LES NAISSANCES
ILLEGITIMES A BINCHE
SOUS L’ANCIEN
REGIME
Alain GRAUX
La légitimité d’une naissance se définit par référence au caractère juridique de l’union dont elle résulte. En principe,
l’enfant légitime est un enfant conçu au cours du mariage de ses parents. Dans la pratique, le
classement des naissances en naissances légitimes et en naissances
illégitimes s’effectue d’ordinaire (hormis le cas des enfants
issus de mariages dissous) d’après l’état matrimonial de la mère au moment de
l’accouchement. Il en résulte
que les naissances provenant de conceptions prénuptiales, ou conceptions anténuptiales,
c’est-à-dire de conceptions ayant précédé le mariage sont généralement comprises parmi les naissances légitimes lorsque le
mariage a été célébré avant l’accouchement.
L’enfant illégitime, ou enfant naturel,
qui est en principe un enfant dont les parents n’étaient pas unis par les liens
du mariage lors de sa conception, peut être éventuellement reconnu
par l’un ou l’autre de ses parents, ou par les deux, ce qui a pour effet
d’établir juridiquement sa filiation
à leur égard. L’enfant légitimé est un enfant naturel auquel le mariage de
ses parents a conféré un statut juridique plus ou moins comparable à celui d’un
enfant légitime.
Parmi
les enfants naturels on
distingue : l’enfant naturel simple, issu de parents entre lesquels
n’existait aucun empêchement de mariage lors de sa conception; l’enfant
adultérin, dont l’un au moins des parents était marié lors de sa
conception; et l’enfant incestueux, entre les parents duquel existait,
lors de sa conception, un empêchement de mariage fondé sur la parenté ou l’alliance.
Dans la conscience populaire
traditionnelle, le mariage n'était pas le seul cadre permettant des relations
sexuelles légitimes: il y avait aussi les fiançailles, les promesses de mariage. La règle d'abstinence
imposée par la loi et par l'Eglise avait pour effet de contraindre les couples
à se marier le plus rapidement possible dès que s'annonçait une grossesse
prénuptiale. Une naissance illégitime se produisait quand les parents étaient
dans l'impossibilité de se marier, que ce fût en raison d'empêchements légaux,
par manque de moyens (cas fréquent en temps de crise économique), parce que le
père était déjà marié ou encore parce que, absent ou étranger, il échappait à
sa responsabilité, ce qui se produisait assez souvent avec les membres de groupes mobiles, sans ménage, comme les domestiques, les compagnons artisans
et les soldats.
La moyenne des naissances
illégitime dans une petite ville comme Binche, est assez basse (Voir le tableau
qui suit), sauf pour les deux décennies de la fin du XVIIIe siècle. La crainte
des châtiments judiciaires, du déshonneur et du mépris social est surtout
perceptible dans les cas d'abandon d'enfants (enfants
abandonnés) et d'infanticide.
Avec un taux de mortalité infantile plus élevé et une socialisation plus
difficile, les enfants illégitimes avaient moins de chances dans la vie que les
autres.
Grâce à la rédaction des tables
des registres paroissiaux, on peut définir à Binche quelques types de
naissances illégitimes, signalées soit à la sage-femme et/ou aux jurés de la
ville, par aveu des parturientes dans les affres de l’accouchement :
a)
Naissances dues aux nombreuses troupes militaires
casernées en ville.
b)
Naissances dont le père putatif est connu
c)
Naissances adultérines
d)
Naissances d’enfants de veuves ou de femmes délaissées
par l’absence de leur mari
e)
Naissances illégitimes au sein d’une même famille
f)
Abandon d’enfant (voir notre article sur ce sujet).
Passons-les en revue par des
exemples concrets :
a)
Naissances dues
à des militaires
Quelques
exemples :
Marguerite,
née le 16-04-1643, fille de Huart Marguerite
Père :
Dubon Jean. Soldat servant sous le comte de Bucquoy.
Simone-Charlotte,
née le 18-08-1697
Père :
Bouthor Claude, militaire.
André-Joseph,
né le 19-03-1674, fils de Catherine Chevalier.
Père :
Charon Nicolas .Soldat du régiment du comte de Naucret.
Marie-Joseph,
née le 06-01-1710, fille de Marie-Claire Goffaux.
Père
Dubrulle François -Charles, Dragon du
régiment d'Aqua-Viva.
