L’ANCIEN MUSEE COMMUNAL DE BINCHE
Alain GRAUX
Le musée de l’école moyenne
L’idée de créer un musée historique de la ville de
Binche fut émise au Conseil communal par Alfred Dumont, elle fut tout de suite
adoptée.
Une affiche
fut placardée en ville, elle annonçait :
Ville de Binche.
Création d’un musée communal.
Le Collège des bourgmestre et échevins a l’honneur
d’informer le public que par
délibération du 22 août 1895, le Conseil communal
a décidé la création d’un musée communal en cette ville.
Ce musée établi provisoirement dans
une salle de l’école moyenne, est
destiné à recevoir tous les objets anciens intéressant,
à un titre quelconque, notre cité et ses environs, tels que pierres sculptées, meubles, ancienne coutellerie de Binche,
dentelles , livres édités en
notre ville etc.
Les dons sont reçus avec
reconnaissance. Une inscription appliquée
sur chaque objet rappellera les noms des donateurs.
Le cas échéant, l’Administration communale entrera en négociations
avec les propriétaires pour l’achat d’objets de valeur.
Le musée
fut installé sous les combles de l’école moyenne, au troisième étage, l’entrée
se faisait par le grand escalier de pierre situé au centre du bâtiment.
Le Collège
échevinal de 1896[1]
signale que de nombreux dons sont parvenus à l’Administration communale,
parmi eux, beaucoup présentent pour
notre histoire locale, un réel intérêt . Ils garnissent toute une salle de
l’école moyenne. Il propose de publier dans le rapport de l’année suivante, la
liste des objets avec les noms des donateurs.
Il
précise : « Une autre salle est remplie des objets trouvés au cours
des fouilles pratiquées dans une partie du parc. On remarque parmi ceux-ci des
serrures, clefs, pentures, etc. en fer forgé d’un beau travail et surtout un
très grand nombre de poteries émaillées d’un dessin remarquable. Un rapport
spécial sur le résultat des fouilles sera adressé par M. l’architecte Saintenoy
et nous nous proposons de le publier ultérieurement ».
Le rapport
de l’année suivante, ne contient que ces lignes :
« Le
musée communal. Au cours de cette année, le musée s’est enrichi de dons assez
nombreux dont plusieurs offrent le plus sérieux intérêt. Nous devons ajourner à
l’année prochaine la publication de la liste des objets et les noms des
donateurs ».
Hélas, plus
rien ne parle du musée dans les années suivantes.
Une belle
collection de monnaies anciennes fut offerte par Auguste Pourbaix-Ravaux. Cet
éventail de pièces fut malheureusement volé pendant la guerre 1914-1918, les
grands écus d’argent et la moitié des pièces romaines disparurent[2].
Des
fouilles eurent lieu dans le parc en 1916 sous l’impulsion d’Eugène Derbaix, et
continuées jusqu’en 1926 sous la conduite de l’architecte Emile Devreux[3]. De nombreux fragments et panneaux en terre cuite vernissée représentant les sujets
les plus divers.
C’est dans
les locaux du musée qu’Auguste Derbaix et l’architecte communal Vital Gaillez
reconstituèrent des ensembles constituant des poêles utilisés dans le château
de Marie de Hongrie.
Le musée de la rue de la Pépinière
Au cours de
l’année 1925 les classes de l’école communale des garçons occupèrent les locaux
de l’ancien stand de tir de la garde civique de Binche situé rue de la
Pépinière. A la fin de l’année scolaire les classes partirent ailleurs et les
locaux furent attribués au musée communal. Pendant le cours de l’année 1926, le
service des travaux de la ville aménagea des vitrines et fit transporter tout
ce qu’il y avait de présentable provenant du musée de l’école moyenne, ainsi
qu’un tas d’archives.
Le rez-de-chaussée est affecté au musée et
l’étage reçoit les archives communales. Le 7 septembre 1928, Paul-Clovis Meurisse[4] est nommé
conservateur du musée et archiviste de la ville[5].
L’association
des « Amis du vieux Binche » recueille des objets pour le musée et en
assure la promotion. Mais le musée n’ouvrit ses portes qu’en…1934.
Les locaux
de l’école moyenne restèrent encombrés pendant de nombreuses années des débris
provenant des fouilles du château.
Les collections
Le musée
comprend deux pièces assez spacieuses, il comporte une belle collection de
tableaux installée en 1936 grâce aux démarches du Cercle auprès des autorités
communales de Mons, et qui obtinrent la garde de précieux souvenirs.
On
reconnaît les portraits du général André Boussart et de sa famille, son père,
officier de Marie-Thérèse d’Autriche; son frère, colonel de gendarmerie; son
oncle, officier hollandais.
Des
photographies des bourgmestres Gustave Wanderpepen et Alfred Pourbaix, et du Cercle Choral
Binchois.
Le manteau
de cheminée s’orne d’une belle boiserie ancienne et du vieux drapeau de
l’Harmonie, l’étendard du Cercle Choral est déployé à côté.
Un mur est
garni par une panoplie d’objets, au centre, le glaive de la justice, insigne du
lieutenant-prévôt, ainsi que des armes à feu, des sabres, des lances, une
arbalète. Ces armes avaient été léguées par le conseiller Fernand Derijcke.
Dans la
vitrine centrale figurent des livres anciens ainsi que l’exemplaire manuscrit
des coutumes de Binche avec le Grand sceau du roi d’Espagne. Le dessous est
occupé par quelques tronçons de poutres provenant de l’église Saint-Ursmer. A
proximité le coffre aux fermes de la ville de Binche est orné de
ferrures en équerre, de chaînes servant à fixer la lourde caisse en bois aux
murs de la tour de l’église, et de cinq serrures dont les clefs étaient
détenues par cinq jurés.
