LE REMPART DE BON-SECOURS ET
L’ AMENAGEMENT DE SES ALENTOURS
Alain GRAUX
La partie Nord-Est de l’enceinte médiévale comprise entre
la porte de la Sauvenière et la porte de Bruxelles (Neuve-porte) s’appelle le
rempart de Bon-Secours. La portion de territoire longeant la muraille n’a pas
été bâtie comme les autres faubourgs, les nombreux débordements de la rivière la
Samme de ce côté de la ville y sont certainement pour quelque chose.
LES
ETABLISSEMENTS INDUSTRIELS
Très peu d’industries s’établirent à cet endroit, si ce
n’est au Faubourg de la Sauvenière, le long du Pavé de Charleroi, que nous
n’étudierons pas ici. Nous relèverons néanmoins la savonnerie Schmidt [1] qui
subit plusieurs inondations.
Une fabrique de Suif s’établit au milieu du XIXe s. Le
suif est une graisse fondue des animaux, elle sert en tannerie et à la
fabrication des chandelles.
Le plan Popp de Binche renseigne:
Section B, parcelle 904a bis: Fabrique de suif.
superficie 77a.
1 ca.
Elle appartient à Adrien Joseph Désiré Legrand, marchand à
Binche. L'Almanach du commerce et de l'industrie de 1867, désigne Désiré
Legrand comme cirier.
Le
1-10-1887, Léon Legrand demande l'autorisation de transférer dans une
dépendance de sa maison sise rue Notre-Dame, une petite fonderie de suif à feu
nu, sans travail du creton, avec appareil destiné à empêcher toute émanation,
telle qu'elle existe actuellement rempart de Bon Secours. Cette maison est
située rue Notre-Dame entre Armand Houssière et Hupin-Gallez, cadastrée B 253.
La députation permanente du Hainaut l'autorise le 30-12-1887 [2].
D’autres
petites industries s’établirent un peu plus loin sur le territoire de la
commune de Battignies, une blanchisserie [3] et un
moulin à vapeur [4]
L’HABITAT
Il n’existait dans ce faubourg que des habitations
ouvrières, peu ou pas de maisons bourgeoises. Cet habitat ouvrier était
immonde. A une Commission des logements ouvriers et une Commission médicale
locale, furent confiée la tâche d’inspecter et d’informer le Conseil communal
sur la situation hygiénique de la ville [5].
Le rapport du 14-3-1898 dit « En ce qui concerne le
rempart de Bon-secours, il y a là un pâté de masures, sans cours ni lieux
d’aisance, qui sont vraiment inassainissables et que l’hygiène communale
commande de faire disparaître le plus tôt possible. Deux maisons seront fermées
amiablement par le propriétaire, puis rachetées et démolies par la ville pour
le dégagement de l’ancienne enceinte fortifiée. Il en reste quatre, fermées et
à démolir.
A l’issue de la rue Carlo Mahy, nous trouvons une impasse
dite impasse Bouya, où s’échelonnent cinq masures branlantes sans issue ni cour
sur le derrière, le terrain contigu de ce côté appartient à un autre
propriétaire et sans amélioration possible. Elles sont desservies par une
latrine unique, tombant en ruines. L’eau stagne, croupissante, dans
l’impasse ».
Le rapport du 4-2-1898, signale : « Un cas de
mort par maladie infectieuse, tout récent, accentue encore les conditions
hygiéniques déplorables qui nous font désirer la disparition de cette impasse
par la fermeture des masures qui y sont situées et qui ne sont guère
assainissables ».
Ces maisons furent fermées par ordonnance du 7-8-1906.Ce n’est qu à partir de 1900 que l’on commença réellement à bâtir dans ce quartier de la ville :
Propriétaire
|
Nbre.
8
1
|
Parcelle
1
1
|
Demande
|
Autorisation
|
Jules
Delattre
|
1
|
03-08-1900
|
||
Louis
DelhayeBoudart
|
8
|
19-12-1900
|
||
Jules
Delattre
|
1
|
08-04-1907
|
23-04-1907
|
|
Nicolas Carlier-Lebrun
|
10
|
14-03-1890
|
22-08-1890
|
|
Léon
Dereume
|
1
|
09-09-1903
|
02-10-1903
|
|
Léon
Dereume
|
1
|
17-03-1903
|
22-03-1903
|
|
Joseph
Dassonville
|
1
|
27-07-1907
|
02-08-1907
|
|
Emile
Bailly-Boudart
|
1
|
C.148
|
16-05-1909
|
|
Jules
Delattre
|
1
|
24-04-1910
|
24-04-1910
|
|
Palmyre
Dutilleux
|
4
|
27-12-1910
|
||
Enoch
et Elie Deliège
|
2
|
D.168y
|
27-04-1911
|
|
Charles
Baudoux
|
1
|
05-03-1913
|
||
Jules
Carlier-Hupin
|
6
|
05-03-1913
|
||
Désiré
Delhaye-Babusiaux
|
1
|
12-12-1913
|
||
Jules
Deprez-Rousseau
|
2
|
10-06-1914
|
||
Jules
Pourtois-Fourmanois
|
1
|
10-06-1914
|
||
Léon
Dereume
|
1
|
26-11-1914
|
||
Ursmer
Godefroid dit Alexandre
|
1
|
26-11-1914
|
||
Gustave
Thirion
|
1
|
29-03-1914
|
||
Louis
Montreuil-Laigaux
|
1
|
17-11-1915
|
||
Hubert
Hirsoux
|
1
|
17-07-1925
|
Le 15-2-1890, la Ville projette de percer une rue
venant de la rue des Pastures et suivant le tracé de la ruelle dite de Carlo
Mahy. Cette ruelle suit le rempart de Bon-Secours et aboutit au sentier dit de
Binche situé sur la commune de Battignies[6]
Elle commence les démarches pour exproprier une
partie de la propriété de M. Deprez située à l’emplacement de l’ancienne
savonnerie, un jugement daté du 20-4-1890 du tribunal de Charleroi lui en donne
l’autorisation.
