes sont bien faites
Et les jolis mollets
Qu’on voit dans notre métier
Mais il faut être discret


[1] J.J. HEIWEGH et J.-L. VAN BELLE, "Les saints patrons des métiers en Wallonie", Braine-Ie-Château, 1984, p.23.
[2] A.C.B. 01.00.02.4., conseils communaux art. 738 - 1827
[3] « Joumal de Binche » du 28.10.1860 1ère année n° 23.
[4] Ce qui veut dire que les cordonniers sont considérés comme des prolétaires en comparaison des tailleurs.
[5] Nous remercions Mme Hinnemans-Meurisse qui nous a transmis ces chansons apprises de Mr Hauy-Petit, ancien ouvrier cordonnier du grand-­père de René Légaux. Celui-ci en publia dans son "T'Avau Binche".

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