Jean-Antoine,
né le 17-07-1713, fils de Marie-Michèle Coiden.
Père :
de Huchet François , capitaine du
régiment de Salablancha.
Marie-Amalberge,
née le 06-12-1716, fille de Marie-Joseph Labye
Père :
Bugausgi Jean, soldat du régiment allemand de Herbestein.
Antoine-Joseph,
né le 15-05-1724, fils de Jenne-François e
Lisse.
Père :
Latour Emmanuel-Joseph, Capitaine du régiment d'infanterie du prince de Ligne.
Marie-Caroline-Joseph,
née le 14-11-1744, fille de Ballet Marie-Caroline-Joseph,
Père :
Michel-Joseph Ballet, de Mons, caporal de la compagnie de Miraumont, régiment
d'Arenberg en garnison à Charleroi.
Marie-Elisabeth-Rose,
née le 29-12-1744, fille de Dauvillez
Père :
Loutevi Jean, soldat du régiment de Waldecq, déclaration de la mère.
Père :
Meurard Michel, soldat du régiment de Fischer.
Marie-Rose-Joseph,
née le 27-07-1749, fille de Dath
Père :
Lisier Philippe, cavalier du régiment de Clermont-Tonnerre. Déclaration de la
mère à la sage-femme,
Marie-Eléonore-Joseph,
née le 25-02-1777, fille de Blondiaux
Père :
Offrement André-Joseph, soldat à Mons, déclaration de la mère aux jurés.
b) Naissances dont le père putatif est connu
Nous ne donnerons que quelques
exemples :
Marie-Gérardine,
née le 08-04-1731, fille de Buisserez Charline
Père :
Frognu Pierre, de Seneffe. Déclaration de la mère au greffier Laloyaux et aux
jurés Bourgeois et Waulde.
Marie-Rosalie,
née le 11-12-1758, fille de Marie-Claire Bailly
Père :
Buisserez Antoine, déclaration de la mère à la sage-femme accompagnée d’Anne-François e Canivez et de Marie-Adrienne Deprez.
Amoluin-Joseph,
né le 29-05-1760, fils de Marie-Jeanne Boussart
Père :
Michel Louis-Joseph, Déclaration de la mère
aux jurés Waulde et Blairon.
Marie-Thérèse,
née le 22-09-1762, fille de Marie-Claire Michel
Père :
Bablart François -Joseph, déclaration
sous serment de la mère aux jurés de Binche.
c) Naissances adultérines
Marie-Catherine,
née le 24-11-1761, fille de Marie-Joseph Baudoux.
Père :
Bacq Augustin, homme marié, déclaration de la mère à la sage-femme
Marie-Joseph, Charles ainsi qu'à Ursmer Lecompte et Charles Boudart.
Charles,
né à Ressaix le 18-05-1666-baptisé à Binche, fils Jacqueline Lagrange, épouse Guillaume Hardaz.
Jean-Baptiste,
né le 09-02-1770, fils de Badoux Marie-Joseph
Père :
Lebrun N.N. Homme marié, Déclaration de la mère devant Joseph et Hubert
Splingart.
Jean-Louis,
né le 26-08-1777, né le 26-08-1777, fils de Marie-Thérèse Blondiau
Père :
Lamoral Delval, homme marié, déclaration devant la sage-femme et du juré
Lebrun.
Marie-Joseph,
née le 09-04-1720, fille de Marie-Antoinette Courtois
Père :
Gaillart Mathieu, homme marié, déclaration de la mère à la sage-femme jurée.
d) Naissances d’enfants de veuves ou de femmes
délaissées par l’absence de leur mari
Quelques
exemples :
Marguerite,
née le 16-01-1601, fille de Nicole Brasseur, femme de Florent Vaillant
Marie-Rose-Joseph,
née le 09-01-1764, fille Marie-Philippine Falise, veuve Gille Dubrue.
André-Joseph,
né le 15-05-1787, fille de Marguerite
Dusart, veuve
e) Naissance illégitime au sein d’une même
famille
Antoine,
né le 27-04-1652, fils de Anne Delfosse.
Père :
Jean Evrart, mari de Pétronille Delfosse, sœur de Anne, mère de l'enfant.
Marie-Catherine,
née le 15-05-1734, fils de Marie Colin
Père :
Delhaye Jean, veuf Colin Marie-Barbe, sœur de la mère, déclaration de la mère
aux jurés Bard et Laloyaux.
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