Alain GRAUX
La rue Bard relie la rue de Mons
à la rue des Archers, elle changea souvent de dénomination :
RUE DES MASURES
Au XVIe s. c‘est indirectement
que l’on connaît le nom de cette rue qui n’était qu’un chemin bordé de quelques
petites maisons (masures).
Les demeures érigées sur la Haute chaussée (actuelle
avenue Charles Deliège) avaient des issues et/ou des jardins sur cette
voie :
Le 12-11-1556, devant les Jurés
St-Venant, Laigneau, Naret, de le Becq, Jehan Desmoullins, potier demeurant à
Hautrage, a donné irrévocablement à Jeannette, Barbe et Catherine Desmoulins,
ses sœurs germaines et à Philipotte Desmoulin fille de feu Jehan Desmoulins son
père, et de Judith le Flameng sa seconde femme, une grange et jardin qu’il a près du marché aux bêtes, tenant à la rue
des Masures, et à la rue allant au Jardin des Archers, à Georges de
Sars et à la cense de Melyon.[1]
Le 3-4-1570, Catherine du Trieu
veuve de Jehan Escouillefort demeurant à Binche, s’est fait morte au profit de
Gilles Escouillefort, le fils demeuré de son feu mari, lui cédant une maison
gisant à front de la Haulte Cauchie ,
ayant issue rue des Masures [2].
Le 10-4-1572 « On
fait savoir que sur remontrance faite par Marie Lambert veuve de Mathieu
Arthois, accompagnée de Andrieu Sebille, mari de Jehenne Arthois et Guillaume
de Gricourt le Jeune, à cause de la génération a lui demeurée de feu Catherine
Arthois qui fut sa seconde femme, ses beaux-frères, aussi de Guillaume de
Gricourt l’aîné et Christophe Blommart ayant épousé Gilette de Gricourt, ses oncles, comme la dite Marie Lambert était
héritière viagère et les enfants qu’elle eut de son feu mari Mathieu Arthois, tels que Jehan, Anthoine et
Nicolas Arthois sont propriétaires d’une maison étables, jardin gisant à front
de la Haulte Cauchie ,
qui porte l’enseigne du Noir aigle, ayant issue sur la rue des Masures,
tenant à l’héritaige Nicolas Leurent qui fut à Jehan de la Bricq et d’autre part à
l’héritage Jehan Coppeye qui fut à Philippe Desmoulins. Comme cet héritage
nécessite de grands frais de réparations et qu’il est chargé de lourdes rentes,
la dite Marie Lambert et ses enfants ont requis de le mettre à rente par criée »
[3].
Le 7-8-1572, la maison étable,
cour et jardin qui porte l’enseigne le
Noir Aigle, « gisant. à front de la Haulte Cauchie , ayant issue sur la rue des Masures,
tenant d’un côté à l’héritage Nicolas Leurent qui fut à Jehan Labricq, d’autre
part à l’héritage de Jehan Coppeye qui fut à Philippe Desmoulins, est demeurée
à nouvelle rente selon l’ancienne loi le 7-8-1572 à Andrieu le Cocq au prix de 70 L . 12 s. ». Le
25-8-1573, le partage des rentes dues sur ce bâtiment se fait par les jurés
Bauduin Deppe, Godefroid de Trahegnies, Jehan Houssart, Me Jaspar Diepenbecq,
Nicolas du Trieu et Cornille Ghobert. ».
Parmi les rentiers :
- Les héritiers Christophe de
Pittepan et la veuve Jehan de le Tenre, par achat fait par elle à Jehan Vignon
qui fut le fils de feu Catherine de Pitpan,
demandent 10 L .
6 s.
- Guillaume Prévost à cause de
“ la cassine ” de Jacqueline Hoston sa femme [4].
