LE CHÄTEAU FEODAL D'EPINOIS
Alain GRAUX
INTRODUCTION
Au Xe siècle, un premier castrum est
cité à « Spinetum » sur des
terres appartenant à l'abbaye de Lobbes.
LE CHÂTEAU
C’est à cette époque, en 1590,
qu'est réalisée la
première vue connue du château. On y distingue clairement
l’imposante forteresse avec son donjon-porche, ses tours, douves et la basse-cour.
Quelques années plus tard, Epinois
et son château sont à nouveau reproduits dans les gouaches des albums de Croÿ.
La masse du donjon-porche dornine le dessin.
Représenté vers 1600 dans un album
du duc de Croÿ, important châtelet d'entrée du bas moyen âge, commandant une
enceinte probablement rectangulaire flanquée d'au moins une tour. Chatelet
disparu au début du XXe s.
Avec le retour de la paix dans nos
régions, les Le Boucq transforment, comme beaucoup d’autres seigneurs, la
vieille forteresse en un château de plaisance.
Les bâtiments forment un U ouvert
sur la campagne. Un
relevé des propriétés du comte datant de
1791/1793 nous montre le plan du château en utilisant quelques fondations
anciennes en moellons de grès.
De grandes fenêtres rythment les
façades, un escalier d’apparat est
construit à l'intérieur. Toutefois, une
touche médiévale est conservée en incorporant les tours, le
donjon-porche et les douves ainsi qu'une aile.
Actuellement, château en L, à deux
niveaux, flanqué à l'angle extérieur d'une tour qui a probablement succédé à
celle représentée dans l'album de Croÿ.
L’entrée du parc flanquée de piliers
de briques à refends, sommés de vases. Dans l'aile parallèle, double entrée en
plein cintre à encadrement à refends, entaillé d'une gorge et surmonté d'une
archivolte amortie. Cette aile comprend des boiseries Louis XIV à gauche.
De part et d'autre, une travée de
baies en briques sous arc surbaissé, celle à droite du rez-de-chaussée est ajoutée.
Vue du château vers 1903
En retour d'aile comprenant trois arcades
en cintre surbaissé avec clé saillante, l'une portant des armoiries et dans un
phylactère on lit l'inscription:
"1708 / LE CONTE / DESPINOY".
Arcades rétrécies et percées de fenêtres
à montants en matériaux alternés. A droite du rez-de-chaussée, il y a deux baies
tardives.
A l'étage, deux fenêtres en arc
surbaissé en briques et traces de deux autres murées.
A l’arrière, enfilades de baies, la
plupart remaniées au XIXe siècle ou récentes. Aile perpendiculaire portant la
date de 1708 par ancres.
Sur corbeaux de bois, bâtières à
croupes latérales couvertes d'ardoises, de tuiles et de roofing. Lucarnes à
croupe.
Tour ronde à deux niveaux éclairés
de baies de type tournaisien simplifié. Toiture polygonale en ardoises, sommée d'une
flèche[1].
LES SEIGNEURS FEODAUX
Les premiers
seigneurs d’Epinois, se ralliaient au cri de « Berlaimont » et
portaient un blason présentant un lion d’or ou d’argent, entouré de croix
potencées, d’or ou d’argent également, sur fond de gueule.
Au 13ème
siècle, la seigneurie d’Epinois s’unit à celle d’Houdeng par mariage.
NICOLAS DE
HOUDENG
Nicolas de
Houdeng, chevalier et seigneur d’Epinois, fut un personnage fort important. Ami
du Comte de Hainaut, Jean II d’Avesnes, il légua en 1309 aux magistrats de Mons
le vaste hôtel qu’il possédait en cette ville pour y créer un hospice
(hôpital).
Le 22 novembre
1292, le comte fui offrit deux accroissements de fief, l’un à Houdeng (fief de
Saint-Vaast), l’autre à Epinois (meilleur catel)[2].
Il est encore
cité seigneur d’Epinois les 1-8-1376 et 22-1-1378
Un de ses
descendants, Nicolas de Houdeng, sire d’Epinois, fut de 1354 à 1372, conseiller
de la Comtesse
Marguerite de Bavière.
