lundi 13 mars 2017

Le château féodal d'Epinois

LE CHÄTEAU FEODAL D'EPINOIS
                                                                                                                                      Alain GRAUX
INTRODUCTION

Au Xe siècle, un premier castrum est cité à  « Spinetum » sur des terres appartenant à l'abbaye de Lobbes.

LE CHÂTEAU
C’est à cette époque, en 1590, qu'est réalisée la première vue connue du château. On y distingue clairement l’imposante forteresse avec son donjon-porche, ses tours, douves et la basse-cour.


Quelques années plus tard, Epinois et son château sont à nouveau reproduits dans les gouaches des albums de Croÿ. La masse du donjon-porche dornine le dessin.
Représenté vers 1600 dans un album du duc de Croÿ, important châtelet d'entrée du bas moyen âge, commandant une enceinte probablement rectangulaire flanquée d'au moins une tour. Chatelet disparu au début du XXe s.
Avec le retour de la paix dans nos régions, les Le Boucq transforment, comme beaucoup d’autres seigneurs, la vieille forteresse en un château de plaisance.
Les bâtiments forment un U ouvert sur la campagne. Un relevé des  propriétés du comte datant de 1791/1793 nous montre le plan du château en utilisant quelques fondations anciennes en moellons de grès.
De grandes fenêtres rythment les façades,  un escalier d’apparat est construit à l'intérieur. Toutefois, une  touche médiévale est conservée en incorporant les tours, le donjon-porche et les douves ainsi qu'une aile.
Actuellement, château en L, à deux niveaux, flanqué à l'angle extérieur d'une tour qui a probablement succédé à celle représentée dans l'album de Croÿ.
L’entrée du parc flanquée de piliers de briques à refends, sommés de vases. Dans l'aile parallèle, double entrée en plein cintre à encadrement à refends, entaillé d'une gorge et surmonté d'une archivolte amortie. Cette aile comprend des boiseries Louis XIV à gauche.
De part et d'autre, une travée de baies en briques sous arc surbaissé, celle à droite du rez-de-chaussée est ajoutée.
Vue du château vers 1903

En retour d'aile comprenant trois arcades en cintre surbaissé avec clé saillante, l'une portant des armoiries et dans un phylactère on lit  l'inscription: "1708 / LE CONTE / DESPINOY".
Arcades rétrécies et percées de fenêtres à montants en matériaux alternés. A droite du rez-de-chaussée, il y a deux baies tardives.
A l'étage, deux fenêtres en arc surbaissé en briques et traces de deux autres murées.
A l’arrière, enfilades de baies, la plupart remaniées au XIXe siècle ou récentes. Aile perpendiculaire portant la date de 1708 par ancres.
Sur corbeaux de bois, bâtières à croupes latérales couvertes d'ardoises, de tuiles et de roofing. Lucarnes à croupe.
Tour ronde à deux niveaux éclairés de baies de type tournaisien simplifié. Toiture polygonale en ardoises, sommée d'une flèche[1].

LES SEIGNEURS FEODAUX
LA MAISON D’ESPINOY
Les premiers seigneurs d’Epinois, se ralliaient au cri de « Berlaimont » et portaient un blason présentant un lion d’or ou d’argent, entouré de croix potencées, d’or ou d’argent également, sur fond de gueule.
LA MAISON DE HOUDENG
Au 13ème siècle, la seigneurie d’Epinois s’unit à celle d’Houdeng  par mariage.

NICOLAS DE HOUDENG
Nicolas de Houdeng, chevalier et seigneur d’Epinois, fut un personnage fort important. Ami du Comte de Hainaut, Jean II d’Avesnes, il légua en 1309 aux magistrats de Mons le vaste hôtel qu’il possédait en cette ville pour y créer un hospice (hôpital).
Le 22 novembre 1292, le comte fui offrit deux accroissements de fief, l’un à Houdeng (fief de Saint-Vaast), l’autre à Epinois (meilleur catel)[2].
Il est encore cité seigneur d’Epinois les 1-8-1376 et 22-1-1378
Un de ses descendants, Nicolas de Houdeng, sire d’Epinois, fut de 1354 à 1372, conseiller de la Comtesse Marguerite de Bavière.
En 1372, le sire d’Epinois touchait une pension de 60 écus prélevée sur les impôts perçus sur le domaine de Binche. Les seigneurs d’Houdeng et d’Epinois tournoyaient au cri de « Chièvre »

