dimanche 4 décembre 2016

Les confettis


A PROPOS DU CONFETTI

                                                                                                                                    Alain GRAUX


Les confettis sont des petits morceaux de papier qu'on lance lors de certaines fêtes, célébrations ou évènements artistiques. Les confettis sont généralement de différentes couleurs

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Origine et orthographe du mot

À l'origine, les confettis jetés au Carnaval étaient des dragées (une confiserie italienne semblable à la dragée). Le mot signifie « dragées » en italien

Parfois dans des textes en français le mot confetti se trouve écrit avec un s final pour le pluriel. C'est une faute car ce mot d'origine italienne trouve son seul pluriel correct en i : confetti.

Le mot confetti se serait vulgarisé en France suite à la vogue du Carnaval de Nice à partir de 1873 et viendrait plus précisément directement du niçois, dialecte italien parlé à Nice et pas de l'italien.

Confetti dragées et boulettes de plâtre

Le lancer de bonbons se pratique toujours au Carnaval, en Allemagne. En France, le jet de confetti-dragées existait jadis dans les fêtes et pas seulement au Carnaval :
On jetait ces dragées lors de baptêmes de cloches « À ce moment, une foule immense entoura la salle du festin où l'on vit pleuvoir une grêle de dragées; la joie était grande sur tous les visages, et l'enthousiasme à son comble»
La pratique du jet de confetti-dragées durant les fêtes fut cependant abandonnée :
« Au-dessus de la foule, sur les voitures, sur les trottoirs, sur les balcons, on voit presque sans cesse une grêle de petites dragées que les masques envoient aux spectateurs et que les spectateurs leur renvoient. Autrefois c'étaient des dragées fines et exquises. Mais l'usage de ces libéralités étant devenu trop général, et ces libéralités surtout étant devenues des perfidies, on ne se sert plus aujourd'hui que de petites boules de craie ou de plâtre, auxquelles on continue, seulement par extension, à donner le nom de confetti [1]»

Le nouveau confetti en plâtre fut baptisé à Paris « confetti italien ». Il ne fut jamais utilisé à Paris. On le fabriquait à l'aide d'un entonnoir. Goethe en parle, dans sa description du Carnaval de Rome, auquel il assista en 1787. Sa chambre à Rome donnait sur la via del Corso, ancienne via Flaminia et haut lieu du Carnaval romain. C'est là que se déroulait notamment la fameuse course de chevaux libres clou du Carnaval.
Une brochure contre les confettis en papier, parue en 1895[2] indique une autre recette de confetti italiens :
« Comme les macaroni, les confetti sont d'origine italienne ; à Rome, à Naples, à Nice, on emploie sous le nom de confetti, une préparation mi-sucre et mi-plâtre, formant de petites dragées qui, projetées, se brisent en laissant une poussière inoffensive aussi bien pour la personne atteinte que pour ses vêtements. »
Le confetti en plâtre continua à exister au Carnaval de Nice parallèlement au confetti en papier et fut finalement interdit au début des années 1950.

Le confetti moderne en papier

Où le confetti en papier que nous connaissons aujourd'hui fut inventé ? Il a été avancé en France, l'hypothèse que ce fut à une fête organisée par la presse de Milan, ou au Carnaval de Pau, vers 1880. C'est ce qui est écrit dans un article conservé dans les dossiers « Actualités Carnaval » à la Bibliothèque historique de la ville de Paris. L'année exacte indiquée pour l'hypothèse milanaise est 1884. La réponse à la question de l'origine du confetti actuel parait se trouver en Italie. C'est en 1875 que furent adoptées les chutes de papier utilisées pour l'élevage du ver à soie, en remplacement du confetti fait de billes en plâtre. L'idée en reviendrait à l'ingénieur Enrico Mangili, de Crescenzago, dans la province de Milan, qui a commencé à en faire le commerce. Selon certains l'inventeur du confetti moderne en papier serait le physicien atomiste de Trieste Ettore Fenderl.
La vogue mondiale du confetti en papier commença à Paris au début des années 1890. Les journaux parisiens de ces années-là rapportent qu'elle débuta au Casino de Paris, en décembre 1891, à l'initiative de son administrateur, Monsieur Lué. Son père ingénieur à Modane lui aurait fait parvenir les chutes de papier utilisées à cette occasion. Le lancement du nouveau confetti aurait eu lieu au cours d'une fête donnée pour le Carnaval de Paris, alors très grand et qui durait depuis la Saint Martin, le 11 novembre, jusqu'aux Jours Gras en février-mars, avec une reprise pour la Mi-Carême. La paternité du lancement du confetti à Paris est attribuée, sur la partition de la chansonnette « Les Confettis » éditée en 1895, « À Messieurs Borney et Desprez, Innovateur des Confettis Parisiens ».
Initialement chutes de papier perforé utilisé pour l'élevage du ver à soie, le confetti en papier commença à être fabriqué en grande quantité. Paris en exportait y compris à l'étranger. Les commandes comprenaient les couleurs souhaitées. Il fut même fabriqué du confetti doré.
À ses débuts, le confetti était vendu à Paris au kilo ou au verre. L'emploi qui en fut fait avec le serpentin confina à une véritable épopée. La quantité utilisée au Carnaval de Paris était telle que le lendemain matin des grandes batailles de confettis, l'eau de la Seine à la sortie des égouts parisiens, à Clichy, se métamorphosait subitement en « une immense banquise multicolore ». Un des hauts lieux des grandes batailles de confetti à Paris était les Grands Boulevards.
Le confetti en papier apparut au Carnaval de Nice vers 1892 et sous le nom de « confetti parisiens[3] ».

