A PROPOS DU CONFETTI
Alain GRAUX
Les confettis sont des petits morceaux de papier qu'on lance lors de certaines fêtes, célébrations ou évènements artistiques. Les confettis sont généralement de différentes couleurs
.
Origine et orthographe du mot
À l'origine, les confettis jetés
au Carnaval
étaient des dragées (une confiserie italienne semblable à la dragée).
Le mot signifie « dragées » en italien
Parfois dans des textes en
français le mot confetti se trouve écrit avec un s final pour le pluriel. C'est
une faute car ce mot d'origine italienne trouve son seul pluriel correct en
i : confetti.
Le mot confetti se serait
vulgarisé en France suite à la vogue du Carnaval de
Nice à partir de 1873 et viendrait plus précisément directement du niçois,
dialecte italien parlé à Nice et pas de l'italien.
Confetti dragées et boulettes de plâtre
Le lancer de bonbons se
pratique toujours au Carnaval, en Allemagne.
En France, le jet de confetti-dragées existait jadis dans les fêtes et pas
seulement au Carnaval :
On jetait ces dragées lors de
baptêmes de cloches « À ce
moment, une foule immense entoura la salle du festin où l'on vit pleuvoir une
grêle de dragées; la joie était grande sur tous les visages, et l'enthousiasme
à son comble»
La pratique du jet de
confetti-dragées durant les fêtes fut cependant abandonnée :
« Au-dessus de la foule, sur les voitures, sur les trottoirs, sur les
balcons, on voit presque sans cesse une grêle de petites dragées que les
masques envoient aux spectateurs et que les spectateurs leur renvoient.
Autrefois c'étaient des dragées fines et exquises. Mais l'usage de ces
libéralités étant devenu trop général, et ces libéralités surtout étant
devenues des perfidies, on ne se sert plus aujourd'hui que de petites boules de
craie
ou de plâtre,
auxquelles on continue, seulement par extension, à donner le nom de confetti
[1]»
Le nouveau confetti en plâtre fut
baptisé à Paris « confetti italien ». Il ne fut jamais utilisé à Paris. On le fabriquait
à l'aide d'un entonnoir. Goethe en parle, dans sa description du Carnaval de
Rome, auquel il assista en 1787. Sa chambre à Rome
donnait sur la via del Corso, ancienne via Flaminia et haut lieu du Carnaval
romain. C'est là que se déroulait notamment la fameuse course de chevaux libres
clou du Carnaval.
Une brochure contre les confettis
en papier, parue en 1895[2] indique
une autre recette de confetti italiens :
« Comme les macaroni, les
confetti sont d'origine italienne ; à Rome, à Naples, à Nice, on emploie
sous le nom de confetti, une préparation mi-sucre et mi-plâtre, formant de
petites dragées qui, projetées, se brisent en laissant une poussière
inoffensive aussi bien pour la personne atteinte que pour ses vêtements. »
Le confetti en plâtre continua à
exister au Carnaval de Nice parallèlement au confetti en
papier et fut finalement interdit au début des années 1950.
Le confetti moderne en papier
Où le confetti en papier que nous
connaissons aujourd'hui fut inventé ? Il a été avancé en France,
l'hypothèse que ce fut à une fête organisée par la presse de Milan, ou au Carnaval de Pau, vers 1880. C'est ce qui est
écrit dans un article conservé dans les dossiers « Actualités
Carnaval » à la Bibliothèque historique de la ville
de Paris. L'année exacte indiquée pour l'hypothèse milanaise est 1884. La réponse à la
question de l'origine du confetti actuel parait se trouver en Italie. C'est
en 1875
que furent adoptées les chutes de papier utilisées pour l'élevage du ver à
soie, en remplacement du confetti fait de billes en plâtre. L'idée en
reviendrait à l'ingénieur Enrico Mangili, de Crescenzago, dans la province de
Milan, qui a commencé à en faire le commerce. Selon certains l'inventeur du
confetti moderne en papier serait le physicien atomiste de Trieste Ettore
Fenderl.
