jeudi 6 avril 2017

Aussi vieille que la "Petite Bonne"

AUSSI VIEILLE QUE LA « PETITE BONNE »
                                                                                                                                   Fernand GRAUX

Lundi gras, la tradition qui consiste à faire « une sortie à la viole » par tous les temps, qu’il vente ou qu’il neige et l’on peut dire franchement : viole que viole ! La journée doit se faire et …on la fait avec un plaisir réel, mêlant d’un commun accord l’amusement à la joie de donner, en effet qui n’a pas arboré son bouquet de mimosa épinglé à la boutonnière, et la carte de soutien vendue au profit des œuvres des partis fixée au chapeau, tout cela fait partie du rituel en usage à Binche et l’on s’exécute de bonne grâce devant le sourire des jolies vendeuses bénévoles qui vous les proposent.
Et si le temps n’est pas tout à fait clément, les cœurs, eux, sont radieux et c’est sans vergogne que les crissements cadencés des semelles quelque peu gorgées d’eau montrent avec quel engouement rieur et avec les « hé, hé, hé » répétés qui animent les participants de cette sortie et les fait rire à gorges déployées.
Une mention spéciale doit être accordée aux brillants musiciens qui par leur bonne humeur et leur bonne volonté exécutaient d’entraînantes marches ou valses avec un brio étonnant aux coins de rues ou aux points d’arrêts des joyeuses bandes.
J’ai suivi cette année la viole du « Baraquie » comme on l’appelle. A ce propos saviez-vous que le « petite bonne », sa viole, est la seule qui reste sur les quelque trente que la ville de Binche s’enorgueillissait de posséder. Ces orgues de Barbarie se sont disséminées : vendues à des amateurs d’antiquités ou simplement détruites avec le temps, ainsi que le disait son actuel propriétaire ; on lui a offert récemment la modique somme de cent mille francs pour la sienne, tout simplement, il a refusé cette alléchante proposition…par amour…pour sa boîte de musique et surtout m’a-t-il dit , avec une petite larme à l’œil : « d’in l’fond es’qu’on est d’Binche waie ou bie non ? » « eyé si d’je l’vind, i n’arat pu d’viol vraimint Binchourde ».
Force « demis » ingurgités et réceptions aux petits verres chez certains mandataires ou sympathisants notoires ont fait que l’amusement était à son comble et…il fallut qu’une malencontreuse « drache » dispersa vers le treize heures les participants quelque eu frustrés de leur plaisir en rentrant chez eux, dare dare.
Belle journée en vérité malgré tout, l’après-midi apporta aux enfants costumés avec recherche leurs récompenses sous forme de médailles offertes avec prodigalité par les organisations de jeunesses à cette ribambelle d’enfants
La soirée fut agréable à suivre et le feu d’artifice du haut quartier qu’est la place Eugène Derbaix fut une apothéose appréciée de tous et la foule plus houleuse, ce me semble, que les autres années redescendit satisfaite, vers le bas de la ville, se promettant « de remettre çà » pour le lendemain mardi-gras
                                                                                                                                              février 1970

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