Le 1-7-1604 « On fait savoir que Charles de la Vigne , époux Aliénor Dor,
bourgeois de la Ville
de Mons, est comparu devant les jurés pour faire plainte contre Jacques Bary
mari de Marie Dor, son beau-frère, même contre Catherine Doret veuve Louys Dor
et contre Jean Galliot mari à Marie Doret, sœurs des dits Doret, afin d’avoir
sa part de deux pièces d’héritage gisant à Binche qui furent à Pierre
Doret leur frère et beau-frère, soit une maison à front de la
Haulte Cauchie , tenant à Louys Doret et à Jacques Lemaire
et à une étable gisant à la rue des Masures, pour que le dit Charles de la Vigne puisse avoir au titre
de sa femme une portion de ¼ en indivis, le dit Jaques de Bary ¼, Doret frère
et sœurs et Jean Galliot pour les 2/4 restant, comme le bien est impartageable,
il demande une mise en arrentement » [5].
27-1-1605, Aldegonde Reumont
veuve de Zacharie Regnier, grand-mère du côté paternel des enfants délaissés
par Jehan Regnier et Waudrud de le Fontaine, à savoir Jehenne, Catherine,
Waudru, Marie, Aldegonde et Isabeau Regnier, sœurs et Jehan Bouton mari Jehenne
Regnier, bel-oncle de ces enfants et François de le Fontaine et Mathieu
Blondeau oncle et bel-oncle du côté maternel, tous résidant à Binche, requérant
des jurés de garder et préserver de ruine l’héritage et propriété d’une maison,
chambre étable et jardin appartenant aux dits enfants sis à front de la Haute-Chaussée
et par derrière à la rue des Masures.
La mise en arrentement public se
fit le 27-1-1605 [6].
En 1669, Gabriel du Trieu doit
une rente « sur sa maison faisant
coing à la rue des Masures, tenant à luy mesme de tous les costés, à l’opposite
du puich de la Callerie »
[7].
RUE DU MARCHE AUX BÊTES
Bien que l’appellation « rue
des Masures » soit encore employée, celle de « Marché aux Bêtes » la supplante peu
à peu.
Le 2-8-1546, devant les jurés
Trahegnies, Troye, Gilbart et
Le 30-12-1594, Marguerite Cambier
veuve Bertrand Sebille, demeurant à Binche, émancipe son fils Philippe Sebille
âgé de 21 ans et sa fille Charlotte Sebille âgée de 28 ans.
Le même jour, Marguerite Cambier
s’est fait morte au profit de ses dits enfants et de Jacques, Ursmer, Adrien,
Anne, Catherine et Marguerite Sebille aussi ses enfants, leur laissant une
maison à deux chambres, gisant au « Marché aux Bestes » tenant à
Pierre Leclercq et à la veuve Quintin Poirette.
Cet acte réalisé, Philippe et
Charlotte Sebille se portant fort pour leurs frères et sœurs mineurs, ont vendu
cette maison à Quintin Poirette, laboureur vivant présentement près des
Faubourgs de Nivelles [9].
Le 16-3-1712, Charles Laloyaux
curé de Merbes-le-Château vend à son frère Hugues une rente due sur «une maison , grange, étable, cour et jardin,
gisant sur le marché aux bêtes, tenant aux rues par derrière » [10].
RUE DU VIEUX MARCHE AUX BÊTES
Le 6-7-1606, devant les jurés L.
Moreau, Gilles Tahon, Philippe de le Motte et Remy le Voet, se passe un
arrentement public :
« Pour la maison, grange etc. et héritage qui fut Bertrand Sebille qu’on
dist le Vieil hostel de Herlaimont sis dans la rue du Vieux Marché aux Bestes,
aussi pour la masure sise à l’opposé, demeurés à Philippe Sebille et consorts,
tenant à la veuve et hoirs Ursmer de le Tenre, on fait savoir que Philippe
Sebille fait plainte tant contre les dits Jacques, Ursmer, Anne et Marguerite
Sebille, frères et sœurs que contre Gilles Tahon et Remy le Voet, jurés de
Binche à raison de la minorité de Andrieu Sebille aussi un frère, au sujet de
2/11e à titre de son patrimoine et d’1/11e
à titre de son achat et contre les dits Sebille pour les autres 8/11e »
En 1705, on cite encore « De
M. Bard sur sa maison et jardin faisant coing au Vieux marché des Bestes,
tenant à Louis Sebille »[12], de
là vient le nom non officiel de « ruwe Bard »
Le cahier de cheminées de l’année
1715, déposé aux Archives communales de la Ville de Binche ne renseigne dans cette rue aucune
maison[13].
