mercredi 8 février 2017

La verrerie de Binche


LA VERRERIE DE BINCHE
                                                                                                
                                                                                                                Alain GRAUX
On peut lire fréquemment que la verrerie de Binche a été créée par Messieurs Devergnies et Laurent, en réalité il faut savoir que cette société en nom collectif ayant pour objet la fabrication du verre à vitre, des bouteilles et de la gobeleterie, a été fondée le premier décembre 1860, devant le notaire Auguste Fontaine, par les personnes suivantes :
Devergnies Henri, négociant à Binche.
Devergnies Maximilien, négociant à Binche.
Devergnies Michel, négociant à Binche.
Fontaine-Buisseret Hyppolite, négociant à Binche.
Laurent Emile, notaire à Binche.
Laurent Firmin, industriel à Binche.
Laurent Juvénal, propriétaire à Binche.
Laurent Victor, industriel à Binche.
Lessine Edmond, propriétaire à Binche.
Lessine François, docteur en médecine à Binche.
Maiglet Frédéric, industriel à La Louvière.
Ils apportèrent chacun 10.000 francs or.
Le capital ainsi constitué est de 110.000 francs or, avec réserve d’appel de fonds à concurrence de 55.000 francs or.
Le siège est établi à l’usine sise à l’endroit dit « Versailles ».
La raison sociale est « Laurent-Devergnies et Compagnie ».
La durée de la société est fixée à 15 ans à partir du premier décembre 1860.
Les fondateurs apportèrent en sus à la société un terrain d’un hectare 12 centiares qu’ils acquirent devant le même notaire, de la société des chemins de fer du Centre, le 27 août 1860 pour la somme de 18.844 francs 72 centimes.
La société fut dirigée par une commission de quatre membres nommés par l'assemblée générale qui devait se produire une fois  par an, la signature sociale appartint à Maximilien Devergnies et à Victor Laurent[1] .
Par la suite diverses transactions se firent à propos des parts d'actions :
 le 27 décembre I865, Juvénal Laurent vendit à Francois Lessine, docteur en médecine, tous ses droits sur la verrerie pour la somme de 10.000 francs[2].
Le 12 septembre 1871, Rosalie Buisseret, veuve d' Hyppolite Fontaine, négociante à Binche, et leur enfants : Louise Fontaine, propriétaire, épouse d'Isidore Devergnies, greffier ; Védastine Fontaine, propriétaire, épouse d'Hector Brogniez, marchand brasseur à Haine-Saint-Paul ; Laure Petit, veuve de Juvénal Fontaine, vendent à Victor Lau­rent, industriel domicilié à Battignies, la part qu'elles possèdent en commun, pour la somme de I0.000 francs[3].
Le 26 mars 1872, Michel Devergnies, propriétaire à Binche, vend pour 10.000 francs à Frédéric Maiglet ses droits sur la verrerie[4],de même que son frère Maximilien, propriétaire et négociant à Binche, vend à Victor Laurent les siens[5].
Joséphine Devergnies, propriétaire à Binche représentant Henri Devergnies, son frère défunt, vend à François Lessine, docteur en médecine, Victor Laurent, Firmin Laurent, Edmond Lessine, docteur en médecine, Ludovic Laurent, étudiant en droit, les droits d’une part qui lui appartient pour la somme de 10.000 francs[6].
Suite à ces transactions passées le 26 mars 1872, les associés restant et continuant la société des verreries de Binche convinrent d’adopter la raison sociale «Laurent et Lessine » au lieu de « Laurent-Devergnies et Cie. » dont la durée fut portée à 15 ans.
Victor Laurent fut le seul ayant la signature sociale[7]
Le 12 janvier 1875, Edmond Lessine vendit à Ludovic Laurent ses droits sur la firme qui avait entretemps encore changé de dénomination et qui était « Laurent, Maiglet et Lessine ». Ludovic Laurent possédait trois actions (deux actions qu’il tenait de son chef et une à titre d’héritier de François Lessine, son père)[8].
Cette dénomination avait été prise le 12 janvier 1875.
Malheureusement, la société fit faillite, celle-ci fut prononcée le 2 mars 1877 par le tribunal de commerce de Charleroi.
Le 7 septembre 1878, le notaire Léon Fontaine, de la résidence de Ressaix, mit en adjudication la verrerie ; il procéda à la vente publique des parts afférentes aux membres de la société qui se répartissent comme suit :
4/10e à Victor Laurent, 3/10e à Ludovic Laurent, 1/10e à Firmin Laurent et 2/10e à Frédéric Maiglet.
Lors de la vente la verrerie est décrite comme suit :
« Une verrerie en pleine exploitation, très bien outillée et possédant un matériel complet, trois fours à huit pots, quatre étenderies, de vastes magasins, des chambres à pots, moulin à broyer, forge et ustensiles, une belle habitation du directeur, cour et jardins, une cantine avec cour et jardin, bureaux, hangars, chambrettes d’ouvriers, ensemble contenant en superficie 1ha 34 ca 68a (section C du cadastre ; parcelles 181c, 181h, 181k, 181m, 181n, 181o, 224g, 224h, 224i, 224k, 224l, 224m, 224n, tenant au chemin de fer du Centre, en face de la station,, au chemin de Binche à Lobbes et à celui de la Samme provenant de la compagnie du chemin de fer du Centre par actes passés
1.    Le 27 août 1860, pour 1 ha 12 a 54 ca.
2.    Le 18 février 1861, pour 22 a 1 ca.
L’estimation est fixée par les curateurs à 26.310 francs 81 centimes
Outre le prix d’acquisition de la verrerie, matériel et outillage, l’acquéreur devra rembourser aux vendeurs 122 francs dépensés par eux pour le remplacement à la verrerie des tuyaux en terre par des tuyaux en plomb, servant à la conduite des eaux, et 1045 francs représentant « les 3/5e des travaux effectués pour réparer un four remis à feux il y a trois mois. L’acquéreur reprendra au prix de revient le supplément non employé du verre existant en magasin et des matières premières ou des verres qui resteraient dans les pots ».
Aux amateurs assemblés à la cantine de la verrerie, on a exposé en vente les parts afférentes aux faillis co-associés, mises à prix à 60.000 francs.
La dernière enchère a été portée à 71.000 francs et prononcée au profit de messieurs Léon Monnoyer-Wéry, industriel à Roux ; Nestor Cheruy, agent commercial à Roux et Jules Paternotte, marchand brasseur à Binche[9].