La vogue mondiale du confetti en papier
commença à Paris au début des années 1890. Les journaux parisiens de ces années-là rapportent
qu'elle débuta au Casino de Paris, en décembre 1891, à l'initiative de
son administrateur, Monsieur Lué. Son père ingénieur à Modane lui
aurait fait parvenir les chutes de papier utilisées à cette occasion. Le
lancement du nouveau confetti aurait eu lieu au cours d'une fête donnée pour le
Carnaval de Paris, alors très grand et qui durait depuis la Saint Martin, le 11 novembre,
jusqu'aux Jours Gras en février-mars, avec une reprise pour la Mi-Carême. La paternité du
lancement du confetti à Paris est attribuée, sur la partition de la
chansonnette « Les Confettis » éditée en 1895, « À Messieurs
Borney et Desprez, Innovateur des Confettis Parisiens ».
Initialement chutes de papier
perforé utilisé pour l'élevage du ver à soie, le confetti en papier commença à
être fabriqué en grande quantité. Paris en exportait y compris à l'étranger.
Les commandes comprenaient les couleurs souhaitées. Il fut même fabriqué du confetti
doré.
À ses débuts, le confetti était
vendu à Paris au kilo ou au verre. L'emploi qui en fut fait avec le serpentin confina à une véritable épopée.
La quantité utilisée au Carnaval de Paris était telle que le lendemain matin des
grandes batailles de confettis, l'eau de la Seine à la sortie des
égouts parisiens, à Clichy,
se métamorphosait subitement en « une immense banquise multicolore ».
Un des hauts lieux des grandes batailles de confetti à Paris était les Grands
Boulevards.
Le confetti en papier apparut au Carnaval de
Nice vers 1892
et sous le nom de « confetti parisiens[3] ».
Les confettis au carnaval de Binche
Depuis quand lance t’on des
confettis lors du carnaval ?
Il est certain que c’est d’abord
du son ou de la farine que l’on projetait sur les personnes non masquées.
Des bandes de Pierrots
circulaient de groupe en groupe et toute personne qui n’était pas déguisée se
voyait entourée d’une nuée de petits Pierrots qui « déversaient dans le cou de leur victime le son qu’ils cachaient dans
les longues manches de leur costume ». On les appelait les
« Pierrots de son ». Ces groupes étaient composés d’hommes et de
femmes[4].
Son, farine, lance parfums et
même confetti, sifflets et mirlitons, ont cédé la place aux pétards (dont le
jet est pourtant interdit) et aux bombes[5].
Depuis une dizaine d’année, tant
donné que le lundi gras est la journée la plus creuse au sein des trois jours
carnavalesques, les commerçants ont lancé la coutume des batailles de
confettis, ceux-ci sont offerts gratuitement par les cafetiers.
Les vendeurs
Il n’y a que quelques maisons qui
vendaient masques, confettis et serpentins, la plus connue était la Maison Léon
Fondu sur la Grand-rue
Magasin
de spécialités pour le carnaval, fabrique de masque, etc. Ce magasin est tenu
par l’épouse de Léon Fondu[6],
voyageur de commerce. En 1895, la publicité de sa Maison signale qu’il vend des
costumes en tous genres * spécialités de tous articles pour le carnaval *
confettis * serpentins * fabrique de masques * galons * franges * dentelles *
glands * grelots * paillettes * paillons * découpures * or et argent * tissus
en tous genres.
Les vendeurs d’accessoires
du carnaval ont toujours été interdits sur la voie publique, des mesures de
police sont prises chaque année à cette intention, je ne citerai que celles de
1949, ces mesures étant répétitives :
« …Art.3. La vente de tout
objet sur la voie publique est interdite, exception faite pour les vessies et
les fleurs.
Le stationnement des marchands et
l’installation d’échoppes sont interdits, sauf pour le commerce des vessies qui
se fera place Eugène Derbaix.
Art. 5. La vente et l’usage des
lance-parfums sur la voie publique sont interdits de même que la vente de tous
insignes [7].
Les Confettis
Chansonnette, créée à Paris en 1895 par Maréchal, à Trianon-Concert, dédiée à Messieurs Borney et Desprez, Innovateurs des Confettis Parisiens, paroles de Jean Meudrot, musique de Georges Hauser, Paris 1895.
Couverture de la partition Les Confettis.
