L’INSTALLATION DES
RECOLLECTINES A BINCHE EN 1620
Alain GRAUX
La
communauté du béguinage n’ayant plus que quatre membres, le Magistrat de Binche
proposa l’échange du couvent des béguines contre celui des Récollets qui
s’étaient établis dans la ville, ce fut réalisé par décret du roi Philippe II
le 29 octobre 1598. Les béguines étant âgées, la communauté s’éteignit naturellement
à leur décès.
En 1618, le gouvernement et prévôt de Binche,
Charles de Lorraine, duc d’Aumale, désira établir un couvent de Capucines en
ville ; le conseil composé de l’ancienne et nouvelle loi, se réunit en
conséquence le 2 mai 1618. La tentative fut repoussée par les Récollets qui
eurent la crainte de voir leurs revenus diminués ; néanmoins, les
Pénitentes de l’Ordre de Saint-François (populairement appelées Capucines)
voulurent s’établir à Binche. Guillaume Chamart, leur protecteur, conseiller à
Mons, les introduisit en ville avec l’acquiescement du duc d4Aumale comme nous
l’apprend le texte suivant issu de l’assemblée du Magistrat en octobre
1619 :
« Assemblée
de l’ancienne et nouvelle loi du 5 octobre 1619
Conclu par messieurs
les prédits comparans veu l’advis de Monseigneur le duc d’Aumale, gouverneur et
prévost de la ville de Binch d’accepter le conseiller Chamart en l’introduction
d’un nouveau couvent des filles du tierch ordre St François r éformé qu’il
prétend faire en ceste ville ville soubz les charges debvises et conditions
suivantes et non aultrement ;
-
Premièrement, que les dites filles
debvront estre présentées à la mère
maîtresse du dit couvent, pou par elle lorsqu’elles les vouldra admettre , les
représenter au prévost, jurez et conseilz de la ville de Binch, afin de par
iceulx cognoistre et avoir appaisement de la somme qu’elles y seront subjectes
y apporter ensemble de l’hypothèque et seureté, alias non.
-
Que le nombre des dites filles ne
poldra excéder quinze sans le consentement du dit magistrat.
-
Que nulles filles poldront estre
receue quy ne fuissent et chacune rentées por le moins de cent florins monnoye
de Haynnau et d’un muid de bled par an ou bien au lieu du dit muid de bled
possedantes et jouyssantes de deux bonniers de terre valissantes du dit muid de
bled, alias écus.
-
Que devant les dites filles receues
elles et chacunes d’icelles debvra appaisement audit magistrat de la seureté
des dites rentes quy debvront estre hypothéquées.
-
Que toutes les dites filles
prétendantes audit ordre debvront à leur
reception apporter avant main un canon et année des dites rentes.
-
Que la maison estant rentée de deux
mil florins monnoye prédite et de quinze muids de bled l’on poldra et debvra
recepvoir des povres et honnestes filles avecq moindre ou nulle recognoissance
et ce dedans ledit nombre de quinze et sans préjudicier au droit des dits
magistrats lesquelz nécessairement debvront toujours avoir la cognoissance des
filles à recevoir, aliter non.
-
Que les filles du dit Binch debvront
estre et seront entendues préférées aux aultres.
-
Que les filles du tierch ordre
St-François réformé ne polront aller mendier, ainsi debvront estre chacune
d’icelles rentées de deux cent libvres tournois monnoye susdite et d’un muid de
bled jusques jouyssantes de deux bonniers de terre valisantes, ledit muid de
bled jusque à ce inclusivement que la maison sera rentée de quattre mil libvres
et 15 muids de bledz, le tout conformément aux articles ci-dessus.
-
Que le dit conseiller Chamart sera
tenu de pourvoir ladite maison d’un chappelain à ses fraix, pourquoy avant
l’introduction debvra donner assurance de trois cent libvres tournois par an
(l’advis de Monseigneur le duc d’Aumale ; gouverneur de Binch est que cet
article sera de nul effect et valeur).
-
Que les dis du magistrat debvront
avoir veue et audition des comptes à rendre par le père sindicque, pour le bony
estre employé où il leur semblera, au profit néanmoins de la maison, alias non.
-
Que tous remboursements des deniers
capitaux en extinction de rente se debvront faire es mains dudit magistrat pour
par iceulx à l’intervention du prédit père sindicque estre remployé au plus tôt
que faire se polra et tenir semblable nature
-
Que pour la maison du beghinage
laquelle a esté que devant.choyez pour la demeure des dites filles, le dit
conseiller rendera annuellement oultre et par-dessus environ X s. de vieses
rentes donnés par ledit héritage la somme de cent cinquante libvres tournois
monnoye prétouchés au rachapt du denier dix huict
-
que présentement on aura à bastir ce
quy sera trouvé de besoing et que les dits magistrats auront la cognoissance
d’où l’argent procèdera
-
Et comme présentement les bourgeois
et manans dudit Binch se trouvent en nécessité d’eau, ledit conseiller Chamart
debvra faire faire un puits en tel lieu que l’on trouvera convenir pour laa plus grande commodité des dites filles, renonchant dès maintenant
et pour tous cours au fillet d’eau de la fontaine qu’elles polroient prétendre.
