mercredi 30 novembre 2016

Statistiques industrielles. XVIIIe s.

                             LES STATISTIQUES INDUSTRIELLES DU REGIME AUTRICHIEN
                                                                                                                                       Alain GRAUX

Sous le Régime autrichien, en 1764, les services du Conseil des Finances organisèrent dans tout les Pays-Bas un recensement[1] des industries, qui, suivant un modèle standard, nous renseigne [2]:
-          Sur le nombre d’exploitations et de métiers y travaillant.
-          La durée de l’exploitation.
-          Les octrois autorisant l’exploitation
-          Le nombre d’ouvriers
-          La quantité et débit de ce qui se fabrique
-          Les matières premières et leur provenance.
-          L’exportation des marchandises
-          Les taxes dues à l’exportation
-          La protection de l’aloi des matériaux fabriqués.

Pour Binche on trouve des fabriques d’étoffes de laine, de chapeaux, de bas de laine, de peaux de chamois, de couteaux, ainsi que des tanneries.
Voyons en détail ces manufactures :

Fabriques d’étoffes de laine

Trois manufactures de petites étoffes de laine dite saye et carizée occupant dix métiers[3]
Exploitées depuis 1703, par un octroi du 12 mai 1703 contenant différents privilèges et à condition que chaque manufacturier devra avoir 3 outils battantes.
Elles emploient 75 ouvriers sujets de S.M. pour fabriquer et peigner la laine.
Elles peuvent faire annuellement 28.900 aunes d’étoffes susdites.
Le débit des dites étoffes se fait pour la plus forte partie dans la ville de Binche, étant à remarquer dans cette ville il y a quantité de tailleurs, fripiers qui font des habits, tant pour les hommes que les enfants pour lesquels ils emploient en doublure les dites serges, qu’on vient acheter chez eux journellement, le reste s'exporte sur Mons par passavants de ce bureau.
La matière première, qui est la laine, provient de Namur par acquit à caution du bureau principal de cette ville, et des villages circonvoisins du district de ce bureau tant par acquit à caution des bureaux de Fontaine- l'Evêque et Anderlues, que par certificats des gens de loi : ces manufactures peuvent employer annuellement environ 836 livres de laine filée.
L'on n'y emploie pas de teintures, les sayettes se faisant en blanc.
On sait uniquement que ces étoffes payent pour aller à Lobbes et Thuin, pays de Liège, le droit de 60e.
On plombe ces étoffes pour les différencier de celles venant de l'étranger.

Nota Bene. Il est à observer que les manufacturiers ci-dessus repris font peigner la quantité de 10.000 livres de laine lavée qu'ils tirent de Namur et des villages circonvoisins de ce district, comme il est dit article plus haut, dont ils emploient 836 livres de laine filée pour leurs manufactures et que le reste s'exporte par acquit à caution de ce bureau sur Mons, Leuze et Bruxelles.

Fabriques de chapeaux

Il y a 4 chapeliers, établis depuis très longtemps.
On emploie 72 ouvriers, sujets de S.M., y compris les maîtres.
Ils font annuellement environ 3.000 chapeaux communs de différentes qualités pour hommes et enfants.
Ces chapeaux se vendent dans la ville, aux foires de Soignies, Merbes-le-château, Beaumont, Braine-le-Comte et RœuIx: parfois aussi à Thuin, pays de Liège.
Les matières premières viennent d’Anvers et de Bruxelles par Mons.
Liège demande un droit de soixantième.
On marque les chapeaux faits dans la ville avec un cachet aux armes de la ville et on marque les chapeaux étrangers avec un cachet aux armes de S.M.

Fabrique de bas de laine.

Il y a un fabricateur de bas de laine, occupants trois métiers, installé depuis très longtemps, qui emploie 3 ouvriers, sujets de S.M, y compris le maître.
Il peut faire annuellement 400 paires de bas tant grands que cadets.
Il vend dans la ville la plupart des bas qu'i1 fait lui sont commandés par des particuliers.
La première matière qui est la laine provient de ce district par certificat des gens de loi, les teintures proviennent en partie de Binche et Mons, pour lesquelles i1 tire en petite quantité à la fois.
Liège demande droit de soixantième.