En 1896, le ministère des chemins de fer, des postes
et télégraphes, fit construire un hôtel des postes avec façade sur l'avenue
Wanderpepen et sur le rempart de Bon-Secours. Ce bâtiment fut construit sur les
plans de l'architecte Janlet.
Le 6-2-1897, le conseil communal de Binche décide
"Considérant que le dégagement de l'hôtel des
postes implique la création d'une rue longeant le bâtiment.
Considérant que cette nouvelle artère rend inutile la
rue projetée sur l'emplacement de la ruelle de Carlo Mahy.
Décide d'abandonner le projet exproprier une partie
de la maison de M. Deprez en vue de l'élargissement de la ruelle de Carlo Mahy [7].
Le 29-5-1897, le Conseil communal adopte le projet de
l'architecte Charbonnelle pour l'alignement d'une rue partant du nouvel hôtel
des postes passant par le quartier Carlo Mahy
pour rejoindre la rue des Pastures [8]
Le 4-8-1897, le Conseil décide l'expropriation de la
maison du boucher Nicolas Debrichy [9].
Le 21-4-1899 [10], le Conseil
communal décide d'acquérir 9 ares de terrain appartenant à Augustin
Dassonville, attenant au rempart de Bon Secours, vu le plan d'expropriation de
diverses propriétés entourant le rempart et pour cause d'utilité publique
rendue possible par l'arrêté royal du 14-6-1897.
Tout ce processus d’expropriation mit un certain temps afin
qu’il se réalise, vers 1920, les abords de la poste sont pavés et un escalier
est construit entre la nouvelle rue de Carlo Mahy et le dessus du rempart de
Bon-Secours, mais la maison de Nicolas Debrichy n’est toujours pas expropriée
comme le montre la carte postale ci-après.
Vers l952, le détournement de la rivière la Samme empêcha les continuelles inondations du quartier.
La société de tir à l’arc « Les Archers du
château » y possède son Berceau. Les installations de ce groupement
étaient d’abord situés place du Centenaire, se déplacèrent ensuite au cabaret
Jules Delhalle, place de Battignies, et ensuite successivement chez Auguste
Boudart, puis chez Paul François, rue du Moulin, pour s’établir définitivement
sur un terrain appartenant à la ville, qui
longe le rempart et qui fut aménagé sous le mayorat de Charles Deliège
en même temps qu’un square devenu de nos jours le square des « Scriveux
binchous » par décision du Collège communal du 30 mars 1998.
LA RESTAURATION DES REMPARTS
Le 28-4-1994, le Conseil
communal, sous la présidence de Armand Leroy a arrêté le contrat-programme de
développement touristique qui prévoit la restauration des remparts. Lors d’une
réunion d’information précédant la séance publique, l’architecte Moulin
présenta les grandes lignes du projet, on note à propos du rempart de
Bon-Secours que dans la tour des Arquebusiers de Saint-Laurent, un amphithéâtre
sera aménagé. Pour les deux tours suivantes méconnues du grand public, les
masses de béton qui les cachaient seront détruites pour faire apparaître les meurtrières.
Les fondations du rempart seront laissées à nu pour laisser voir comment les
fortifications furent bâties. Un plan d’eau sera creusé à la place du square
actuel situé à proximité de la poste [11].
Une étude théorique préalable
réalisée par Michel de Waha révéla qu’une des tours est antérieure au rempart
proprement dit. Cette tour est pleine, il s’agissait d’un poste d’observation [12]
Les fouilles réalisées par la
région wallonne à partir du 1er juin1995 sous la conduite de l’archéologue Didier
Dehon et grâce aux subsides de « l’objectif 1 » révèlent
que le rempart de Bon-Secours réalisé par la technique de construction
de muraille sur arcs de décharge et où des restes importants de terrées
intérieures médiévales permettant d’accéder au sommet de défense ont laissé des
vestiges. La muraille était d’un type de défense actif à deux niveaux de
défense et non de type passif comme on l’a souvent cru [13].
Une restauration importante s’en
suivit réalisée par l’entreprise liégeoise « Réforme et Nizet ».
[1] A. GRAUX Les savonneries binchoises, dans bulletin S.A.A.M.B., mars 1995,
pp. 8-9.
[3] A. GRAUX, Teintureries et blanchisseries binchoises, dans bulletin S.A.A.M.B janvier 2000, p.6-8
[4] A.
GRAUX, Binche des métiers et des hommes (la meunerie) dans Les
Cahiers Binchois, n° 16, 1998, pp. 36-37.
[6] A.V.B.
01-00-01-21.
[7] A.V.B.
01-00-01-21.
[8] A.V.B.
01-00-01-21.
[9] A.V.B.
01-00-01-21.
[10] A.V.B.
01-00-01-21.
[11] S. BOUDART, Un rendez-vous historique pour la
ville de Binche. Le conseil communal a voté la restauration des remparts
(Coût : 260 milions) dans Le Peuple 28-4-1994, p. 11.
[12] C. BLAIVIE, Les remparts de Binche comme les
pyramides d’Egypte. Huit « fouilleurs » à la recherche de nos
ancêtres, dans Le peuple, 10-6-1995.
[13] D. DEHON, Des campagnes de fouilles archéologiques
préalables à la restauration des remparts de la ville de Binche, dans El
Mouchon d’Aunia, n° 4, 1999, p.3-5.
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