En 1372, le
sire d’Epinois touchait une pension de 60 écus prélevée sur les impôts perçus
sur le domaine de Binche. Les seigneurs d’Houdeng et
d’Epinois tournoyaient au cri de « Chièvre »
La terre qui entoure Espinoy, a donné son nom à la famille
qui l’habite. Une dame d’Espinoy maria vers la fin du 11ème siècle un seigneur
d’Esclaibes,
JACQUES D’ESCLAIBES
Jacques d’Esclaibes, écuyer, tient
la terre d’Epinois en fief lige de la pairie de Beloeil par relief exécuté le
28 janvier 1503 (n.st.). Le domaine comprend le château, la seigneurie du lieu,
une partie de Leval et de Mont-Sainte-Aldegonde, les cens, rentes, fermages,
revenus en grains, mortemains, successions de serfs, bâtards, aubains, lois
amendes et forfaitures
JEAN D’ESCLAIBES
Le XVIème siècle se termine. Guerres
de religion, duc d’Albe et Gueux, iconoclastes,... Jean, seigneur d’Esclaibes
et d’Espinois à réussi (au prix de quelles soumissions, de quelles politiques)
à maintenir et enrichir son patrimoine.
Ses biens couvrent les territoires
de Leval, Trahegnies, Mont-Sainte-Aldegonde qu’il a repris à Philippe Marnix de
Sainte-Aldegonde[3].
CHARLES D’ESCLAIBES
A sa mort, n’ayant pas d’héritier
direct, c’est son bâtard, Charles, qui hérite de la seigneurie d’Espinoy. Mais
... Pierre de Zwerne, seigneur de Fosteau et cousin germain de Jean
d’Esclaibes, revendique la propriété de ces biens. Entretemps, guerres et
bandes de soldats errants, paysans affamés ont bien changé l’image du château,
où tout est en ruine et à l’abandon.
Suite à cette querelle de
succession, le bien contesté est attribué à la famille de Ligne, suzeraine du
fief qui devient propriétaire du domaine dont le château principal est à
Beloeil.
Ces Princes de ligne vont restaurer
le château, et le titre « d’Espinoy » qui restera dans la famille des
Ligne bien après qu’ils aient cédé les terres aux Le Boucq d’Espinoy, en 1689.
Lamoral de
Ligne
Lamoral de Ligne, prince d’Epinoy en
1592, souverain de Fagnoles, pair, sénéchal et maréchal de Hainaut, chevalier
de la Toison d’Or en 1599, prince de Ligne et du Saint-Empire en 1601, capitaine
général de l’Artois en 1597, Grand d’Espagne de première classe en
1621, ambassadeur à la cour de Pologne, de France et d’Espagne
Il épousa Marie de Melun, Princesse
d’Epinoy, Marquise de Roubaix, Baronne d’Antoing.
Il décéda à Bruxelles en janvier
1624
Claude
Lamoral I, de Ligne
Né en 1618, décédé à Madrid le
23-12-1679.
Claude Lamoral Ier , 3e prince de Ligne et du Saint-Empire, prince
d’Amblise et d’Epinoy, marquis de Roubaix et de Ville, comte de Fauquemberg, Chevalier
de 1a Toison d’Or, général de la cavalerie des Pays-Bas, vice-roi et capitaine
général de Sicile en 1569, gouverneur du duché de Milan en 1664, ambassadeur à
la cour d’Angleterre
Il avait épousé Marie-Claire,
princesse de Nassau-Siegen, morte à Beloeil le 4-9-1695.
Henri –Louis-Ernest
de ligne
Henri Louis Ernest, 4e Prince de ligne et du Saint-Empire, prince d’Amblise
et d’Epinoy, chevalier de la Toison d’Or, Grand d’Espagne, gouverneur et
capitaine général du duché de Limbourg pour le roi d’Espagne, mort à
Beloeil le 7-2-1702.
Il avait épousé à Madrid en janvier
1677, Marie-Monique de Cordoue-Cardone-Aragon-Benavides, décédée le 18-1-1691
MAISON LE BOUCQ D’ESPINOIS
Cette famille possèdera le château
et le village jusqu’à la révolution française.
On peut encore voir 1es pierres
tombales des membres de cette famille sur les murs extérieurs de l’église et
dans le vieux cimetière qui entoure celle-ci.
Philippe-Louis Le Boucq
Né … , décédé à Epinois le 24
septembre 1720.