Depuis
déjà nombre d'années
Le bœuf gras ne promène plus
Devant les foules étonnées
Les splendeurs de ses flancs joufflus
Le carnaval navrant spectacle
Serait pour sûr mort de langueur
Si les confettis par miracle
N'avaient ranimé sa vigueur
Le bœuf gras ne promène plus
Devant les foules étonnées
Les splendeurs de ses flancs joufflus
Le carnaval navrant spectacle
Serait pour sûr mort de langueur
Si les confettis par miracle
N'avaient ranimé sa vigueur
REFRAIN Gaiement
Quand s'amuse
Paris
Vivent les confettis
Papillons roses, blancs, bleus, gris,
Neige au reflet multicolore
Vous avez rajeuni le carnaval vieilli
C'est pourquoi le joyeux titi
Vous lancera longtemps encore
Quand s'amuse Paris
Vivent les confettis
Papillons roses, blancs, bleus, gris,
Neige au reflet multicolore
Vous avez rajeuni le carnaval vieilli
C'est pourquoi le joyeux titi
Vous lancera longtemps encore
Quand s'amuse Paris
Vivent les
confetti
Papillons roses, blancs, bleus, gris,
Neige au reflet multicolore
Vous avez rajeuni le carnaval vieilli
Quand s'amuse Paris
Neige au reflet multicolore
Vous avez rajeuni le carnaval vieilli
Quand s'amuse Paris
Vivent les confettis
Le Mardi gras, la mi-carême
Petits et grands voulant leur part
De ce nouveau jeu que l'on aime
Envahissent le boulevard
Alors la bataille s'engage
On se bombarde à pleines mains
Et des balcons, c'est avec rage
Qu'on déroule les serpentins
Petits et grands voulant leur part
De ce nouveau jeu que l'on aime
Envahissent le boulevard
Alors la bataille s'engage
On se bombarde à pleines mains
Et des balcons, c'est avec rage
Qu'on déroule les serpentins
Or ces jours de fêtes si rares
Ont causé pour des amoureux
Des rencontres plutôt bizarres
Qui n'auraient pas eu lieu sans eux
C'est ainsi que ma sœur Hortense
De son futur époux s'éprit,
Par des confettis, ça commence
Et par un hymen ça finit
Ont causé pour des amoureux
Des rencontres plutôt bizarres
Qui n'auraient pas eu lieu sans eux
C'est ainsi que ma sœur Hortense
De son futur époux s'éprit,
Par des confettis, ça commence
Et par un hymen ça finit
Je sais qu'il est des messieurs tristes
Qui blâment ces ronds salissants
Trouvez donc autre chose artistes
Nous vous serons reconnaissants
Mais en attendant autre chose
Ce jeu n'est pas prêt de finir
Il est gai : son succès s'impose
Paris ne doit pas le bannir
Qui blâment ces ronds salissants
Trouvez donc autre chose artistes
Nous vous serons reconnaissants
Mais en attendant autre chose
Ce jeu n'est pas prêt de finir
Il est gai : son succès s'impose
Paris ne doit pas le bannir
[1]
Extrait d'une relation du Carnaval de Rome, dans un article intitulé « Le
carnaval », Magasin pittoresque, 1836. Dossier sur le Carnaval de Rome,
don Tristan Remy, 1977, conservé avec les documents sur le Carnaval de Paris
[2] La croisade contre les confetti par un
groupe de Pères de Famille, Brochure de propagande de protestation contre les
abus du Carnaval Parisien, Paris Mars 1895, ouvrage conservé à la BNF.
[3]
Nouveau Dictionnaire étymologique et historique, par Albert Dauzat, Jean Dubois
et Henri Mitterand, Librairie Larousse, Paris 1964, page 188, article Confetti.
[5] REVELARD M., Le carnaval
de Binche. Une ville, des hommes, des traditions, 2002, p. 134.
[6] Fondu Léon, ° Binche
11-4-1854 x Binche 4-11-1876, Pourbaix Désirée-Ursmarine, ° Binche 3-9-1855,
modiste.
[7] A.V.B. 01-00-01-27. Mesures de
police commune aux journées du dimanche 27 février, lundi 28 février et mardi 1er
mars 1949.
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