mardi 29 novembre 2016

Binche et l'artillerie lourde au moyen-âge


                                BINCHE ET L’ARTILLERIE LOURDE AU MOYEN-ÂGE

                                                                                                                                          Alain GRAUX
DÉFINITION

La ville de Binche eut l’usage de veuglaires.


 Le veuglaire (du néerlandais « vogelaer », canon à tirer les oiseaux, de « vogel », oiseau) est une pièce d'artillerie des XIVe siècle et XVe siècle se chargeant par la culasse. Il est plus long, de petit calibre et moins puissant que la bombarde. Son tir est imprécis.


Veuglaire du XVème siècle:




Elle utilisa aussi des bombardes appelées « Diables »



La bombarde est une pièce d'artillerie apparue pendant la Guerre de Cent Ans qui lançait des boulets de pierre ou de fer. Son manque de précision et sa faible cadence de tir rendaient la bombarde plus effrayante et démoralisante que meurtrière. C'est pour cela qu'elle était beaucoup plus utilisée pour abattre les fortifications ennemies. Elle fut utilisée jusqu'à la fin du XVe siècle où elle fut rendus obsolète par l’apparition des canons à roues (couleuvrine).

LE COMMERCE

En 1418, par ordre de Marguerite de Bourgogne, comtesse de Hainaut, trois veuglaires et 4 plommières (canons de petites dimensions) furent achetés à Binche à l’artilleur Jehan Raoul pour le château fort de Morlanwelz.
On sait qu’en 1419, il y eut saisie de pièces d’artillerie, de poudre et de fers de flèches appartenant à des marchands binchois, dans le Cambrésis[1]
En 1422, un marchand de Binche vend au roi Charles VII, roi de France[2] Le duc de Bourgogne, Philippe le Bon, assiégeant Saint-Riquier, acheta une bombarde en fer forgé de près de 7 tonnes qui lançait des boulets de 200 kg, destinée à battre les murs de cette ville tenue par un partisan du « roi de Bourges ».
La bombarde acheminée de Binche à Arras ne résista pas au tir d’épreuve, se rompit et ne fut jamais réparée. Le vendeur binchois en réclamait 1000 livres, de guerre lasse on consentit de lui en donner 600[3].
En 1447, trente canons en fer d’Espagne de 4 pieds de long et destinés à l’armement des galères furent fabriqués à Binche[4].

LA DEFENSE DE LA VILLE

Si Binche tint un rôle de choix dans la fabrication de pièces d’artillerie, du moins à partir du XVe siècle, elle paraît encore tributaire des sources extérieures d’approvisionnement au XIVe siècle.
Le plus ancien compte communal[5], datant de 1362-1363, signale qu’on paya à Noël de Coilli, une somme, pour avoir « serré une bombarde en une pièce de bos, d’une virurelle ». Il fournit aussi «trois haustes empenées » pour les bombardes et « six quairiaulx de ploumée ».
En 1364, la Ville commanda au « maistre des diaubles » dit le Blavier de Saint-Vaast, venu de Mons « quatre bombardes de fier de pluisieurs manières pour le deffense de le ville ». Il enseigna à Pierre Caterine  la manière d’utiliser ces engins[6].
De son côté, Ernoul le Caudrelier enpenna « quattre boucons » pour les bombardes.
Le conseil de la Ville augmenta le nombre d’engins  de guerre, ainsi en 1395, on paya à Collart Collebaut 105 s. « pour recuire, resouder et viernir vingt et une petites bombardes de fier ».
La même année, Jehan Brougnart, de Mons, fournit une « bombarde de fier à jetter pières »[7].
Vers la même année, Estievenne de Dijon vint à Binche enseigna à Mathieu le Carpentier et Lorent le Carlier, la façon de composer la poudre de bombarde, d’assurer la garde et défense de la ville.
Jehan Brougnart recercla trois bombardes de cuivre et une autre de fer, achetées à Sebourg (France/059). A l’occasion de l’essai de ces engins, Jehan Le Roy, avait forgé « huict fiers de fusées à jetter feu »[8].
En 1405, la ville s’arma de dix veuglaires « cascune estoffée de deux cambres », ces chambres permettant de multiplier la rapidité du tir.
Gilliart de Braibant fournit les serrures destinées aux coffres où sont rangés ces canons en temps de paix dans des pièces des portes Saint-Paul, de la sauvenière et de Mélion[9].
En 1406, Gilliart Yeuwaing vendit à la ville une bombarde pesant 33 livres pour 4l. 2s. 6d.[10]

La forteresse


En 1403 la communauté, sous la direction de maître Thomas Ladart († 1404), fit faire des réfections aux guérites, aux tours, aux portes, on y plaça des pièces d’artillerie, des canonnières furent aménagées à différents endroits dans l’épaisseur de la muraille[11].
Plusieurs boulevards sont édifiés en avant des remparts pour permettre une action des pièces d’artilleries

Une tour ajoutée presque à l’extrémité sud-ouest de l’enceinte, possède de fort grandes archères susceptibles de jouer le rôle de canonnières

Son successeur, le maître maçon comtal Noël Camp d’Avaine, construisit une tour, aujourd’hui disparue, au flan occidental à hauteur du cimetière, elle développait plusieurs niveaux défensifs puissants comportant des canonnières.


Canonnière du Faubourg du Posty
























[1] GAIER C., Histoire des armes. Comptes généraux, p.323
[2] A.N.Lille, série B 1935 et B.1972, f°259.
[3] GAIER C.  L’industrie et le commerce des armes dans les principautés belges du XIIIe siècle à la fin du XVe, p.146.
[4] BRUSTEN C. L’armée bourguignonne de 1465 à 1468, 1953, p.106.
[5] A.G.R. C-C. 39365, p.104.
[6] ROLAND, E. L’artillerie de la ville de Binche (1362-1420, dans Bull. S.R.P.A .Charleroi, 1954.
[7] A.G.R. C-C. 39350, pp. 8-9.
[8] A.G.R. C-C. 39370, p. 24.
[9] A.G.R. C-C. 39354, p. 11.
[10] A.G.R. C-C. 39356, p. 14.
[11] A.G.R. C-C. 8786.

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