Concurremment à l’appellation
« Marché aux Bêtes », celle de « Marché aux chevaux »
commence à être employée.
Le plan de Binche de
1786 nous reflète la situation juste avant la domination
française
Le recensement de l’an V de la
république renseigne neuf habitations cette époque :
-
Le couple de journaliers, Antoine Cambier et Marie-Thérèse
Hirsoux.
-
Le couple de journaliers Philippe Bailly et Tondeur
Marie-Joseph et leurs trois enfants.
-
La veuve Hiacinthe Boussart, journalière.
-
Le couple de journaliers Félix Martin et Baudoux
Marie-Philippe et leur fille.
-
La veuve Joseph Dartevelle, journalière, et ses deux
enfants.
-
Le couple de journaliers Barthélémy Mortier et Amélie
Delmotte.
-
Le ferronnier Michel Canivez, sa femme Lambertine
Ramboux et leurs deux enfants.
-
Le tailleur Pierre Delcourt
-
Le cordonnier André Delcourt et son épouse Marie-Thérèse
Depret.
La rue commence à être plus bâtie
et à être pavée, de là vient le nom de « rue Neuve » nom qui sera
officialisé par le Conseil communal du 26-10-1837 :
« La rue du Vieux marché aux bêtes, et depuis marché aux chevaux portera
le nom de rue Neuve » [14].
En 1863, le Conseil communal
décide d’installer la distribution d’eau potable à domicile, c’est à cette
époque que disparurent les fontaines publiques dans la ville
La première liste des abonnés au
service des eaux nous renseigne sur les personnes vivant dans la rue Neuve et
leurs propriétaires, il y a quatorze habitations qui sont reliées a la distribution
d’eau :
-
Lambot Ferdinand, propriétaire.
-
Laurent Ludovic, propriétaire, il a 11 locataires :
o
Déom Xavier
o
Fleurus Joseph
o
Malissart Charles
o
Sauvenière Philippe
o
Empain Léandre
o
Veuve Empain
o
Jenico Auguste
o
Veuve Simon
o
Rochez Alexis
o
Veuve Blondiau
o
Picart Louis
-
Legrand Désiré, propriétaire, Déom son locataire.
-
Sebille François, propriétaire, son frère Félix,
locataire.
Le plan Popp nous situe les
parcelles et leurs propriétaires :
Côté rue de la Régence , de la rue des
Archers à la rue de Mons [15]:
Parcelle 806c Navez Adolphe, tailleur. Maison
807c Bailly Joseph, cordonnier Maison
808b Colman André, tailleur Maison
809c Milcamps Flore, négociante Maison
810b Labrique Victorien, menuisier Maison
812 Legrand Adrien-Désiré, marchand Maison
813b Idem Maison
814g Ghisbain Léopold, cultivateur à Buvrinnes Maison
814e Idem Maison
817a Laurent Ludovic Maison
818b Roulez Eugène, marchand de grains Maison
818a Idem Maison
823
Rucloux Dorothée, marchande Maison
824c Hupin Ursmer, marchand Maison
824d Idem Maison
825b Hecq Henri, propriétaire à Battignies Magasin
825a Hecq Pélagie, propriétaire Magasin
833a Blairon Charles, marchand de vins Jardin
832a Idem Maison
842a Sebille Sophie et Henriette, rentières Jardin
843
Sebille-Pollet, marchand tanneur
844
Idem
846a Idem
Côté Grand-Rue, de la rue de Mons
à la rue des Archers :
Parcelle 771 Ferain Valentin et Rupert, boulangers Maison
771b Boussart-Bourgeois Ursmer, menuisier Maison
772a Demaret et François, négociants Jardin
773a Lambot Ferdinand, propriétaire Maison
786b Hecq Henri, propriétaire à Battignies Cour
786a Hecq Pélagie, propriétaire Jardin
787a à d Laurent Ludovic Maisons
789a Babusiau Théodore et Eugénie, propriétairesMaison
794a Laurent Ludovic Maison
794b Idem Maison
795a Milcamps Flore, négociante Maison
805 Laurent Ludovic Maison
803 Lambot Jean-Baptiste, propriétaire Maison
Il y a donc 29 maisons, détenues
en grande partie par la bourgeoisie marchande de la ville, seuls, quelques
propriétaires demeurent dans leur maison dans la rue.