LA MAISON D’ESCLAIBES
La terre qui entoure Espinoy, a donné son nom à la famille qui l’habite. Une dame d’Espinoy maria vers la fin du 11ème siècle un seigneur d’Esclaibes,

JACQUES D’ESCLAIBES
Jacques d’Esclaibes, écuyer, tient la terre d’Epinois en fief lige de la pairie de Beloeil par relief exécuté le 28 janvier 1503 (n.st.). Le domaine comprend le château, la seigneurie du lieu, une partie de Leval et de Mont-Sainte-Aldegonde, les cens, rentes, fermages, revenus en grains, mortemains, successions de serfs, bâtards, aubains, lois amendes et forfaitures

JEAN D’ESCLAIBES
Le XVIème siècle se termine. Guerres de religion, duc d’Albe et Gueux, iconoclastes,... Jean, seigneur d’Esclaibes et d’Espinois à réussi (au prix de quelles soumissions, de quelles politiques) à maintenir et enrichir son patrimoine.
Ses biens couvrent les territoires de Leval, Trahegnies, Mont-Sainte-Aldegonde qu’il a repris à Philippe Marnix de Sainte-Aldegonde[3].

CHARLES D’ESCLAIBES
A sa mort, n’ayant pas d’héritier direct, c’est son bâtard, Charles, qui hérite de la seigneurie d’Espinoy. Mais ... Pierre de Zwerne, seigneur de Fosteau et cousin germain de Jean d’Esclaibes, revendique la propriété de ces biens. Entretemps, guerres et bandes de soldats errants, paysans affamés ont bien changé l’image du château, où tout est en ruine et à l’abandon.
Suite à cette querelle de succession, le bien contesté est attribué à la famille de Ligne, suzeraine du fief qui devient propriétaire du domaine dont le château principal est à Beloeil.

LA MAISON DE LIGNE
Ces Princes de ligne vont restaurer le château, et le titre « d’Espinoy » qui restera dans la famille des Ligne bien après qu’ils aient cédé les terres aux Le Boucq d’Espinoy, en 1689.

Lamoral de Ligne
Lamoral de Ligne, prince d’Epinoy en 1592, souverain de Fagnoles, pair, sénéchal et maréchal de Hainaut, chevalier de la Toison d’Or en 1599, prince de Ligne et du Saint-Empire en 1601, capitaine général de l’Artois en 1597, Grand d’Espagne de première classe en 1621, ambassadeur à la cour de Pologne, de France et d’Espagne
Il épousa Marie de Melun, Princesse d’Epinoy, Marquise de Roubaix, Baronne d’Antoing.
Il décéda à Bruxelles en janvier 1624

Claude Lamoral I, de Ligne
Né en 1618, décédé à Madrid le 23-12-1679.
Claude Lamoral Ier , 3e  prince de Ligne et du Saint-Empire, prince d’Amblise et d’Epinoy, marquis de Roubaix et de Ville, comte de Fauquemberg, Chevalier de 1a Toison d’Or, général de la cavalerie des Pays-Bas, vice-roi et capitaine général de Sicile en 1569, gouverneur du duché de Milan en 1664, ambassadeur à la cour d’Angleterre
Il avait épousé Marie-Claire, princesse de Nassau-Siegen, morte à Beloeil le 4-9-1695.

Henri –Louis-Ernest de ligne
Henri Louis Ernest, 4e  Prince de ligne et du Saint-Empire, prince d’Amblise et d’Epinoy, chevalier de la Toison d’Or, Grand d’Espagne, gouverneur et capitaine général du duché de Limbourg pour le roi d’Espagne, mort à Beloeil  le 7-2-1702.
Il avait épousé à Madrid en janvier 1677, Marie-Monique de Cordoue-Cardone-Aragon-Benavides, décédée le 18-1-1691
MAISON LE BOUCQ D’ESPINOIS
Cette famille possèdera le château et le village jusqu’à la révolution française.
On peut encore voir 1es pierres tombales des membres de cette famille sur les murs extérieurs de l’église et dans le vieux cimetière qui entoure celle-ci.

                                            Armoiries des le Boucq dans l’église d’Epinois
   
Philippe-Louis Le Boucq
Né … , décédé à Epinois le 24 septembre 1720.
Epoux de Marie-Alexandrine-Adrienne-Philippe le DUCQ
En vertu de lettres patentes du 16 juin 1689, la seigneurie d’Epinois est éclissée la pairie de Beloeil, le Prince Henri de Ligne vend cette terre au seigneur de Leval, Philippe-Louis Le Boucq qui en fit le relief le 29 juillet 1689. Il obtint la même année le titre de comte le Boucq d'Epinois.