Les confettis au carnaval de Binche

Depuis quand lance t’on des confettis lors du carnaval ?
Il est certain que c’est d’abord du son ou de la farine que l’on projetait sur les personnes non masquées.
Des bandes de Pierrots circulaient de groupe en groupe et toute personne qui n’était pas déguisée se voyait entourée d’une nuée de petits Pierrots qui « déversaient dans le cou de leur victime le son qu’ils cachaient dans les longues manches de leur costume ». On les appelait les « Pierrots de son ». Ces groupes étaient composés d’hommes et de femmes[4].
Son, farine, lance parfums et même confetti, sifflets et mirlitons, ont cédé la place aux pétards (dont le jet est pourtant interdit) et aux bombes[5].
Depuis une dizaine d’année, tant donné que le lundi gras est la journée la plus creuse au sein des trois jours carnavalesques, les commerçants ont lancé la coutume des batailles de confettis, ceux-ci sont offerts gratuitement par les cafetiers.

Les vendeurs


Il n’y a que quelques maisons qui vendaient masques, confettis et serpentins, la plus connue était la Maison Léon Fondu sur la Grand-rue
Magasin de spécialités pour le carnaval, fabrique de masque, etc. Ce magasin est tenu par l’épouse de Léon Fondu[6], voyageur de commerce. En 1895, la publicité de sa Maison signale qu’il vend des costumes en tous genres * spécialités de tous articles pour le carnaval * confettis * serpentins * fabrique de masques * galons * franges * dentelles * glands * grelots * paillettes * paillons * découpures * or et argent * tissus en tous genres.

Les vendeurs d’accessoires du carnaval ont toujours été interdits sur la voie publique, des mesures de police sont prises chaque année à cette intention, je ne citerai que celles de 1949, ces mesures étant répétitives :
« …Art.3. La vente de tout objet sur la voie publique est interdite, exception faite pour les vessies et les fleurs.
Le stationnement des marchands et l’installation d’échoppes sont interdits, sauf pour le commerce des vessies qui se fera place Eugène Derbaix.
Art. 5. La vente et l’usage des lance-parfums sur la voie publique sont interdits de même que la vente de tous insignes [7].

Les Confettis

Chansonnette, créée à Paris en 1895 par Maréchal, à Trianon-Concert, dédiée à Messieurs Borney et Desprez, Innovateurs des Confettis Parisiens, paroles de Jean Meudrot, musique de Georges Hauser, Paris 1895. 



          Couverture de la partition Les Confettis.

Depuis déjà nombre d'années
Le bœuf gras ne promène plus
Devant les foules étonnées
Les splendeurs de ses flancs joufflus
Le carnaval navrant spectacle
Serait pour sûr mort de langueur
Si les confettis par miracle
N'avaient ranimé sa vigueur

REFRAIN Gaiement

Quand s'amuse Paris
Vivent les confettis
Papillons roses, blancs, bleus, gris,
Neige au reflet multicolore
Vous avez rajeuni le carnaval vieilli
C'est pourquoi le joyeux titi
Vous lancera longtemps encore
Quand s'amuse Paris

Vivent les confetti

Papillons roses, blancs, bleus, gris,
Neige au reflet multicolore
Vous avez rajeuni le carnaval vieilli
Quand s'amuse Paris

Vivent les confettis
 Le Mardi gras, la mi-carême
Petits et grands voulant leur part
De ce nouveau jeu que l'on aime
Envahissent le boulevard
Alors la bataille s'engage
On se bombarde à pleines mains
Et des balcons, c'est avec rage
Qu'on déroule les serpentins

 Or ces jours de fêtes si rares
Ont causé pour des amoureux
Des rencontres plutôt bizarres
Qui n'auraient pas eu lieu sans eux
C'est ainsi que ma sœur Hortense
De son futur époux s'éprit,
Par des confettis, ça commence
Et par un hymen ça finit

Je sais qu'il est des messieurs tristes
Qui blâment ces ronds salissants
Trouvez donc autre chose artistes
Nous vous serons reconnaissants
Mais en attendant autre chose
Ce jeu n'est pas prêt de finir
Il est gai : son succès s'impose
Paris ne doit pas le bannir





[1] Extrait d'une relation du Carnaval de Rome, dans un article intitulé « Le carnaval », Magasin pittoresque, 1836. Dossier sur le Carnaval de Rome, don Tristan Remy, 1977, conservé avec les documents sur le Carnaval de Paris
[2] La croisade contre les confetti par un groupe de Pères de Famille, Brochure de propagande de protestation contre les abus du Carnaval Parisien, Paris Mars 1895, ouvrage conservé à la BNF.

[3] Nouveau Dictionnaire étymologique et historique, par Albert Dauzat, Jean Dubois et Henri Mitterand, Librairie Larousse, Paris 1964, page 188, article Confetti.

[4] GARIN A., Binche et le carnaval, 1998, p. 73.
[5] REVELARD M., Le carnaval de Binche. Une ville, des hommes, des traditions, 2002, p. 134.
[6] Fondu Léon, ° Binche 11-4-1854 x Binche 4-11-1876, Pourbaix Désirée-Ursmarine, ° Binche 3-9-1855, modiste.
[7] A.V.B. 01-00-01-27. Mesures de police commune aux journées du dimanche 27 février, lundi 28 février et mardi 1er mars 1949.

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