La majorité des habitations sont
louées à des ouvriers.
A partir de 1885, on trouve des
traces de la construction ou de la transformation de quelques maisons :
Flore Milcamps, rentière, déjà
citée plus haut est autorisée à élever 3 maisons le 10-6-1885.
Alexandre Navez, marbrier,
Grand-Rue est autorisé à transformer deux demeures en une maison le 5-8-1888.
Le 20-11-1890, Cléophas
Deprez-Bailly peut modifier une écurie en magasin.
Le 30-9-1892, Modeste Mottoule peut
faire bâtir une maison, il en est de même pour Zéphirin Debaise, le 20-6-1893.
Paul Lejeune fait exhausser sa
maison de 50 cm
le 22-6-1898.
Louis Boussart est autorisé à
bâtir une maison le 24-2-1894; puis une autre le 14-7-1897.
Le 14-7-1897, Paul Dartevelle
reçoit lui aussi l’autorisation d’en bâtir une.
La même année, le 21 juillet
Joseph Bailly-Voituron peut faire bâtir
une maison.
Le 2-8-1912, La veuve Deprez
(Bailly Eudoxie) est autorisée à démolir une remise pour y faire bâtir une
maison.
Juste avant la première guerre
mondiale, la rue était habitée comme suit :
Côté impair :
N° 1 Gilson-Sion
Alfred, mouleur en sable
3 Serrure-Trempont Joseph,
ânier
et Serrure Alfred, cordonnier
5 Babusiaux-Serrure Victor, forgeron, et Navez-Navez Hubert, cordonnier
15 Boussart-Lelarge Louis-Ursmer, menuisier
27 Carena-Meunier Ernest, forgeron
31 Hamaide-Debaise Auguste, tailleur
37 Picart-Carlier Louis, journalier
47 Chevalier-Gilson Adolphe, maçon
53 Degré-Piquet Henri, journalier
59 Hannecart Pierre, journalier
Côté pair
N° 6 Couturier-Delattre
Maurice, ajusteur, et Delhalle-Couturier Emile,
coupeur de chaussures
coupeur de chaussures
10
Deliège-Bailly Joseph, tailleur
20
Bizoux Alfred-Armand, tailleur et Godefroid-Hamaide Ursmer, cordonnier
26 Baudoux-Pruniaux Auguste, cordonnier
28 Lavaux-Piret Evance dit Arthur, tailleur et Lavaux-Navez Ernest, cordonnier
30 Baudoux-Hache Gustave, cordonnier
32 Navez-Gilson Henri, cordonnier
34 Godefroid-Baudoux Joseph, tailleur
38 Picart-Francq Louis-Oscar, tailleur
40 Chevalier-Dassonville Emile, tailleur
46 Leghait-Serrure Gustave, tailleur
48 Mauroy-Berthet Léopold, menuisier
50 Navez-Salm Alfred-Gustave, tailleur
54 Bailly-Boudart, Evangéliste, tailleur
56 Gressier-Petit Joseph, cordonnier
60 Stalon-Ghislain Ursmar, tailleur
62 Navez-Debaise Georges, tailleu
64 Delhalle-Lelong Adrien, tailleur et Lelong-Devergnies Joseph, jardinier
66
Hannecart-Bara Bernard, tailleur
A cette époque, c’est une rue
essentiellement peuplée de quelques artisans et
surtout d’ouvriers tailleurs et de cordonniers. Cette artère reflète la
vie économique de la ville.
Par une décision du Conseil
communa1 prise le 14-3-1989, la rue
Neuve fut renommée rue Bard, son antique appellation populaire.
[1] Embrefs reg.3, f° 66 v°.
[2] Embrefs, reg. 4 , f° 68.
[3] Criées, reg. 2 .
[4] Rentes, reg. 1 , f° 113.
[5] Criées, reg. 3.
[6] Criées reg. 3.
[8] Embrefs, reg. 1 f° 88.
[9] Embrefs, reg. 5, f° 67.
[10] A.E.M. Notariat 15
[11] Criées reg. 3.
[12] A.V.B. 11-00-01-65.
[14] A.V.B. 01-00-01-9/124
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