L’Émigration française à
Binche SOUS LA RÉVOLUTION FRANCAISE
Alain GRAUX
Entre 1789 et 1800, environ 140 000 personnes
vont quitter le territoire français, en raison des troubles révolutionnaires.
Dès le 14 juillet date de la prise de la Bastille : ces émigrés,
tenants de la monarchie et du pouvoir absolu, craignaient l'effondrement de
celui-ci. La plupart d'entre eux sont donc nobles, prélats ou riches bourgeois.
Certains d'entre eux émigrent pour combattre la Révolution de l’extérieur,
d'autres pour se soustraire à ses rigueurs.
Si en 1789 et 1790, il était relativement
aisé d’emmener ses bagages, ses biens,
son argenterie, son or, cela devint beaucoup plus compliqué à partir de 1791.
Les autorités révolutionnaires se
rendent compte qu'il s'agit d'une fuite des capitaux qui peut s'avérer néfaste
à l'économie nationale si elle continue. De plus, les émigrés devenaient menaçants
et formaient de grands rassemblements à la frontière. Ils menaçaient ceux qui
ne favorisaient pas leur entreprise de la confiscation de leurs biens et mêmes
de supplices. Devant ce mouvement qui s’accentuait de jour en jour, Louis XVI fut obligé de prendre des mesures
pour l’enrayer.
Tout un arsenal de mesures est
pris pour enrayer cette émigration
Le 31 octobre 1791, des lois sont
donc votées pour restreindre le pouvoir de mobilité des possibles émigrants et,
l'Assemblée législative, par un décret, ordonne aux émigrés de rentrer avant le
1er janvier de l'année suivante sous peine d’être déclarés rebelles et déchus
de leurs droits. 1 janvier 1792 : peine de mort contre les émigrés qui
n'auraient pas déposé les armes[.
]Un second décret rétablit
l'utilisation du passeport (Décret du 1er février 1792).
Le 15 août 1792, la Législative,
sur la proposition de Merlin de Thionville, décréta que les
femmes et les enfants des émigrés, ainsi que Louis XVI, seraient considérés
comme otages.
Le 12 septembre 1792, on décrète
la radiation de l’état des rentes et des pensions.
Le 13 septembre 1792 : décret appliquant
aux émigrés la loi du 8 avril précédent relatif au séquestre de leurs biens.
Le 14 septembre 1792 : est votée
une loi sur le divorce. L’émigration est considérée comme une cause de divorce.
Le 7 octobre 1792 : les émigrés
sont livrés à l’exécuteur dans les vingt-quatre heures de leur jugement.
Le 23 octobre 1792 : les émigrés
sont bannis à perpétuité du territoire de la République et ceux qui
rentreraient sont punis de mort ;
Les émigrés se réfugièrent dans
presque tous les pays de l’Europe, mais principalement en Allemagne, en Autriche, en Russie,
en Angleterre, à Nice, à Turin, à Coblence.
Brissot, alors chef du
parti girondin,
distingua les émigrés en trois classes : 1° les princes et les chefs; 2° les
fonctionnaires publics qui abandonnaient leurs postes et leur pays et
cherchaient à embaucher leurs collègues; 3° les simples particuliers qui, par
crainte des mouvements populaires ou par simple mécontentement politique, avaient
passé la frontière. C'étaient les seuls auxquels on pouvait témoigner quelque
indulgence.
Mais si de nombreuses études en
parlent, on oublie souvent les émigrés qui fuirent en Belgique.
Nous connaissons, grâce à un
document déposé aux Archives de la Ville de Binche[1], les
émigrés qui s’établirent à Binche de 1792 à 1794.
Les émigrés de la noblesse
Une très forte émigration de la
noblesse dans notre ville provient
principalement de la région du Poitou :
Jean et Honnoré Fillion, chevaliers, de Poitiers
Philippe de Brissac, gentilhomme,
de Saint-Loup.
Charles de Raze, gentilhomme de
Poitiers
Hilaire de Cressac, rentier de
Poitiers.
M. Espart de Bessay, gentilhomme,
de Saint-Martin
Pierre-René Thibaut, gentilhomme
d’Angers
Louis-Gabriel et Antoine de la Porte, gentilshommes, de
Poitiers.
Louis-Joseph La Touche,
chevalier, de Saint-Pierre-en Poitou.
M. Savate de Genouillet,
gentilhomme de Poitiers.
Le chevalier de Saint-Vincent,
officier, de Letanad.
François Constant, chevalier, de
Poitiers.
Louis-François Dupuis,
gentilhomme, de Pont-de-l’Ain.
Louis le Carlier, de Velad.
Célestin Tralbot, chevalier,
venant de Champagne.
Jacques de Clinchamps,
gentilhomme de Beaume-en-Vicomté.
Mr Marie de Fumé, chevalier, de
Poitiers.
Charles de Bocquillon, chevalier,
de Bressée.
Pierre Masureau, gentilhomme, de
Vitray
Paul Boynot, gentilhomme, de
Poitiers.
François Fouchiers, gentilhomme
de Thouars
Le comte de Diversay, de Poitiers
Joseph-Gustave de Diversay,
chevalier, de Poitiers
Charles de Benade, gentilhomme,
de Civray
François Tavaux de Morthemé,
gentilhomme, de Poitiers
Barthélémy Talons, gentilhomme
d’Angers.
Saint-Garreau de Tralbenet,
gentilhomme de Chotain.
Philippe de Guillon, gentilhomme
de Milau
Pierre Céres, gentilhomme de la
Guadeloupe.
Il y a des bourgeois, signalés émigrés français :
Jean Govillon, chapelier de
Malasson-en Bourbonnais
M. du Temple, de Valen en Poitou
Jean-Eloi Proneveu, de Chinon
Jean Charles, marchand de Derbis
en Savoie
Jen La Branche, commissionnaire,
de Poitiers
Claude Macullet, commissionnaire,
de Thouars
Antoine Chanvre, d’Epernay.
Jean-François Choquin, rentier,
de Poitiers
Jean Audran, négociant, de Riom
Alexandre Babinet, négociant de
Poitiers
Jacques Liénard, marchand, de
Sologne
Thomas Lejuste, de Marpent.
On trouve aussi quelques religieux :
Pierre-Louis Berteau, prêtre, de
Maubeuge.
Alexandre Meurin, carme, de Lille
Jean-Baptiste Balasse, prêtre, de
Valenciennes (chanoine de Binche).
Eudore Willier, prêtre, de Roylux
M. Bonneterre, curé, de la
Vaquerette
Etienne Dheneselle, chanoine, de
Maudrepuis
Il y deux déserteurs français:
Henri Ferinard, de Denain
Pierre-Louis Disch, de Bordeaux.
On ne sait exactement jusqu’à
quand ces émigrés restèrent dans notre ville, ce qui est sûr, c’est que le 21
avril 1794, une ordonnance des jurés de Binche les oblige à quitter la
ville :
« Les François émigrés retirés en cette ville se trouvant dans
l’obligation de se retirer à cinq lieues des frontières françaises ensuitte de
l’ordonnance de son excellence le ministre plénipotentiaire, comte Metternich,
en cinq de ce mois, convenant à cet effet qu’ils soient munis de passeports et
acte de bonne conduite pour se retirer sans embarras où ils jugeront convenir.
Conclud d’autoriser notre greffier, l’avocat Debuisseret, de leur
délivrer ces actes parmi l’attestation des bourgeois où ils sont logés ».
Il était temps pour eux de la
quitter car le Hainaut fut repris par les Français en juin 1794.
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