lundi 2 janvier 2017

La chapelle Sainte-Anne de Battignies


La chapelle Sainte-Anne de Battignies
                                                                                                                                          Alain GRAUX
La chapelle Sainte-Anne de Battignies, une modeste construction de briques des 16e et 17e siècles, fut édifiée sur le territoire de l’ancienne commune de Battignies[1], au-delà du territoire ancien de la ville de Binche, elle désservait le hameau au temps où  celui-ci dépendait de la prévôté de l’abbaye de Sainte Rictude en Ostrevant (Marchiennes).   

La chapelle avant la restauration de 1903

De tradition gothique, elle est composée d'une nef rectangulaire et d'un chevet à trois pans, les angles raidis de harpes en calcaire de grand appareil dont les marques de carriers notamment celles de Michel Derbais[2] et de Nopère[3], confirment la datation du monument. Le soubassement est saillant à chanfrein de pierre, dont les retours à congé s’intègrent à l'ouest aux montants de la porte, celle-ci sous arc en plein cintre est doublée d’une archivolte amortie.
Le seul document ancien, qui nous est parvenu, relatif à la chapelle date de 1787, il nous renseigne que peu de rentes étaient attribuées au fonctionnement et entretien de la chapelle et qu’elle était tenue par un mambour, en voici la teneur :
« Rentes dues à la chapelle Sainte-Anne à Battignies :
-          Jean-François Soupart de Battignies, doit sur sa maison une rente d’un florin.
-          Léonard Buisseret de Battignies, doit 2 florins de rente, levée sur sa maison de cense sise à Battignies. Cette rente ne se reçoit plus depuis l’an 1773, d’autant que le dit Buisseret a livré pour la chapelle un devant d’autel et galons en or, en déduction des arrérages.
-          Les héritiers Stavart doivent 1 florin 6 sous pris dans une rente de 8 florins 10 sous hypothéquée sur leur prairie à Battignies. Cette fondation a été créée pour 18 messes à célébrer chaque année en la dite chapelle après leur mort.
-          La Vve Duchâteau de Binche doit dix sols de rente sur sa maison à Battignies.
-          Charles Raparlier de Binche doit 3 florins par obligation personnelle, hypothéquée sur sa maison à Binche en la Haite rue.
-          Une rente de 2 florins 19 sols 12 deniers déclarée non franche, hypothéquée sur une maison à Binche, sur la place. Cette rente fut payée jusqu’en 1781, à présent refusée de payer par les héritiers du Sr feu Maloux de Binche.
-          Jean-Joseph Leghait de Binche doit 16 sols de rente hypothéquée sur sa maison de cense sise à Battignies. Cette rente est prise dans une rente de 21 florins pour la desservitude d’une messe chaque lundi de l’année en la chapelle Sainte-Anne, hypothéquée sur la même cense. Capital 294 florins.
-          Nicolas Leroi et Nicolas Latteur, de Battignies, doivent 20 florins 10 sols pour la célébration d’une messe tous les dimanches de l’année, hypothéquée sur un bonnier de terre à présent jardin sis à Battignies. Rente créée le 1er mai 1716.
-          Dans la chapelle Sainte-Anne se trouve une épitaphe en lettres d’or dans laquelle il est dit que le Sr Maloux de Binche, a fondé une messe à célébrer tous les mardis et deux solennelles, savoir le jour St-Germain et Ste-Anne.
-          Le dernier légat de la ville de Binche est de 10 florins 10 sols de rente, vu l’impossibilité de prouver les fondations de ces rentes, la recette des rentes ci-dessus est due à la chapelle Sainte-Anne audit Battignies, pour luminaires et ornements d’icelle. Cependant, le receveur de la dite chapelle ne reçoit plus depuis 1781 que 6 florins 4 deniers.
Dépenses et débours de la dite chapelle :
-          Payé pour chandelles de cire 1 florin 4 sols, par an.
-          Payé pour le blanchissage de linge et raccommodage 1 fl. 15 s. par an.
-          Payé pour ferraille et entretien de la clochette, 8 sols par an.
-          Payé pour l’entretien de l’autel, 12 sols par an.
-          Payé pour l’entretien des vitres, 1 fl., par an.
-          Payé pour l’entretien de la chassupe (chasuble), amitre (amict), lavabo, sac à calice, 2 fl. 10 s., par an.
-          Payé pour avoir raccommodé le toit et pour maçonnerie, 1 fl. 4s. 2d.
-          Payé au domestique de la chapelle pour nettoyer, 10 sols par an.
-          Payé pour XXe denier au receveur de la chapelle, 6fl. 4s., par an.
-          Il faut remarquer que si la chapelle redoit, c’est à cause qu’on a acheté un quadre (cadre) en cuivre et une chasuppe, fait et calculé le plus juste possible par le mayeur et échevins de la terre franche de Prisches.
Fait ce 7 avril 1787,    signé    J-A. Lengrand, mayeur.
                                               Erme J. Latteur, échevin
                                               Ferdinand Lengrand, échevin
                                               G.A. Goffaux
                                               J-B. Mouchart                                               »[4].
Lors de la restauration de 1899, au-dessus de la porte, un fac-simile d’une pierre blanche originale fut replacé, représentant au parti premier l’escarboucle pommetée qui est l’écu de l’abbaye de Marchiennes-en-Ostrevant, de l’autre les armes de Jean IV de Jonquoy[5], 48e abbé de Marchiennes de 1662 à 1650. L’écu est surmonté de la mitre et posé sur une crosse abbatiale. Devise OMNIA SUAVITER (Toutes choses avec douceur).
Les fenêtres de la nef, fortement restaurées, sont en arc brisé. Sur les côtés comme au dessous du pignon ouest, débordant, de petites niches en briques sous archivolte sont de même matériau. Une frise dentée et la bâtière d’ardoises à pans coupés est dominée par un clocheton à épi effilé sur une base octogonale.
A l’intérieur on trouve une statue de Sainte-Anne trinitaire, en chêne polychromé de la fin du. XVIIe siècle. Un Christ gothique en bronze doré du XVIe siècle, est monté sur une croix plus récente. Dans une niche, deux têtes d’angelots, Renaissance, en bois de chêne peint, du 1er tiers du XVIIe siècle[6].
Une statue de la Vierge et de l’enfant Jésus porte des accessoires en argent, la couronne de la Vierge porte l’inscription « M.I. Coenne » au poinçon de Mons du 3e trimestre du XIIe siècle ; la couronne de l’Enfant Jésus ainsi que le sceptre datent de la moitié du XIXe siècle.
Le dénombrement des biens du clergé séculier de Hainaut réalisé en 1787, indique que les revenus de la chapelle consistant en fondations de messes et rentes, s’élevaient à 59 florins 10 sols 6 deniers. Le déficit qui résultait de son entretien était payé par les habitants[7]
Il y eut plusieurs restaurations de la chapelle : en 1877[8], en 1899 et en 1903.
La restauration de 1877, sous le maïorat de Victorien Caudron, fut effectuée par les soins de l’architecte Surlereaux.
Ces travaux consistèrent aux travaux ci-dessous :
  1. Déblais pour nivellement au pourtour et aux abords de la chapelle, et dans la fouille des fondations nouvelles.
  2. Démolition des parties de la construction en mauvais état et de la mise en sécurité du mobilier pour le temps employé à la restauration.
  3. Rejointoiement et ciselage, peinturage des parements des murs intérieurs.
  4. Fourniture et pose de pierres de taille provenant des carrières de Soignies, d’Ecaussinnes ou de Feluy.
  5. Construction d’un nouveau clocher et mise en bon état de la charpente et construction d’un plancher solide au grenier de la chapelle.
  6. Emploi d’ardoises provenant des carrières Ste-Anne de Fumay et de voliges neuves pour la toiture, et d’une plomberie en bois et zinc à l’égout du toit.
  7. Remplacement de la grille en bois à l’intérieur par une grille en fer, d’un pavement en ciment comprimé de la fabrique Fiévé et Cie, de Gand, au lieu du pavement en carreaux de terre cuite détruit. Plafonds avec gorge et moulures de plâtre de Montmartre, établis de façon à donner plus de hauteur à l’intérieur ; nouveaux enduits sur les murs avec plinthes en bas.
  8. Remplacement des châssis en bois garnissant les fenêtres par des vitraux en couleur, sur plomb, y comprenant la nouvelle fenêtre du grenier et treillage en fil de fer.
  9. Réparation et mise en bon état de la porte d’entrée et de l’autel à remplacer après avoir  enlevé la peinture qui cache le ton du bois à laisser nu, tout en devant des parties sculptée.
La restauration coûta la somme de 5880 Fr., la valeur des vieux matériaux non employés, tels que châssis, grilles de bois, pierres de tailles, sont à déduire pour 180 Fr. Le total de la restauration fut donc de 5700 Fr.[9]
En 1899, la restauration de la chapelle effectuée sous le maïorat du bourgmestre Eugène Derbaix, fut réalisée avec les indications de Charles Hodevaere, archiviste adjoint à Mons.
Lors de l’inspection de l’hôtel de ville de Binche par la Commission royale d’Art et d’Archéologie, le 11 novembre 1901, l’attention de la délégation s’est portée sur la chapelle Sainte-Anne. Suite à cette visite une restauration de la chapelle s’est avérée nécessaire.
Les abords de la chapelle ont été aménagés sous le maïorat de Charles Deliège.