Le 6 octobre 1878, les acheteurs de la verrerie décident la création d’une société anonyme nommée :
« Société anonyme des verreries de Binche ».
Le capital est porté à 140.000 francs représenté par 280 actions de 500 francs.
Léon Monnoyer, Nestor Cheruy et Jules Paternotte apportent en propre à la société, les terrains, la verrerie, l’outillage, les marchandises et la matière première, les appareils, machines et mobiliers, ainsi que la situation commerciale, tels qu’ils l’ont acheté le 7 septembre 1878.
En retour de cet apport estimé à 90.000 francs, ils reçoivent 180 actions entièrement libérées.
Les 100 actions restantes sont souscrites par :
Francq Martin, négociant à Jumet (10 actions).
Misonne François-Xavier, négociant à Charleroi (15 actions).
Mahaux Léopold, comptable à Marcinelle (15 actions).
Mauroy Alphonse, clerc de notaire à Binche (15 actions).
Paternotte-Allard Gustave, ingénieur des mines à Morlanwelz (15 actions).
Pêtre Alfred, industriel à Baudour (15 actions).
Vaerenwijck Edouard, administrateur de la banque de Charleroi (15 actions).
La verrerie est alors gérée par trois commissaires : MM. Mahaux, Mauroy et Gustave Paternotte.
Les administrateurs sont MM. Monnoyer, Misonne, Pêtre et Jules Paternotte[10].
L’usine fabrique alors le verre à vitre blanc de grandes dimensions, le verre opale, le verre teinté, les verres mousselines, mats et cannelés.
La verrerie avec fours à bassins occupait en 1880, 7 employés et 72 ouvriers ; elle produisait 300.000m² de verre à vitre pour un chiffre d’affaires de 360.000 francs[11].
En 1890, on installa un nouveau four à bassin, la société acquit de nouveau du terrain à cet effet. Le 27 décembre 1894, elle demandait l’autorisation d’installer une machine à vapeur. L’usine occupe 360 ouvriers[12].
La société exportait sa production principalement en Angleterre, aux Etats-Unis, au Canada et aux Pays-Bas[13].
Pendant la guerre 1914-1918, la verrerie ferma ses portes jusqu’en novembre 1919. Les activités s’accrurent, mais en 1922, la verrerie à bouche cessait ses activités[14].
Les ouvriers verriers gagnaient alors 1 franc 65 centimes par canon.
La nuit du 31 décembre 1926 au 1er janvier 1927, un incendie ravage une partie des installations, la verrerie était alors outillée pour la fabrication mécanique, des machines à étirer le verre furent installées, elles ne durent pas fonctionner longtemps ca en 1931, la mise en place du trust des verreries mécaniques fit suspendre la fabrication dans l’usine de Binche. Les activités ne devaient plus reprendre.
A cette époque, le siège social de la société se situait au n° 103, Boulevard de Waterloo, à Bruxelles, son capital était de 7.000.000 de francs, elle était dirigée par Alfred Labrique. L’administrateur-président était le baron Coppée, de Bruxelles, le vice-président était Fernand Babusiaux, notaire à Binche et l’administrateur, R. Dautrebande.
En 1933, la société des verreries de Binche était en liquidation[15].


[1] Acte 160/1860 du notaire Auguste Fontaine.
[2] Acte 294/1865, du notaire Camille Fontaine.
[3] Acte 148/1871, du notaire Léon Fontaine, établi à Ressaix.
[4] Acte 78/1872, du notaire Léon Fontaine.
[5] Acte 77/1872, du notaire Léon Fontaine.
[6] Acte 79/1872, du notaire Léon Fontaine.
[7] Acte 80/1872, du notaire Léon Fontaine.
[8] Acte 4/1875, du notaire Léon fontaine.
[9] Acte 214/1877, du notaire Léon Fontaine.
[10] Acte 244/1878, du notaire Léon Fontaine.
[11] Ministère de l’Intérieur « Recensement industriel» Bruxelles, 1880.
[12] F. RAYMOND, Histoire du Hainaut belge et français et du Cambrésis, Paris, 1889.
[13] N. DELPORTE, Binche et sa région à travers les âges , Anderlues, 1930.
[14] « T’Avau Binche » 30-9-1961.
[15] « Le revanche des ouvriers verriers », 10-8-1933, Lodelinsart.

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