BINCHE ET L’ARTILLERIE LOURDE AU MOYEN-ÂGE
Alain GRAUX
DÉFINITION
La ville de Binche eut l’usage de veuglaires.
Le veuglaire (du néerlandais « vogelaer », canon à tirer les oiseaux,
de « vogel », oiseau) est une pièce d'artillerie des XIVe siècle et XVe siècle se chargeant par la culasse.
Il est plus long, de petit calibre
et moins puissant que la bombarde. Son tir est imprécis.
La bombarde est une
pièce d'artillerie apparue pendant la Guerre de Cent Ans qui lançait des boulets de pierre ou de fer. Son manque de
précision et sa faible cadence de tir rendaient la bombarde plus effrayante et
démoralisante que meurtrière. C'est pour cela qu'elle était beaucoup plus
utilisée pour abattre les fortifications ennemies. Elle fut utilisée jusqu'à la
fin du XVe siècle où elle fut rendus
obsolète par l’apparition des canons à roues (couleuvrine).
En
1418, par ordre de Marguerite de Bourgogne, comtesse de Hainaut, trois
veuglaires et 4 plommières (canons de petites dimensions) furent achetés à
Binche à l’artilleur Jehan Raoul pour le château fort de Morlanwelz.
On
sait qu’en 1419, il y eut saisie de pièces d’artillerie, de poudre et de fers
de flèches appartenant à des marchands binchois, dans le Cambrésis[1]
En
1422, un marchand de Binche vend au roi Charles VII, roi de France[2] Le
duc de Bourgogne, Philippe le Bon, assiégeant Saint-Riquier, acheta une
bombarde en fer forgé de près de 7 tonnes qui lançait des boulets de 200 kg , destinée à battre
les murs de cette ville tenue par un partisan du « roi de Bourges ».
La
bombarde acheminée de Binche à Arras ne résista pas au tir d’épreuve, se rompit
et ne fut jamais réparée. Le vendeur binchois en réclamait 1000 livres , de guerre
lasse on consentit de lui en donner 600[3].
En
1447, trente canons en fer d’Espagne de 4 pieds de long et destinés à l’armement des
galères furent fabriqués à Binche[4].
LA DEFENSE DE LA VILLE
Si
Binche tint un rôle de choix dans la fabrication de pièces d’artillerie, du
moins à partir du XVe siècle, elle paraît encore tributaire des sources
extérieures d’approvisionnement au XIVe siècle.
Le
plus ancien compte communal[5],
datant de 1362-1363, signale qu’on paya à Noël de Coilli, une somme, pour avoir
« serré une bombarde en une pièce de
bos, d’une virurelle ». Il fournit aussi «trois haustes empenées » pour les bombardes et « six quairiaulx de ploumée ».
En
1364, la Ville commanda au « maistre
des diaubles » dit le Blavier de Saint-Vaast, venu de Mons « quatre bombardes de fier de pluisieurs
manières pour le deffense de le ville ». Il enseigna à Pierre
Caterine la manière d’utiliser ces
engins[6].
De
son côté, Ernoul le Caudrelier enpenna « quattre boucons » pour les bombardes.
Le
conseil de la Ville augmenta le nombre d’engins
de guerre, ainsi en 1395, on paya à Collart Collebaut 105 s. « pour recuire, resouder et viernir vingt et
une petites bombardes de fier ».
La
même année, Jehan Brougnart, de Mons, fournit une « bombarde de fier à jetter pières »[7].
Vers
la même année, Estievenne de Dijon vint à Binche enseigna à Mathieu le
Carpentier et Lorent le Carlier, la façon de composer la poudre de bombarde,
d’assurer la garde et défense de la ville.
Jehan
Brougnart recercla trois bombardes de cuivre et une autre de fer, achetées à
Sebourg (France/059). A l’occasion de l’essai de ces engins, Jehan Le Roy,
avait forgé « huict fiers de fusées
à jetter feu »[8].
En
1405, la ville s’arma de dix veuglaires « cascune estoffée de deux
cambres », ces chambres permettant de multiplier la rapidité du tir.
Gilliart
de Braibant fournit les serrures destinées aux coffres où sont rangés ces
canons en temps de paix dans des pièces des portes Saint-Paul, de la sauvenière
et de Mélion[9].
En
1406, Gilliart Yeuwaing vendit à la ville une bombarde pesant 33 livres pour 4l. 2s.
6d.[10]
La forteresse
En 1403 la communauté, sous la direction de maître Thomas Ladart († 1404), fit faire des réfections aux guérites, aux tours, aux portes, on y plaça des pièces d’artillerie, des canonnières furent aménagées à différents endroits dans l’épaisseur de la muraille[11].
Plusieurs boulevards sont édifiés en avant des remparts pour permettre une action des pièces d’artilleries
Une tour ajoutée presque à l’extrémité sud-ouest de l’enceinte, possède de fort grandes archères susceptibles de jouer le rôle de canonnières
Son successeur, le maître maçon comtal Noël Camp d’Avaine, construisit une tour, aujourd’hui disparue, au flan occidental à hauteur du cimetière, elle développait plusieurs niveaux défensifs puissants comportant des canonnières.
[3] GAIER C. L’industrie et le commerce des armes dans les principautés belges du
XIIIe siècle à la fin du XVe, p.146.
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