[1] Les limites approximatives du vaste village de Battignies, étaient celles-ci : les remparts de la ville de Binche (rue de la pépinière), la rue actuelle de la Princesse (ancienne rue de Péronnes), la chaussée Brunehault, jusque l’ancienne barrière Julien, se dirigeaient vers Parsignies et Prisches, jouxtant Epinois et Buvrinnes, redescendant vers le Pavé de Charleroi pour rejoindre les remparts à la Pasture.
[2] 2 marques de Michel Derbais, tailleur de pierre d’Arquennes ayant travaillé entre 1593 et 1652
[3] 2 marques de la famille Nopère, maîtres de carrières ayant travaillé dans la 2e partie du XVIe s. et la première du XVIIe s.
[4] A.E.M. Archives locales C.115.
[5] Les meubles de ce blason sont exactement comme ceci :
Parti : au I, d'or à l'escarboucle de sable percée de gueules (qui est abbaye de Marchiennes);  au II, écartelé, aux 1 et 4 de gueules à trois roues à cinq rais d'argent, aux 2 et 3 d'argent à trois losanges de gueules, celle du premier quartier couverte par un franc-quartier fascé d'or et d'azur de quatre pièces (qui est Jean de Joncquoy).
[6] LEQUEUX J-M., Répertoire photographique du mobilier des sanctuaires de Belgique. Canton de Binche, Bruxelles 1977, p.15.
[7] A.E.M.
[8] A.V.B. 02-10-07-1
[9] A.V.B. 02-10-07-1.

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