Philippe-ALBERT-LEOPOLD Le Boucq
Né à Epinois le 16-6-1699, décédé le 30 mars 1777.

Dominique-Alexandre-Marie-Joseph Le boucq d'Epinois
Né en 1740, décédé le 13-2-1789
Epoux de la vicomtesse Françoise-Charlotte de Sandrouin
II existe un cachet de cire portant un écu ovale, échiqueté d’argent et d’azur, supporté par deux griffons et couronné d’une couronne comtale à treize perles dont trois relevées, et entouré de la mention "Scel échevinal du village despinois". Ce sceau date de 1777 et porte les armes de Messire Dominique-Alexandre-Marie-Joseph comte de Leboucq d'Epinois.

Charles Léopold Joseph le Boucq d'Espinois
En 1795, Charles Léopold Joseph le Boucq d'Espinois lègue ses biens au sieur Joseph Antoine George demeurant à Mons, et qui deviendra le nouveau châtelain.
Voici les termes de ce testament :
Moi Charles Léopold Joseph De le Boucq d'Espinois soussigné étant en bon sens, mémoire et entendement quoi qu’incommodé ai fait mon testament des dernières volontés en la forme et manière suivante.
Je recommande mon âme à Dieu, Le priant par les mérites de la passion de notre Seigneur Jésus Christ et par l’intercession de la Ste Vierge de ses Saints patrons et de tous les saints de la colloquer au nombre de ses é1us.
Je choisis pour lieu de ma sépulture le cimetière d’Espinois et je veux que mes funérailles soient faites selon non état en l’ég1ise dudit Espinois et qu’il soit célébré un service pour le repos de mon âme comme il a été fait à 1a mort de feu mon père, et qu'il soit en outre cé1ébré pour le repos de mon âne quatre cents messes dans les couvents de Binche et de Mons à la rétribution de sept patards chaque et ce au choix de mes exécuteurs testamentaires ci-dessous nommés.
Je lègue à Antoine Colinet mon domestique, ma voiture, mes chevaux et toutes nippes et linges qui ont servi à mon usage, ce qui s’exprime communément sous le nom de garde-robe Moyennant que 1e dit colinet soit encore à mon service, cependant mon héritier pourra reprendre la voiture et mes chevaux parmi donnant à mon Domestique cinquante louis, et s’il s’y refuse, je le prive de ce lègue
Je lègue à Jeannette Gavrin demeurant en cette ville, pour les services qu’elle m’a rendu, cinq cents florins de rente viagère que je me suis réservé en sa faveur par 1e contrat que j’ai passé le dix-huit de ce mois pour l’aliénation des fiefs que je possédais dans l’étendue de la prévôté de Binche paiable à la dite Gavrin par le sieur Joseph Antoine George, habitant de Mons.
Je lègue pour les Pauvres d’Espinois vingt cinq louis qui seront distribués Pour les plus indigents.
Je lègue de même à mon chirurgien Kenaap, domicilié à Mons, 1a somme de cent couronnes de France en sus de ce qui lui sera du à titre d’honoraires.
Je lègue à Alexis Dave mon ancien domestique cinquante louis pour anciens services rendus.
Je lègue à Monsieur Dumont mon cousin et à sa mère chacun treize florins et un sol
Je nomme et institue pour mon héritier universel de tous mes  biens, et en cas que les lois françaises soient promulguées et doivent avoir leur exécution dans ce pays d’un sixième, toutes dettes passées 1e sieur Joseph Antoine George Demeurant à Mons pour l’affection particulière que j'ai pour 1ui, et pour les services qu’il m’a rendu, lui donnant tout tel pouvoir qu’à un héritier selon Droit appartient.
Je nomme pour exécuteur de mon présent testament 1es sieurs Cossée de Sameries, demeurant à Mons, et Moteroulle notaire et procureur demeurant en cette ville rue Montagne des Aveugles.
Vers lesquels j’oblige les biens de mon testament et qui auront pour leurs besognes les émoluments d’usage tant pour recette que pour autres devoirs.
J’annule et je révoque tous testaments et dispositions faits antérieurement au présent testament qui seul sortira son plein et entier effet.
En foi de quoi j’ai signé et confirmé ces présentes de ma signature et y ai apposé mon cachet ordinaire.
Ce 24 Décembre 1795 vieux stile/  3 Nivôse an 4e.
Charles D'Espinoy.
LES PROPRIETAIRES MODERNES
LA FAMILLE GEORGE
En 1796, le château féodal d’Epinois légué par son dernier seigneur, Charles-Léopold le Boucq d’Epinois,  à son métayer, Antoine George. Ses descendants gardèrent le château jusqu’en 1914.
Les George monopolisent rapidement ma fonction de maire puis de bourgmestre d’Epinois. Le roi Léopold II leur reconnaît le droit d’utiliser le nom de « Georges d'Epinois » en 1863. L’ancien cimetière d’Epinois possède quelques pierres tombales aux armes des Le Boucq enlevées de l'église juste à côté, se trouve le cimetière privé contenant les membres de la famille Georges

