Les rapports entre Binche et l’Ommegang
Alain GRAUX
Première page de la lettre harangue (Archives de l’Etat à Vienne)
Lors de la participation de l’Ordre de Marie de
Hongrie à l’Ommegang de Bruxelles, nous avons été interpelés par des
spectateurs qui ne comprenaient pas pourquoi les Binchois y participaient.
Par un
simple rappel des faits historiques, nous allons tenter d’y répondre.
Déjà en 1543, l’empereur Charles-Quint, malade,
quelque peu désabusé, prépare son abdication et se préoccupe de la formation
politique de son fils, l’infant Philippe afin qu’il lui succède.
En octobre 1548, ce dernier quitte l’Espagne,
accompagné des dignitaires civils et ecclésiastiques, afin de connaître et de
se faire reconnaître comme digne successeur de son père. Ce voyage à la fois
maritime, depuis Barcelone, et
terrestre, lui fera longer les côtes méditerranéennes de la France,
traverser l’Italie depuis Gênes, par Milan, Mantoue et trente, le Tyrol par le
col du Brenner et Innsbruck, l’Allemagne par Munich, Augsbourg, Heidelberg et
Spire, et le Luxembourg par la Sarre pour aboutir aux Pays de par deçà.
Arrivé dans nos régions par l’Ardenne, il
arrive à Tervueren le 1er avril 1549 où l’accueille sa tante, Marie
de Hongrie, régente des Pays-Bas espagnols.
Ce voyage prend des airs de triomphe, la
réception de l’infant permet d’exalter la gloire de son père. Mais le but
premier de ce voyage est la préparation de l’abdication de l’empereur et
l’accession au trône de Philippe. Dans chaque chef-lieu des dix-sept
principautés formant les Pays-Bas, le prince prête serment de fidélité aux
libertés
Toutes ces étapes s’accompagnent de bals,
banquets, tournois et mille festivités. Parmi ces divertissements, notons le
tournoi du 5 mai 1549, organisé par les
édiles bruxellois, suivi d’un banquet à l’hôtel de ville. La famille impériale
est présente, à côté de l’empereur, ses sœurs Eléonore, reine douairière de
France, et Marie de Hongrie et l’infant Philippe.
A l’issue du banquet se présente un
« chevalier errant et aventureux » qui revient dit-il d’un pays où
sévissent l’enchanteur Norabroc et ses maléfices[1],
on lui permet d’approcher la table impériale. Il tombe à genoux et présente à
l’empereur une lettre de plusieurs feuillets, Charles reçoit la lettre et fait
mine d’en prendre connaissance. Il prie un des hérauts d’armes de la lire à haute
voix.
La lettre annonce le jeu de l’aventure de
l’épée qui se déroulera à Binche les dimanches 25 et lundi 26 août 1549.
L’empereur annonce qu’il assistera aux festivités binchoises et autorise le
chevalier à apposer sur la porte du palais du Coudenberg, le cartel[2]
qu’il a apporté avec lui.
Les fêtes dites les triomphes de Binche,
organisées du 22 au 31 août 1549, par la régente Marie de Hongrie, se
présentent comme une exaltation aristocratique de la grandeur du souverain, de
sa puissance politique qui frappera les imaginations en rappelant la majesté
impériale et l’étendue d’une souveraineté, au rayonnement international
exceptionnel d’un prince dont « le soleil ne se couche jamais sur ses
états »
La fête est chevaleresque, elle
est réservée à une élite sociale et répond à d’évidentes fins politiques
c.-à-d. faciliter l’accession au trône de l’Infant d’Espagne et de préparer la
retraite de l’empereur des affaires de ses états.
[1] L’idée
du chevalier errant est issue des romans de chevalerie, cherchant l’aventure
afin de venger la veuve et l’orphelin, tel que le conçoit le roman où Amadis,
héros chevaleresque, sera le personnage fil conducteur des fêtes organisées à
Binche
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