-
Que toutes poursuites à faire pour
introduire les dites filles pour avoir l’agréation du général et provincial à
tout ce que dessus pour obtenir amortissement des biens, pour obtenir
condemnation volontaire afin de se traire sur le bien des filles en cas de
contravention aux debvises susdites et généralement pour faire ce quy sera
trouvé de besoing se feront aux dépens et fraix di dit Chamart
-
Et finalement pour tout ce que
dessus et à l’entretenement des dites
conditions le prédit conseiller Chamart se debvra bien et dessement obliger
mesme donner fin et assurance à
l’appaisement des dis du magistrat.
Toutes et quantes fois qu’il aura ledit Chamart furny aux debvises et
conditions susdites on promet de recepvoir les dites filles et accepter ledit
couvent.
Signé : le prévôt et les membres de la nouvelle et vieille loi. »
Ce règlement fut approuvé le 17
octobre 1619 par les jurés et conseil de la ville :
« Charles Hulin a fait debvoir de faire lecture des conditions debvisées
avecq Monsr le conseiller Chamart touchant l’admission et introduction des
pauvres filles du tierch ordre de Saint-François réformé desquelles il avoit
donné copie audit Sr Chamart. Lesquelles conditions ont esté approuvées par mes
dits sieurs et ordonné les enregistrer en telle forme et manière que lecture en
a esté faicte »
L’épouse du conseiller Chamart, Catherine
Rouvez, secondait son mari, elle était très dévouée aux bonnes Sœurs :
« MADelle Chamart pour et au nom des pauvres filles du tierch ordre de
st-François réformé requiert qu’il pleut à Messieurs leur laisser tous meubles
appertenans à l’église du béghinage selon l’inventaire que les maistres ont es
mains » (Conseil du 30 juillet 1620)
Grâce à ces libéralités elle fit
restaurer et agrandir les bâtiments de l’ancien béguinage.
Dès 1620, les religieuses
s’établirent sous la conduite d’Elisabeth de Saint Omer.
La supérieure était secondée par Mre
Philipe Dartevelle, syndic de la communauté :
« Mre Philippe Dartevelle a requis pour les pauvres filles Capucines un
coing de costé du parloir à prendre vers la porte de Mélion. Accordé »
(Conseil du 4 novembre 1621)
« Mre Philippe Dartevelle au nom de la mère supérieure du tierch ordre de
St François at requis luy estre administrez les tiltres du bien des dites
religieuses pour en thirer des copies authentiques Le greffier en fera des
extraitz » (Conseil du 24
novembre 1622)
« Sur requeste faicte par Mre Philippe Dartevelle comme père sindicque
des révérendes religieuses du tierc ordre Monsieur Saint-François affin qu’il
pleut à Messieurs visiter les bâtiments que prétendent eslever les dites
religieuses à fronc de la rue Lyon Allard, conclu de faire la visitation
requise quand lrd dites religieuses auront donnez les copies authentiques de
tous leurs biens héritiers, comme elles sont tenues par contract faict sur
l’altération du premier cogneult à leur réception.
Laquelle conclusion aiant esté communiquée audit Dartevelle il a requis
de nouveau de voloir faire icelle invitation offrant à cet effect de leur
furnir et livrer les dites copies en dedans le 1er jour du mois de
juing prochain su X l. d’amende.
Accordé pour autant que peult toucher à Messieurs l’érection des
bâtimens prétendues faire en la forme représentée sur icelle visitation »
« Les jurés de Binch, sur la demande du duc d’Aumale, autorisent deux
filles à prendre l’habit de St-François en Binch, moyennant 200 livres de rente
chacune et sans furnir le muid de bled ; sans préjudice pour l’avenir,
l’une estant native de binch » (Conseil du 24 décembre 1620)
Une fille de Chimay est admise à
prendre le jour de Sainte Catherine l’habit des pauvres filles Capucines moyennant
100 livres
de rente seulement (Conseil du 5 novembre 1621)
En reconnaissance de sa naissance en
cette ville, Barbe Maloux, fille de Louis, est autorisée à faire profession de
foi au couvent Notre-Dame des Anges, moyennant une rente de 150 livres (Conseil du
29 décembre 1622)
« Afin d’éviter procès quy poulroy naistre pour la donation de IIIIXX
livres faicte par Mre Gabriel Boucher pour la fondation d’un pain et du depuis
au profit des Capucines pour la fondation de deux messes par semaine leur avant
transporté les lettres, accordé qu’elles recepvront deux années après le trépas dudit Boucher seulement,
pourveu que présentement elles rendent les lettres »
Ces lettres furent rendues le 29
mars 1623 (Conseil du 2 mars 1623)
Jean Galopin, marchand de fer à
Mons, afin que sa sœur Jeanne, en religion Sœur Françoise de la Croix, fut
admise aujourd’hui à la profession à l’abbaye et couvent des Capucines de
Binche, certifiée qu’elle est propriétaire de divers biens non grevés de rentes
(Conseil du 21 février 1629)
Ces quelques textes nous éclairent
ainsi sur l’établissement de cette communauté religieuse binchoise mal connue
qui disparut en 1783 suite au décret de Joseph II ordonnant la suppression des
congrégations de femmes qualifiées inutiles.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire