NOTRE MINI
AMBASSADOR
Fernand GRAUX
Bruges, juillet 1968, je suis dans une petite
rue très commerçante située non loin du beffroi connu du monde touristique.
Tout comme des dizaines d’autres, semblables à moi-même, je faisais du lèche
vitrine et, entouré un instant dans un groupe bruyant, j’entendis soudain
par-dessus mon épaule la réflexion s’un grand diable vêtu de prince de Galles
et pipe au bec, un Anglais apparemment, dire
« Quest-ce que cette poupée
ornée de plumes ? ».
Je suivis machinalement du regard son index
pointé vers l’intérieur de l’étalage et j’eus alors la stupeur de voir parmi un
tas d’objets hétéroclites entre deux ravissantes grand-mères lunettées et
costumées en dentellières, un magnifique petit gille de Binche.
Etant pour ma part d’un naturel assez liant et
de surcroît très bavard comme tout Binchois « caillau » qui se respecte, je me suis empressé d’éclairer sa
lanterne avec mon accent-terroir si caractéristique qui fit sourire maints
francophones qui passaient à ce moment.
« Eh
bien, Monsieur, la poupée que vous voyez-là n’est autre que notre orgueil
local, le véritable gille de Binche… » et de débiter tout mon
savoir ; le groupe qui escortait mon leader se rapprochait de moi, ne
perdant aucune de mes explications volubiles et intarissable, en étant
époustouflé de tant de curiosités racontées en l’espace d’un instant. « En somme » dit mon interlocuteur
occasionnel occasionnel en me quittant « c’est donc votre mini ambassador ».
Rien n’était plus vrai !
J’oubliai bien sûr ce petit fait anodin en
apparence, mais il me fut donné d’y réfléchir plus amplement par la suite,
c’est qu’en effet, lors de mes petites randonnées touristiques en ces dernières
vacances j’ai pu me convaincre tout à fait que notre petit gille, parfois mal
fagotté il est vrai, traité à toutes les sauces : fait de toile peinte, ou
enterre cuite teintée à la va-vite ou encore de simple craie bariolée à la
diable et nullement orthodoxe, la coiffe faite soit de papier, de plumeaux synthétiques
ou de plumes véritables en certains cas.
Qu’importe…j’en ai vu sur la côte belge parmi
les coquillages, j’en ai vu à Anvers, à Spa, à Eupen et à Saint-Hubert près
d’un dix-cors magnifique, à Nivelles sur une tarte à l’djote, j’en ai vu à
Maubeuges et à Valenciennes, ces villes françaises amies, j’en ai vu et vous
aussi certainement, chers lecteurs, dans toutes les villes attirant les foules
avides de folklore, partout notre gille est devenu…national.
C’est vous dire en fait que notre renommée est
bien loin de se ternir et nous ne pouvons que nous en réjouir davantage en nous
disant qu’il n’y a vraiment qu’un seul Binche au monde.
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