Fabriques de peaux de chamois

Il y a à Binche quatre chamoiseurs, établis depuis très longtemps et employant 73 ouvriers, sujets de S.M., y compris les maîtres.
Ils passent annuellement en chamois environ 29.000 peaux tant de veau que de mouton.
Le débit se fait en partie dans la vil1e de Binche, où on les fabrique en culottes, gants et autres ouvrages de bufetrier; le reste s'exporte sur Mons, Ath et Tournai par passavants de ce bureau, et quelque fois sur Thuin, Liège, par acquit à payement libre de sortie de ce bureau.
Les peaux viennent en partie de Liège (en ne payant pas de droits d'entrée et en partie de Charleroi, Fontaine-|l’Evêque, Gosselies, Trazegnies, Mons et autres lieux de ce district. Les huiles viennent d'Anvers et de Bruxelles.
Liège prend un  droit de soixantième.
Il n'existe pas de fabrique semblable dans la principauté de Liège.

Tisserands

Six tisserands occupants chacun un métier sont établis depuis très longtemps.
Ils ont chacun, un ouvrier. Ils peuvent faire annuellement environ 2.500 aunes de toiles.
Le débit des toiles se fait dans la ville de Binche et lieux circonvoisins de ce district, aux particuliers qui les font faire.
Le Lin provient de Bruxelles.
Liège demande un droit de soixantième

Tanneries

Deux tanneries; occupants chacune trois cuves sont ouvertes depuis très longtemps, elles emploient 4 ouvriers, trois sujets de S.M. et un Liégeois.
Elles peuvent tanner annuellement environ 460 cuirs de bœufs, vaches et chevaux et 60 peaux de veaux[4].
La plus grande partie de la production se vend dans cette ville, le reste à Mons et dans les villages voisins.
Les cuirs proviennent de ce district, parfois de Mons. Les écorces (2.400 livres) proviennent des bois de ce district, parfois de France ou de Liège en payant les droits d,'entrée.
Liège demande un droit de soixantième.

Fabriques de couteaux

Quatre couteliers travaillent à Binche depuis très longtemps, ils utilisent 6 ouvriers, sujets de S.M., y compris les maîtres.
Ils peuvent faire annuellement environ sept cent livres pesant de couteaux.
La plus grande partie part en France, une autre partie va à Mons et Tournai.
L'acier qu'ils emploient au nombre de 400 livres se tire par acquit de tonlieu de Bruxelles, et les cornes se tirent de Mons, par passavants, et quelquefois de France, dont la sortie est libre.
Liège demande un droit de soixantième et la France: 16 francs du cent pesant.
Il n'existe pas de pareille fabrique à Lobbes et Thuin, pays de Liège.

Il existe aussi à Battignies une usine :
Fabrique de couverture de laine

Il existe une fabricant de couvertures de bourre de laine occupant un métier depuis 3 mois, il occupe 2 ouvriers, sujets de S.M..
Cette usine fabrique 400 couvertures qui se vendent à Binche et à Mons.
La laine provient de Binche.
Liège demande un droit de soixantième.
On plombe ces couvertures aux armes de la ville de Binche, et les étrangères aux armes de S.M.



[1] A.G.R. C.F. 4392.
[2] Cet article est tiré de l’étude de Philippe Moureaux, La statistique industrielle dans les Pays-Bas autrichiens à l’époque de Marie-Thérèse, Bruxelles, Commission royale d’histoire, t.1, 1974
[3] En 1762 (C.F. 4281), on a noté : « N. Potier a 9 métiers, il consomme suivant son aveu 9.000 livres de laine annuellernent. Louis Durieux, deux métiers. Joseph Gaspar, un seul. Tous ces fabricateurs sont établis sans octrois, se fondant disent-ils sur un ancien privilège avant l'avènement du Duc de Bavière. Ils tirent leurs matières premières des provinces de Limbourg et de Namur, les quantités n'étant point limitées, ils en tirent suivant 1eur désir ». En 1763(C.F. 6133), on a précisé « 
Elle consiste en 14 métiers qui emploient chacun mile livres de laine lavée faisant 14.000 livres dont on fait environ 28.000 aunes d'étoffe Plus une manufacture octroyé en 1759 sous le titre de manufacture royale mais qui n'est pas en vigueur. Elle occupe seulement trois métiers qui emploient environ 3 mille livres de laine lavée. Ces manufactures occupent annuellement 35 ouvriers non compris les fileurs tous sujets de Sa Majesté »
[4] En 1763 (C.F. 6133), on a noté : « Deux tanneries qui peuvent tanner environ 1400 cuirs, année commune ».

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