Sous
d’autres vitrines sont exposées des pièces de monnaies, des médailles, des
débris de verre coloriés provenant du palais de Marie de Hongrie, et divers
menus objets de l’histoire locale. On y expose aussi des fossiles extraits des
charbonnages voisins et de la sablière d’Epinois.
Une
curieuse collection de poids en pierre et mesures anciennes, tel les rasières
portant le B de Binche[6].
Dans cette
salle se trouve aussi le lourd couvercle du sarcophage d’un prêtre du XVe.
siècle, curieusement sculpté de lis, d’animaux du genre chacal ailés, et
d’inscriptions. Il fut offert par l’administration communale de
Mont-Sainte-Geneviève.
Quelques
pierres provenant de l’ancienne chapelle du Mont-Sarat.
Les pièces
maîtresses du musée sont les reconstitutions des poêles du palais de Binche. On
y découvre aussi de nombreuses taques en fonte, des crémaillères, etc.,
découvertes dans les fouilles du parc[7].
De nombreux
débris de poteries en grès de Bouffioulx, des pierres provenant de cheminées,
des chapiteaux, des enseignes telles celle du Gant d’or, la Clef d’or, le Cygne
de 1619. Des tuyaux provenant des canalisations amenant l’eau du Menu-Bois au
château.
Marius
Rochez fit don de souvenirs de guerre provenant des armées alliées et
allemandes. Ils sont étalés sur une table.
L’entrepreneur
Victor Lemaire-Magnies, de Bascoup fit don d’un moulin en grès provenant de
l’abbaye de l’Olive, ainsi que des pierres anciennes tels qu’un chapiteau
provenant de l’église de Carnières, une résille de fenêtre gothique provenant
d’une chapelle, un vieux poids de pierre de 10 Kg ., etc.
Le musée
montre aussi divers objets hétéroclites tel qu’un ancien vélo ayant appartenu à
M. Boulanger, directeur de la verrerie ; une bourse à pigeons servant pour
les concours, un rouet servant à filer ;
des objets congolais etc.
L’entrée du
musée était gratuite. Il était ouvert tous les dimanches et jours fériés de 10
à 12h. et de 14 à 17 h.[8].
P.C.
Meurisse démissionna pour raisons de santé le 17-5-1954, il fut remplacé par
Samuel Glotz en 1956.
Le musée
fut forcé de déménager pour laisser place à une école communale maternelle. La
collection lapidaire ainsi que les poêles Renaissance furent déposés dans les
caves Bette, ancien refuge de l’abbaye de Bonne-Espérance. Malheureusement
l’état du bâtiment et des déprédations ruinèrent les collections.
En 1980,
l’archiviste de la Ville, M.
Révelart déclarait [9]:
« Lorsque durant l’entre-deux
guerres les Caves Bette cessèrent d’abriter
les magasins Bette-Lebeau, grossiste en denrées coloniales, elles firent l’objet d’aménagements et furent transformées en Musée archéologique :
celui-ci constitué sous l’impulsion
de l’archiviste communal P.C. Meurisse accueillit diverses trouvailles recueillies un peu partout dans la
région : objets provenant
des fouilles du palais de Marie de Hongrie, chapiteaux
romans provenant de découvertes fortuites, collection de silex, plaques de cheminées, etc.. Un manque d’intérêt et des négligences des pouvoirs publics, puis un
retard apporté à la réalisation
d’un plan de restauration dressé par l’architecte Simon Brigode en 1970, le pillage des collections du musée lapidaire, puis l’effondrement des toitures, aboutirent
à une profonde dégradation
de l’ensemble.
La même
publication dit encore :
« Des actions furent entreprises sur le terrain, entre autres :
Le nettoyage du site et la
récupération des collections du musée lapidaire
ayant échappé au pillage et à la destruction ; en réalité bien peu de choses ».
Une partie
des collections du musée fut déposée dans les caves de l’actuel musée et
l’autre, dans les greniers du service des archives
Plus de
Vingt ans ont passé depuis cette désolante constatation, l’idée de faire
renaître le musée historique de la ville n’a toujours germé, les collections
croupissent dans les greniers bien que la ville ait fait appel dès 1995 à un
bureau de consultants en tourisme qui aboutit à la création d’un plan de
développement endogène de la ville de Binche et qui fut adopté à l’unanimité par le Conseil communal le 29-1-1996.
Cette
stratégie vise à faire du tourisme une activité économique reposant sur la
réalisation d’investissements pour la mise en valeur des remparts, du musée et
du cadre urbain.
[1]
A.V.B., Rapport sur
l’administration et la situation des affaires de la ville de Binche fait par le
Collège des bourgmestre et échevins en séance publique du Conseil communal,, Binche, 1896, éd. V.
Winance.
[3] E. DEVREUX, Les
châteaux de Binche, dans Congrès archéologique et historique de Mons, 1928, Frameries, 1930,
[9] M. REVELART, Une action de sauvegarde du patrimoine
historique et archéologique à Binche : l’étude et le sauvetage de l’ancien
refuge de Bonne-Espérance, dans Les Cahiers Binchois n°3, 1980, pp.
9-20.
[10]
Une photo prise par
G. Lebrun, représentant le musée lapidaire des Caves Bette avant son
abandon, figure dans le Cahier Binchois
n°3, p.32.
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