Joseph Antoine George
Joseph-Antoine[4], homme de confiance de Charles le Boucq d'Espinois, recueillit sa succession. Il devint maire, puis bourgmestre d’Epinois

LOUIS-CHARLES-AUGUSTE GEORGE
Louis-Charles[5] fut lui aussi bourgmestre d’Epinois

CHARLES-FRANCOIS GEORGE D’ESPINOIS
Charles-François[6] a commencé sa carrière dans l’ancienne armée des Pays-Bas, mais il prit part aux combats contre les Hollandais en août 1831. Capitaine du régiment des Guides dès 1833, il s’éleva successivement de grade en grade à celui de colonel commandant le 1er régiment de cuirassiers en garnison à Malines. Créé chevalier le 13-12-1833
Vers 1850, il fut appelé à prendre le commandement en chef de la gendarmerie et il le conserva jusqu’à ce qu’un arrêté royal du 20-12-1854 lui confie la tâche de général-major commandant la province de Brabant
Il obtint le 14-2-1851, d’ajouter d’Espinois à son nom et créé officier le 17-7-1851.

LEOPOLD-ALFRED-CHARLES-JOSEPH  GEORGE D’ESPINOIS
Léopold George[7] est le frère de Charles-François, il épousa Irma de Blois
Durant la guerre de 1914-1918,  le dernier représentant de la famille rencontre une Anglaise qu’il épousa,  et qu'il suit dans son pays en emmenant les archives du château.
A cette époque, le château fut vendu à un entrepreneur qui dépeça la bâtisse, le donjon-porche que l’on voit à la page suivante, une aile du XVIIIe s., ainsi qu’une tour isolée nommée la tour du jardinier,  furent  démolis
FAMILLE BIZET
ARMAND BIZET
Après le premier conflit mondial,  Armand Bizet achète ce qui reste du château et le restaure, soit un bâtiment en L.
La demeure est alors vendue à un marchand de biens qui en démolit les deux tiers : une aile complète, le donjon-porche, les grilles d'entrée, le menhir millénaire.
Armand Bizet rachète la propriété

Marie-Louise Bizet.
Armand Bizet  lègua à sa fille Marie-Louise Bizet[8], épouse Bogaert.

FAMILLE BOOGAERTS
Aujourd’hui une aile du château  appartient toujours à la famille Bogaert,

BOGAERT ALPHONS-ALOSYUS
 La fille Armand Bizet épousa le pépiniériste Alfons Bogaert[9]

 FAMILLE NOLF
NOLF CELINE
Une autre partie de la maison appartient à Céline Nolf[10].


[1] JORIS M., Epinois, dans Le patrimoine architectural de la Belgique. Hainaut-Thuin, vol 10-1., 1983, p.192.
[2] WYMANS G, Inventaire analytique du chartrier de la trésorerie des comtes de Hainaut, Mons, 1985.
[3] Philippe de Marnix, baron de Sainte-Aldegonde, né à Bruxelles en 1538[, mort à Leyde en 1598, fut à la fois militaire, poète, théologien et pédagogue, humaniste et partisan de Guillaune d’Orange, le "Grand Gueux", défenseur de la religion réformée et de 1a lutte d’indépendance contre l'Espagne
[4] George Joseph-Antoine, ° Mons, x Floris Victoire-Charlotte
[5] George Charles-François, °Epinois le 17-11-1843, y décédé 11-4-1907 x Meurice Adèle
[6] George Charles-François, ° Epinois 4-10-1796
[7] George Léopold-Alfred-Charles-Joseph,° Epinois 19-1-1845, † La Hestre le 12-11-1912.
[8] Bizet Marie-Louise, ° 15-7-1920
[9] Bogaert Alfons-Alosyus, ° 8-3-1913
[10] Nolf Céline-Marie, ° 19-8-1937

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