Epoux de
Marie-Alexandrine-Adrienne-Philippe le DUCQ
En vertu de lettres patentes du 16
juin 1689, la seigneurie d’Epinois est éclissée la pairie de Beloeil, le Prince
Henri de Ligne vend cette terre au seigneur de Leval, Philippe-Louis Le Boucq
qui en fit le relief le 29 juillet 1689. Il obtint la même année le titre de
comte le Boucq d'Epinois.
Philippe-ALBERT-LEOPOLD
Le Boucq
Né à Epinois le
16-6-1699, décédé le 30 mars 1777.
Dominique-Alexandre-Marie-Joseph
Le boucq d'Epinois
Né en 1740, décédé le 13-2-1789
Epoux de la vicomtesse
Françoise-Charlotte de Sandrouin
II existe un cachet de cire portant
un écu ovale, échiqueté d’argent et d’azur, supporté par deux griffons et
couronné d’une couronne comtale à treize perles dont trois relevées, et entouré
de la mention "Scel échevinal du village despinois". Ce sceau date de
1777 et porte les armes de Messire Dominique-Alexandre-Marie-Joseph comte de
Leboucq d'Epinois.
Charles
Léopold Joseph le Boucq d'Espinois
En 1795, Charles Léopold Joseph le
Boucq d'Espinois lègue ses biens au sieur Joseph Antoine George demeurant à Mons,
et qui deviendra le nouveau châtelain.
Voici les termes de ce testament :
Moi Charles Léopold Joseph De le Boucq d'Espinois soussigné étant en bon
sens, mémoire et entendement quoi qu’incommodé ai fait mon testament des
dernières volontés en la forme et manière suivante.
Je recommande mon âme à Dieu, Le priant par les mérites de la passion de
notre Seigneur Jésus Christ et par l’intercession de la Ste Vierge de ses
Saints patrons et de tous les saints de la colloquer au nombre de ses é1us.
Je choisis pour lieu de ma sépulture le cimetière d’Espinois et je veux
que mes funérailles soient faites selon non état en l’ég1ise dudit Espinois et
qu’il soit célébré un service pour le repos de mon âme comme il a été fait à 1a
mort de feu mon père, et qu'il soit en outre cé1ébré pour le repos de mon âne
quatre cents messes dans les couvents de Binche et de Mons à la rétribution de
sept patards chaque et ce au choix de mes exécuteurs testamentaires ci-dessous
nommés.
Je lègue à Antoine Colinet mon domestique, ma voiture, mes chevaux et
toutes nippes et linges qui ont servi à mon usage, ce qui s’exprime communément
sous le nom de garde-robe Moyennant que 1e dit colinet soit encore à mon
service, cependant mon héritier pourra reprendre la voiture et mes chevaux
parmi donnant à mon Domestique cinquante louis, et s’il s’y refuse, je le prive
de ce lègue
Je lègue à Jeannette Gavrin demeurant en cette ville, pour les services
qu’elle m’a rendu, cinq cents florins de rente viagère que je me suis réservé
en sa faveur par 1e contrat que j’ai passé le dix-huit de ce mois pour
l’aliénation des fiefs que je possédais dans l’étendue de la prévôté de Binche paiable à la dite
Gavrin par le sieur Joseph Antoine George, habitant de Mons.
Je lègue pour les Pauvres d’Espinois vingt cinq louis qui seront distribués
Pour les plus indigents.
Je lègue de même à mon chirurgien Kenaap, domicilié à Mons, 1a somme de
cent couronnes de France en sus de ce qui lui sera du à titre d’honoraires.
Je lègue à Alexis Dave mon ancien domestique cinquante louis pour
anciens services rendus.
Je lègue à Monsieur Dumont mon cousin et à sa mère chacun treize florins
et un sol
Je nomme et institue pour mon héritier universel de tous mes biens, et en cas que les lois françaises
soient promulguées et doivent avoir leur exécution dans ce pays d’un sixième,
toutes dettes passées 1e sieur Joseph Antoine George Demeurant à Mons pour
l’affection particulière que j'ai pour 1ui, et pour les services qu’il m’a
rendu, lui donnant tout tel pouvoir qu’à un héritier selon Droit appartient.
