HOMMAGE AU FURTEU
Fernand GRAUX
Figurez-vous que la semaine dernière j’ai
trouvé une lettre toute blanche avec un beau timbre à mon nom adressée à
« Monsieur Fernand Graux, écrivain dialectal » (j’ai été très
surpris, c’était bien la première fois qu’on m’adressais une lettre avec une
dénomination si pompeuse)
Très vite,
j’ai pris des ciseaux pour l’ouvrir, curieux comme je suis afin de savoir ce
qu’on me voulait. Ce n’était rien moins
qu’une invitation pour aller rendre hommage au talentueux écrivain
patoisant binchois bien connu de tous, Raymond Rochez, à la salle Saint-Ursmer,
rue Saint-Jacques
Je dois vous dire avec franchise que je n’ai
pas l’habitude de me rendre là, mais comme « on » avait pris la peine
de m’envoyer cette lettre et qu’on ne m’avait pas oublié, j’ai pensé que
c’était mon devoir de m’y rendre, pour une fois changer mes habitudes et
surtout pour célébrer cet homme là.
Quoique d’opinion différente, il avait toujours
témoigné à mon égard une certaine admiration pour ce qui était de mes
occupations théâtrales, pour les ducasses que j’organisais ; ou par mes
billets patoisans dans « T’Avau Binche ». Même s’il se trouvait sur
le trottoir d’en face quand on se rencontrait, je le revois avec son petit
chapeau plat, son petit nœud « pap », il me saluait « bonjour
Monsieur Graux » avec un grand sourire.
Dans ses billets il ne laissait rien passer des
événements de la semaine, il fallait une bonne tête pour écrire tout ça pour le
plus grand plaisir de ses nombreux lecteurs.
Pour en revenir à la séance…je me suis retrouvé
à l’âge de neuf ans, sur la place de Binche où je suis né, où il racontait que
pour peu d’argent (on disait que c’étaient des « mastoques »), on
allait chez une kyrielle de petits marchands qui vendaient des
« piquantes ». Pour ma part, je me souviens surtout de la vieille
madame Monchaux qui avait une boutique juste en face de la rue Saint Roch (rue des
Triperies). Je la revois manipulant le sucre tout chaud sur une pierre de
marbre, elle faisait des « bourdons »
carrés et avec le restant de son poêlon elle fabriquait des « couilles de nonettes » (des
carabibis avec des rayures comme des zèbres). Elle vendait trois bourdons et
deux carabibis pour vingt-cinq centimes ! Allez encore chercher çà à
l’heure actuelle ! Il rappelait aussi qu’au « Suisse » sur la
Grand-rue près du pylône, on faisait tourner une roue à clous qu’une plume de
pigeon arrêtait ; on y avait toujours droit à la même chose, un caramel
mou, « plat comme en’ figotte » pour dix centimes…enfin je vous en
raconterais jusqu’à demain…Bref, pour en revenir à la cérémonie, j’en suis
revenu tout enchanté d’avoir évoqué ces souvenirs d’autrefois.
Adieu Furteu…je ne souhaite qu’une affaire,
c’est qu’il y en ait d’autres à venir, des écrivains comme vous, pour le
plaisir de tous.
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