Je nomme pour exécuteur de mon présent testament 1es sieurs Cossée de
Sameries, demeurant à Mons, et Moteroulle notaire et procureur demeurant en cette
ville rue Montagne des Aveugles.
Vers lesquels j’oblige les biens de mon testament et qui auront pour
leurs besognes les émoluments d’usage tant pour recette que pour autres devoirs.
J’annule et je révoque tous testaments et dispositions faits
antérieurement au présent testament qui seul sortira son plein et entier effet.
En foi de quoi j’ai signé et confirmé ces présentes de ma signature et y
ai apposé mon cachet ordinaire.
Ce 24 Décembre 1795 vieux stile/ 3
Nivôse an 4e.
Charles D'Espinoy.
LES PROPRIETAIRES MODERNES
En 1796, le
château féodal d’Epinois légué par son dernier seigneur, Charles-Léopold le
Boucq d’Epinois, à son métayer, Antoine
George. Ses descendants gardèrent le château jusqu’en 1914.
Les George monopolisent rapidement
ma fonction de maire puis de bourgmestre d’Epinois. Le roi Léopold II leur
reconnaît le droit d’utiliser le nom de « Georges d'Epinois » en
1863. L’ancien cimetière d’Epinois possède quelques pierres tombales aux armes
des Le Boucq enlevées de l'église juste à côté, se trouve le cimetière privé
contenant les membres de la
famille Georges
Joseph
Antoine George
Joseph-Antoine[4],
homme de confiance de Charles le Boucq d'Espinois, recueillit sa succession. Il
devint maire, puis bourgmestre d’Epinois
LOUIS-CHARLES-AUGUSTE GEORGE
Louis-Charles[5]
fut lui aussi bourgmestre d’Epinois
CHARLES-FRANCOIS GEORGE D’ESPINOIS
Charles-François[6]
a commencé sa carrière dans l’ancienne armée des Pays-Bas, mais il prit part
aux combats contre les Hollandais en août 1831. Capitaine du régiment des
Guides dès 1833, il s’éleva successivement de grade en grade à celui de colonel
commandant le 1er régiment de cuirassiers en garnison à Malines. Créé
chevalier le 13-12-1833
Vers 1850, il fut appelé à prendre
le commandement en chef de la gendarmerie et il le conserva jusqu’à ce qu’un
arrêté royal du 20-12-1854 lui confie la tâche de général-major commandant la
province de Brabant
Il obtint le 14-2-1851, d’ajouter
d’Espinois à son nom et créé officier le 17-7-1851.
LEOPOLD-ALFRED-CHARLES-JOSEPH GEORGE D’ESPINOIS
Léopold George[7]
est le frère de Charles-François, il épousa Irma de Blois
Durant la guerre de 1914-1918, le dernier représentant de la famille
rencontre une Anglaise qu’il épousa, et
qu'il suit dans son pays en emmenant les archives du château.
A cette époque,
le château fut vendu à un entrepreneur qui dépeça la bâtisse, le donjon-porche
que l’on voit à la page suivante, une aile du XVIIIe s., ainsi qu’une tour isolée
nommée la tour du jardinier, furent démolis
FAMILLE BIZET
ARMAND BIZET
Après le
premier conflit mondial, Armand Bizet
achète ce qui reste du château
et le restaure, soit un bâtiment en L.
La demeure est alors vendue à un
marchand de biens qui en démolit les deux tiers : une aile complète, le
donjon-porche, les grilles d'entrée, le menhir millénaire.
Armand Bizet rachète la propriété
Marie-Louise
Bizet.
Armand Bizet lègua à sa fille Marie-Louise Bizet[8],
épouse Bogaert.
FAMILLE BOOGAERTS
Aujourd’hui une aile du
château appartient toujours à la famille Bogaert ,
BOGAERT ALPHONS-ALOSYUS
FAMILLE NOLF
NOLF CELINE
[1] JORIS M., Epinois, dans Le patrimoine architectural de la Belgique. Hainaut-Thuin ,
vol 10-1., 1983, p.192.
[2] WYMANS G, Inventaire analytique du chartrier de la
trésorerie des comtes de Hainaut, Mons, 1985.
[7] George Léopold-Alfred-Charles-Joseph,° Epinois
19-1-1845, † La Hestre le 12-11-1912.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire